« J’aime passionnément le mystère, parce que j’ai toujours l’espoir de le débrouiller. »
Charles BAUDELAIRE (1821-1867). Le Spleen de Paris (recueil posthume de poèmes en prose, 1869)
Les mystères ont défrayé la chronique en leur temps, nourris par la rumeur - bien avant la presse, les réseaux sociaux et toutes les « autoroutes de la désinformation » !
Petits et grands mystères alternent, souvent associés à des Affaires majuscules - des Templiers à l’Affaire Dreyfus. Tant de fois commentées, souvent fascinantes, elles sont un vivant reflet de leur époque, mais aussi de « l’âme humaine » qui ne varie guère.
Certains mystères sont aujourd’hui résolus – l’épidémie de peste noire, le Collier de la Reine, l’Affaire du Rainbow warrior. D’autres demeurent – l’assassinat d’Henri IV, l’énigme du Masque de fer et l’Affaire des poisons au siècle de Louis XIV, l’affaire du petit Grégory de nos jours.
Quelques personnages restent à jamais (et volontairement) mystérieux - du roi Philippe le Bel à François Mitterrand, en passant par le marquis de Sade… et de Gaulle : « La grandeur a besoin de mystère. On admire mal ce qu’on connaît bien. » Quant à Molière, objet des pires fake-news de son temps, sa vie comporte toujours certains mystères.
De nos jours, les « affaires » se multiplient, le journalisme d’investigation devient un genre prospère et les procès font la une des médias. Faut-il y voir un progrès dans la justice, la « transparence » et la démocratie, ou une dérive sociétale dangereuse ?
Revivez toute l’Histoire en citations dans nos Chroniques, livres électroniques qui racontent l’histoire de France de la Gaule à nos jours, en 3 500 citations numérotées, sourcées, replacées dans leur contexte, et signées par près de 1 200 auteurs.
Alain Juppé mis en cause en 1998 et condamné en 2004 : le meilleur d’entre tous dans la chiraquie a-t-il payé pour tous les autres ?
« Un Premier ministre, on le lèche, on le lâche, on le lynche ! »3383
Alain JUPPÉ (né en 1945). La Malédiction Matignon (2006), Bruno Dive, Françoise Fressoz
Il a vécu un court état de grâce, devenu Premier ministre (1995-1997) et maire de Bordeaux.
Reconnu par Chirac comme « le meilleur d’entre les hommes de droite », il se rend vite impopulaire, par le projet de réforme des retraites (oui, déjà !), le gel des salaires des fonctionnaires, la déroute des Jupettes (huit femmes débarquées du gouvernement après quelques mois d’exercice) et cette raideur de l’homme qui se dit lui-même « droit dans ses bottes. » Mais le pire est à venir.
En 1998, il est mis en examen pour « abus de confiance, recel d’abus de biens sociaux et prise illégale d’intérêt » – pour des faits commis en tant que secrétaire général du RPR et maire adjoint de Paris aux finances, de 1983 à 1995.
Le 30 janvier 2004, le tribunal correctionnel de Nanterre le condamne lourdement : dix-huit mois de prison avec sursis dans l’affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris et dix ans d’inéligibilité !
L’appel interjeté suspend l’application de la peine, jusqu’à l’arrêt de la cour d’appel. Le 1er décembre 2004, condamnation réduite à quatorze mois de prison avec sursis et un an d’inéligibilité. Juppé vit une traversée du désert qui passe par le Canada.
« En politique, si on meurt souvent, on ne renaît pas toujours. Juppé si ! »
Franz-Olivier GIESBERT (né en 1949 ), Le mystère Alain Juppé, France 3, 3 octobre 2016
Portrait intimiste de celui qui « revient de loin, très loin ». Comment cet homme « coincé et solitaire » a-t-il pu reconquérir le cœur des Français ? C’est ce « mystère Juppé » qu’il tente de percer dans un documentaire qui ne cache rien des aspérités du personnage et de ses avanies politiques et judiciaires, mais laisse transparaître une admiration pour la bête politique.
Les jugements qu’il porte sur ses rivaux dans le film sont impitoyables. Fillon ? Indécis. Bruno Le Maire ? Pas moderne. Sarkozy ? Simpliste. Quant à Juppé, homme orgueilleux, aux goûts classiques, toujours « droit dans ses bottes », il peut aussi se laisser submerger par l’émotion, être drôle, se déclarer amoureux et désirant plus que tout être aimé par les Français.
