Le recul est indispensable pour transformer l’actualité vue et vécue au jour le jour en une histoire cohérente, avec un souci d’objectivité. Malgré tout, la Révolution déchaîne toujours les passions.
Au XIXe siècle, le lyrisme de l’historien Michelet n’a rien à envier à celui d’Hugo et les historiens « de gauche » s’enthousiasment naturellement pour la Révolution. Commençons par ces témoignages, signés de Noms connus.
À feuilleter pour tout savoir.
« La Révolution française est le plus puissant pas du genre humain depuis l’avènement du Christ. »1631
Conscience politique de son siècle, homme de cœur et sensibilité de gauche, il aime d’autant plus la Révolution (et l’Empire) qu’il est déçu par les princes qui gouvernent au XIXe siècle et par les révolutions inabouties.
« De la première page à la dernière, elle [la Révolution] n’a qu’un héros : le peuple. »1273
Jules MICHELET (1798-1874), Le Peuple (1846)
Fils d’un imprimeur ruiné par le régime de la presse sous le Consulat et l’Empire, Michelet connaît la misère dans sa jeunesse et en garde un profond amour du peuple. Écrivain engagé dans les luttes de son temps riche en révolutions d’un autre style, manifestant contre la misère des ouvriers, il composera dans l’enthousiasme son Histoire de la Révolution française : dix ans et sept volumes pour une œuvre inspirée, remarquablement documentée. Les plus belles pages de son œuvre maintes fois rééditée, mentionnée sous le terme générique d’« Histoire de France ».
« La Déclaration des droits de l’homme apprit au monde entier que la Révolution française était faite pour lui. »1347
Jules SIMON (1814-1896), La Liberté (1859)
Par son exigence de rationalité et d’universalité, la Déclaration française dépasse les précédentes déclarations anglaise et américaine, même si elle s’inspire de la Déclaration d’Indépendance de 1776. Elle porte surtout la marque d’une bourgeoisie libérale nourrie de la philosophie des Lumières. Deux autres Déclarations suivront, en 1793 et 1795.
Au XXe siècle, le monde a perdu beaucoup de ses repères et ses utopies, les Français sont souvent critiques et critiqués, mais la France reste dans la mémoire collective « la patrie des droits de l’homme », ce qui implique quelques devoirs aux yeux du monde.
« Rien au monde ne fait plus d’honneur aux Français que d’avoir été capables de se donner froidement, impassiblement leur Code civil au milieu du délire de 1793. »1527
Edgar QUINET (1803-1875), La Révolution (1865)
Onze ans plus tard, ce sera le Code Napoléon. Cambacérès, grand juriste sous l’Ancien Régime, sera toujours là, président du Sénat et du Conseil d’État, bientôt archichancelier de l’Empire. « La France [qui] a été gouvernée par des coutumes, souvent par des caprices, et jamais par des lois » (selon Mme de Staël) réalise en quelques années le vieux rêve d’unification juridique de la monarchie.
« Par devant l’Europe, la France, sachez-le, n’aura jamais qu’un seul nom, inexpiable, qui est son vrai nom éternel : la Révolution. »1632
Jules MICHELET (1798-1874), Le Peuple (1846)
Jugement à nuancer, ou plutôt à préciser : pour cet historien de gauche, la Révolution de 1789 devrait finir en 1790, sur le Champ de Mars, en son point culminant, le jour de la Fête de la Fédération, 14 juillet (anniversaire de la prise de la Bastille). Mais la Terreur va suivre, avant d’être instituée par décret en 1793. Jusqu’au coup d’État du 9 thermidor (27 juillet 1794).
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