Candidat à la présidentielle, il n’est pas pour autant prêt à faire des concessions. À un journaliste qui lui demande si on ne risque pas de s’ennuyer avec lui, il répond l’air pincé : « Après tout, on ne demande pas aux Français de partir sur une île déserte avec moi, mais d’élire quelqu’un pour diriger la France. »
Longtemps donné favori à l’élection présidentielle de 2017, il perd la primaire de la droite et du centre de 2016 face à François Fillon… qui perdra à son tour, mis en examen dans le cadre de l’enquête sur les soupçons d’emplois fictifs de son épouse et de deux de ses enfants. Échec humiliant et mystérieux sur divers points, Emmanuel Macron profitant de cette affaire pour devenir président.
En 2019, nommé membre du Conseil constitutionnel, Alain Juppé quitte la mairie de Bordeaux.
Les affaires de Chirac s’accumulent et font « Pschitt » en 2001 : une condamnation en 2011… et une dizaine de dossiers pour le moins « abracadabrantesques », confus ou énigmatiques dont la presse est l’écho.
« Je suis indigné par le procédé, indigné par le mensonge, indigné par l’outrance… Il doit y avoir des limites à la calomnie […] Aujourd’hui on rapporte une histoire abracadabrantesque. »1
Jacques CHIRAC (1932-2019), interviewé par Élise Lucet en direct d’Angoulême (Charente), 21 septembre 2000
Le président de la République évoque l’affaire du financement occulte du RPR révélé par Jean-Claude Méry dans une « mystérieuse cassette-vidéo » qui l’accuse du temps où il était maire de Paris…
« Je suis indigné par le procédé, indigné par le mensonge, indigné par l’outrance… Il doit y avoir des limites à la calomnie… Hier, on faisait circuler une rumeur fantaisiste sur une grave maladie qui m’aurait atteinte - sous-entendu, je ne serais plus capable d’assumer mes fonctions. Aujourd’hui, on rapporte une histoire abracadabrantesque… On fait parler un homme qui est mort il y a plus d’un an, on disserte sur des faits invraisemblables, on exhume un enregistrement fait il y a plus de quatre ans dont les propos sont invérifiables et sans valeur juridique… Tout cela avant un référendum visant à améliorer le fonctionnement de la démocratie… Ces allégations sont indignes et mensongères… Je demande que ces éléments soient transmis à la justice afin que la vérité balaye la calomnie. »
Emplois fictifs, faux électeurs, HLM de la Ville de Paris, frais de bouche, voyages… Jacques Chirac est le premier président français à être condamné par la justice en 2011, dans l’affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris. Mais son nom fut mêlé à plusieurs scandales pour lesquels il n’a pas été condamné.
Reste ce néologisme plus vieux qu’il n’y paraît, cet abracadabrantesque qui fit couler beaucoup parler à l’époque. On le doit à l’enfant terrible de la poésie, Arthur Rimbaud dans Le Cœur supplicié : « Ô flots abracadabrantesques, Prenez mon cœur, qu’il soit lavé. » Et c’est Dominique de Villepin, admirateur de Rimbaud et alors secrétaire général, qui souffla le mot à l’oreille de Jacques Chirac…
Toujours empêtré dans la cohabitation, voilà le président rattrapé par les « affaires ». Dans tout autre pays démocratique, et d’abord aux États-Unis, ce genre d’esquive n’aurait pas suffi.
« Pschitt. »3362
Jacques CHIRAC (1932-2019), une onomatopée, dans la traditionnelle interview du 14 juillet 2001
Le mot le plus court de l’histoire (avec le « Merde » de Cambronne aux Anglais, peut-être apocryphe).
Face à la presse, le président s’explique sur les accusations portées contre lui quelques jours plus tôt, à propos de billets d’avion payés en liquide : « Ces polémiques sur les voyages présidentiels se dégonflent et font pschitt. »
Mis en cause dans de nombreuses affaires judiciaires pendant sa carrière, il a bénéficié de son immunité présidentielle mais reste, après son départ de l’Élysée, poursuivi dans l’affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris, pour laquelle il est condamné à deux ans d’emprisonnement avec sursis en 2011, ce qui fait de lui le premier chef de l’État français à être condamné en justice. Malade, il effectue sa dernière apparition publique en 2014.
Au total, depuis les années 1990, le nom de Jacques Chirac est régulièrement évoqué dans huit affaires judiciaires. En 2007, les choses changent : il quitte l’Élysée et redevient un citoyen ordinaire. La machine judiciaire se remet en marche. En 2011, il est renvoyé devant un tribunal pour détournement de fonds publics et abus de confiance dans l’affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris.
Procès d’Outreau : affaire de pédophilie, histoires d’enfants, scandale judiciaire et « Tchernobyl judiciaire » en 2004.
« Quand on paye 15 euros des expertises au tarif d’une femme de ménage, on a des expertises de femme de ménage. »3381
Jean-Luc VIAUX (né en 1949), procès d’Outreau, mai-juillet 2004. Outreau et après ? : La justice bousculée par la Commission d’enquête (2006), Florence Samson
Parole d’expert, au sortir d’une audience où il a été mis en cause pour ses expertises. Cette phrase, détachée de son contexte, exploitée par la presse, poursuivra Jean-Luc Viaux qui défendra ensuite son travail, tenant à rappeler que 4 personnes seront condamnées définitivement en juillet 2004, et 12 enfants reconnus victimes - dont ceux des condamnés. Il précisera qu’une expertise psychologique n’est pas une preuve : elle sert « à fournir une intelligibilité, pas à fabriquer une vérité judiciaire. » (Libération, 8 mars 2006). La cour d’appel de Rouen jugera finalement que ni cette phrase, ni son travail lors de ce procès, n’étaient critiquables.
Dans cette longue mésaventure judiciaire, faut-il invoquer la grande misère de la justice en France, maintes fois dénoncée par les magistrats, ou reconnaître l’erreur toujours possible, dans les rapports des experts en psychiatrie, toxicologie, graphologie, balistique ? La pédophilie reste un sujet extrêmement sensible, et l’affaire d’Outreau (commune du Pas-de-Calais, lieu des faits présumés) aura défrayé la chronique durant six ans.
Tout commence en février 2001, avec l’arrestation et l’incarcération de 17 personnes accusées d’abus sexuel sur mineurs, dont certains parents. L’instruction, confiée au juge Fabrice Burgaud, dure deux ans. Deux procès en cour d’assises, première instance en 2004 à Saint-Omer, puis appel en 2005 à Paris, aboutissent à l’acquittement de 13 prévenus : ce sont les « acquittés d’Outreau ».
En janvier 2006, une commission d’enquête auditionne les 13 acquittés. : vies brisées, familles éclatées, dysfonctionnements à tous les niveaux. On parle alors de « Tchernobyl judiciaire » ! C’est la plus grave bavure judiciaire depuis un demi-siècle. 18 habitants d’Outreau, petite ville du Pas-de-Calais, mis au cœur d’un vaste réseau de pédocriminalité. Aux manettes de ces mises en examen à répétition, Myriam Badaoui, mère incestueuse dont la surenchère affabulatrice aura raison du jeune juge Burgaud qui, mis sous les feux des projecteurs, s’y brûla les ailes.
Dix ans après, troisième et dernier épisode de l’affaire.
« Ce procès est l’occasion de tordre le cou à tous ces vilains personnages qui distillent le venin de la culpabilité. »
Hubert DELARUE, avocat. Pourquoi la vérité judiciaire d’Outreau est mise en doute. 18 mai 2015, France info
Avocat pénaliste du barreau d’Amiens, on le trouve pendant près de 40 ans au cœur de toutes les grandes affaires judiciaires françaises, dont la plus célèbre demeure le naufrage judiciaire d’Outreau. Il représentait l’huissier Alain Marécaux et se retrouve à nouveau sur les bancs de la défense à Rennes, en mai 2015.
Le revirement de Myriam Badaoui, qui avait innocenté treize des adultes accusés au cours de l’audience, avait achevé de mettre en doute les déclarations des enfants victimes dont la parole avait été jugée crédible, voire sacralisée, par la justice et les experts.
« Le meilleur moyen de vider un dossier judiciaire, c’est encore devant la justice, avec le débat contradictoire. »
France info. « Pourquoi la vérité judiciaire d’Outreau est mise en doute », 18 mai 2015. Parole d’un magistrat extérieur à l’affaire.
Cet argument semble réconcilier parties civiles, défense et accusation : un troisième acte peut être l’occasion de solder les comptes, d’en finir avec le dossier Outreau et le poison du doute qui l’habite depuis une décennie.
Depuis l’acquittement de 13 accusés en 2004 puis 2005, des voix s’élèvent pour contester la décision des deux cours d’assises et plaider la cause des 12 enfants reconnus victimes dans ce dossier. Mais personne ne s’en souvient : à l’inverse des acquittés, ils n’avaient ni nom, ni visage. Pour les protéger, ils n’avaient pas été révélés dans les médias. « Douze mineur(e)s ont été totalement évacué(e)s du champ médiatique. Disparues, ces victimes ! Pendant dix ans, elles ont été diffamées, accusées de mensonges, sans pouvoir répondre puisqu’elles n’étaient pas majeures », écrit le journaliste Serge Garde, coauteur d’un livre avec Chérif Delay, l’une des douze victimes, sorti de l’anonymat en 2011.
« Dans ce dossier, on a assisté à un retournement complet, un mouvement de balancier frénétique », observe Marc Pantaloni, l’un des deux avocats représentant les enfants au procès en appel à Paris. « L’excès engendre l’excès » concède Hugues Vigier, qui défend dix ans après Daniel Legrand fils, redevenu un accusé pour les mêmes faits de viol !
« Moi et mon père, on est innocents, je le dis avec force, courage et dignité. »
Daniel LEGRAND, troisième procès devant la la cour d’Assises de Rennes, mai 2015
Déclaration d’un des ex-acquittés de l’affaire d’Outreau, au dernier jour de son procès dans le dernier volet de ce dossier de pédophilie, juste avant que la cour ne se retire pour délibérer…
Son père est mort d’un cancer… Lui-même sera définitivement acquitté eu égard à son « calvaire judiciaire » et quels que soient les faits qui lui sont reprochés, sans relation avec l’affaire d’Outreau. Dernier constat sur l’immense gâchis humain.
Affaire Clearstream, 2004-2010 : la plus sombre des machinations politiques dans la guerre des droites, duel fratricide et règlement de comptes.
« Un jour, je finirai par retrouver le salopard qui a monté cette affaire et il finira sur un croc de boucher. »3398
Nicolas SARKOZY (né en 1955), ministre de l’Intérieur, citation authentifiée après coup par « le salopard » visé, Dominique de Villepin. La Tragédie du Président (2006), Franz-Olivier Giesbert
Dans la série « duels fratricides », voici la séquence Villepin-Sarkozy et l’affaire Clearstream - société bancaire, fournisseur d’infrastructures de marché financier offrant une grande variété de services en plus des services de chambre de compensation dans le monde entier.
C’est une obscure histoire de corbeaux et de manipulations, feuilleton financier, politique et judiciaire qui commence en 2004 et trouve son épilogue juridique en 2010.
Un petit groupe de politiciens et d’industriels tente de manipuler la justice pour évincer des concurrents, en les impliquant dans le « scandale des frégates de Taïwan ». Ils auraient touché des commissions sur la vente de ces navires de guerre et l’argent se trouverait sur des comptes occultes.
Parmi les dizaines de noms cités, on trouve Sarkozy alors ministre de l’Économie, mais aussi Chevènement, Strauss-Kahn, Madelin. La presse s’en fait aussitôt l’écho. « Une affaire d’État qui fait trembler toute la classe politique » titre Le Point, 8 juillet 2004.
« Un jour, des noms d’industriels et d’hommes politiques français apparaissent sur des fichiers d’un organisme financier luxembourgeois : Clearstream. Il s’agit d’une « fabrication ». Qui y a procédé et pour quels motifs ? »
Pascal CÉAUX, Le Monde, 5 mai 2006
La presse dévoile l’existence d’un rapport de la DST (Direction de la surveillance du territoire au ministère de l’Intérieur) sur l’affaire et ces listings clairement falsifiés.
Une fausse rumeur peut toujours nuire et Sarkozy accuse Villepin de dissimuler à la justice les conclusions de l’enquête qui l’innocenterait. Il se constitue partie civile. Villepin sera mis en examen le 27 juillet 2007 pour « complicité de dénonciation calomnieuse, recel de vol et d’abus de confiance, complicité d’usage de faux ».
Certains « experts de la chose judiciaire » ne sont pas dupes…
« Cette affaire Clearstream a été montée de toutes pièces, elle est destinée à cacher l’affaire des frégates de Taïwan. Il y a 500 millions de dollars qui sont partis, il y a des morts dans ce dossier. Mais on nous ressort toujours Clearstream, avec une surmédiatisation qui a été encouragée par Nicolas Sarkozy. »
Renaud VAN RUYMBEKE (1952-2024) sur France Info, le 1er février 2007
Juge d’instruction très engagé dans la lutte contre la corruption à grande échelle, il a conduit les enquêtes politico-financières dans trois dossiers brûlants : l’affaire Urba, l’affaire des frégates de Taïwan et l’affaire Clearstream. Il ajoute à ce propos : « On m’a mis au pilori. »
Autre « victime collatérale », Denis Robert, spécialiste du journalisme d’enquête, poursuivi par Clearstream. Jusqu’à ce que le 3 février 2011, la cour de cassation annule les condamnations précédentes et juge l’enquête du journaliste « sérieuse et documentée ». Sa quête de vérité rejoint celle du juge Renaud Van Ruymbeke, très engagé contre la corruption.
« L’Affaire des affaires », ce long combat, dans les bas-fonds des paradis fiscaux, authentique thriller résumé en quatre tomes de documents, inspirera le film de Vincent Garenq, L’Enquête (2014) avec Gilles Lelouch et Charles Berling. Ce suspense qui eut pour titre provisoire « La Justice ou le Chaos » raconte les méandres de l’affaire et met en scène le journaliste Denis Robert, résistant aux intimidations. Il fait partie de ces films français et américains plébiscitant les « personnages de journalistes défendant les principes démocratiques et la transparence ».
En attendant, la réalité s’impose… et le premier suspect réagit publiquement.
« Nicolas Sarkozy avait promis de me pendre à un croc de boucher, je vois que la promesse a été tenue. »
Dominique de VILLEPIN (né en 1953), La Dépêche, 21 octobre 2009
Le 23 septembre 2009, le président Sarkozy qualifie un peu vite de « coupables » les prévenus au procès Clearstream.
L’ancien Premier ministre et ami proche de Chirac, Dominique de Villepin, apprend que 18 mois de prison avec sursis ont été requis au procès Clearstream contre lui, comme « complice » de dénonciation calomnieuse.
« Je veux croire que le procureur a exprimé aujourd’hui devant le tribunal son intime conviction, il n’a pas dit la réalité des faits, je ne crois pas non plus qu’il ait dit la vérité du droit » a-t-il ajouté devant la presse à l’issue de l’audience.
Mais trois mois après, le 28 janvier 2010, le tribunal correctionnel de Paris rend son jugement : Dominique de Villepin est relaxé. Jean-Louis Gergorin, considéré comme le « cerveau » de l’affaire, est condamné à quinze mois de prison ferme et Imad Lahoud, auteur des lettres anonymes, à dix-huit mois.
Affaire Strauss-Kahn, un fait divers mondial en 2011, quelques années avant Me Too : théorie du complot vite abandonnée, mais épilogue politique et juridique à méditer.
« L’argent, les femmes, ma judéité. »3452
Dominique Strauss-Kahn (né en 1949), propos d’avril 2011. Édition française du Jerusalem Post, 19 mai 2011
Certains soutiens de DSK émettent sérieusement l’hypothèse d’un complot ou d’un piège dans l’affaire du Sofitel de New York – il semble que le mystère est définitivement levé.
Mais Strauss-Kahn lui-même, devant un journaliste de Libération, avait énoncé les trois points faibles pouvant lui porter préjudice dans la course à la présidence, peu avant que l’affaire éclate, le 14 mai 2011.
C’est d’abord une affaire judiciaire de droit commun : il est accusé pour agression sexuelle, tentative de viol et séquestration. Nafissatou Diallo, employée comme femme de chambre depuis trois ans, affirme qu’il a commis ces actes, dans une suite de l’hôtel Sofitel de New York.
Compte tenu de la gravité des faits, la juridiction de l’État de New York procède à la mise en détention provisoire de Dominique Strauss-Kahn et engage une procédure pénale. Il nie les accusations et fait savoir qu’il plaidera « non coupable ».
« Un troussage de domestique. »3453
Jean-François Kahn (né en 1938), commentant l’affaire DSK, France Culture, 16 mai 2011
« Je suis pratiquement certain qu’il n’y a pas eu tentative violente de viol, je ne crois pas, ça, je connais le personnage, je ne le pense pas. Qu’il y ait eu une imprudence, on peut pas le… (petit rire), j’sais pas comment dire, un troussage de domestique. »
Dans cette histoire, on perd un bon journaliste : JFK reconnaît que cette formule était « une connerie » et va renoncer à ce métier qu’il a brillamment exercé, notamment à la tête de Marianne. On perd aussi DSK, un homme politique déconsidéré par le scandale devenu mondial, avec les médias qui s’en emparent avidement et le public qui en redemande : vision de l’homme réputé le plus puissant du monde, menotté comme un vulgaire malfaiteur, ou traité comme un dangereux criminel… Dix ans après l’effondrement des Twin Towers, la réalité dépasse encore les fictions hollywoodiennes.
Et le Parti socialiste français est fort embarrassé : à un an des présidentielles, il perd son candidat préféré, celui qui avait le plus de chance de passer en mai 2012.
« Ayant fait des excuses au Fonds monétaire international, qui était son ancien emploi, son ancienne maison, il aurait dû également les faire à l’égard des socialistes et des électeurs de toute la gauche. »3454
Arnaud Montebourg (né en 1962), candidat à la primaire du Parti socialiste pour l’élection présidentielle, déclaration sur i > télé, avant le retour en France de DSK, 31 août 2011
La classe politique est gênée, surtout qu’on était plus ou moins au courant – mais qui, on ? et plus ou moins ? et de quoi au juste !?
Martine Aubry est la plus embarrassée par son ancien allié – elle a conclu un pacte, si l’un se présente, l’autre se retire. Revenant sur la présomption d’innocence dans cette affaire, elle ajoutera quand même sur Canal Plus, fin août : « Je pense la même chose que beaucoup de femmes sur l’attitude de Dominique Strauss-Kahn vis-à-vis des femmes. » Parole de femme.
Michel Rocard, ex-Premier ministre socialiste, a déjà déclaré au Grand Journal de Canal Plus : « Cet homme a visiblement une maladie mentale… des difficultés à maîtriser ses pulsions. C’est dommage, il avait un vrai talent. »
Quelques indulgences masculines se manifestent. Bernard-Henri Lévy, doutant du témoignage de la victime présumée, défend l’homme : « Le Strauss-Kahn dont je suis l’ami depuis vingt-cinq ans et dont je resterai l’ami, ne ressemble pas au monstre, à la bête insatiable et maléfique, à l’homme des cavernes, que l’on nous décrit désormais un peu partout : séducteur, sûrement ; charmeur, ami des femmes et, d’abord, de la sienne, naturellement ; mais ce personnage brutal et violent, cet animal sauvage, ce primate, bien évidemment non, c’est absurde. »
Quant à Jack Lang, très solidaire, et agrégé de droit public : « Quand on connaît un tout petit peu le système américain… alors qu’il n’y a pas mort d’homme, ne pas libérer quelqu’un qui verse une caution importante, ça ne se fait pratiquement jamais. »
« Nous avons eu droit à un florilège de remarques sexistes, du « il n’y a pas mort d’homme » au « troussage de domestique » en passant par « c’est un tort d’aimer les femmes ? » Nous sommes en colère, révoltées et révoltés, indignées et indignés. »3455
Pétition contre le sexisme, lancée par : Paroles de femmes, Osez le féminisme et la Barbe, 25 000 signatures, 21 mai 2011
Au-delà du cas DSK, ce fait divers renvoie à un fait de société : « Ces propos prouvent à quel point la réalité des violences faites aux femmes est méconnue. De la part d’élites qui prétendent diriger notre société, c’est particulièrement inquiétant. 75 000 femmes sont violées chaque année dans notre pays, de toutes catégories sociales, de tous âges. Leur seul point commun est d’être des femmes. Le seul point commun des agresseurs, c’est d’être des hommes. »
Le féminisme a remporté ses grandes victoires au XXe siècle, du droit de vote des femmes à l’IVG, en passant par une réforme du Code civil établissant l’égalité juridique (le Code napoléonien était misogyne). Le féminisme se manifeste régulièrement, à l’occasion d’une injustice, un fait divers, une publicité choquante. Voir les « Chiennes de garde , toujours vigilantes.
Restent tous les pays, toutes les religions où la femme demeure aliénée, moralement, socialement, juridiquement, physiquement. Si la voix des femmes a soutenu le Printemps arabe, la réciproque n’est pas évidente.
« C’est un homme ; il est riche, puissant et connu, face à une femme faible, pauvre et inconnue : il a perdu ! »3456
Éva Joly (née en 1943), Le Point, 16 juin 2011
Témoignage de femme, et parole de magistrate. En prime, elle connaît l’homme : elle l’a mis en examen, onze ans plus tôt, dans l’affaire Elf.
Blanchi au pénal à New York, ce qui va perdre DSK, c’est la suite, d’autres affaires de mœurs, d’autres témoignages et une certaine lassitude, voire un rejet d’une opinion publique qui attendait tant de lui, de ses compétences économiques et politiques. Bref, un immense gâchis.
Il faut quand même évoquer la dernière affaire, celle du Carlton de Lille, très différente quant au fond.
« La justice se rend avec le Code pénal, pas avec le code moral. Le premier a enfanté un monstre médiatique, le second a révélé un néant juridique. »
Me Henri LECLERC (1934-2024), « Carlton de Lille : DSK relaxé, l’instruction condamnée », Le Monde, 13 juin 2015
Les infractions « reprochées à Dominique Strauss-Kahn », mis en examen lundi à Lille pour proxénétisme aggravé en bande organisée, sont « inexistantes… il n’y a pas d’éléments à charge » contre lui, a déclaré le plus connu de ses avocats, Me Henri Leclerc. « Ce dossier est creux, vide, surfait », affirme-t-il lors d’une conférence de presse, ajoutant : « Chacun sait que, dans l’affaire du Carlton, Dominique Strauss-Kahn n’y est pour rien. »
Ce dernier dossier pour lequel DSK a été mis en examen par trois juges de Lille « s’effondre immédiatement » s’il est soumis à un débat contradictoire, a martelé Me Leclerc. Il y avait consentement entre adultes. Parole d’avocat. Il parle quand même d’une « sexualité hors norme ». Mais il ajoute ces mots qui valent conclusion : « La justice se rend avec le Code pénal, pas avec le code moral
2012. Affaire Montagnier : un lent naufrage scientifique pour le codécouvreur du VIH (sida) et un mystère humain nommé la « maladie du Nobel ».
« L’importance de leurs travaux doit être considérée dans le contexte de l’épidémie omniprésente dans le monde et qui affecte près de 1 % de la population. »6
Comité Nobel, 6 octobre 2008. Prix Nobel de médecine décerné aux professeurs Françoise Barré-Sinoussi et Luc Montagnier pour l’identification en 1983 à l’Institut Pasteur du rétrovirus responsable du sida
« Le succès de la thérapie rétrovirale a permis d’augmenter l’espérance de vie des personnes affectées par le VIH, espérance aujourd’hui semblable à celle des personnes saines. »
Quatre ans après la reconnaissance scientifique et médiatique, véritable coup de théâtre dans le milieu scientifique et bien au-delà.
« France, Paris. Le professeur Luc Montagnier, prix Nobel de médecine, a défendu les recherches sur « la piste microbienne » de l’autisme devant l’Académie de médecine, en soutenant que les antibiotiques permettraient d’améliorer un grand nombre d’enfants atteints. »
Dépêche AFP, 21 mars 2012
Branle-bas de combat dans la presse écrite et audiovisuelle. Un Nobel s’exprime au début du printemps 2012 et fait sensation… avant d’être désavoué par ses pairs, pour ce qui pourrait être qualifié de fake-news pseudo-scientifiques.
Premier exemple : « On compte chaque année en France 5 000 nouveaux cas d’autisme ou de troubles apparentés » a-t-il dit, notant le caractère « multifactoriel » de ce syndrome des troubles de la communication. C’est « une véritable épidémie » que les facteurs de prédisposition génétique ne peuvent à eux seuls expliquer. Il est donc « logique de s’intéresser à des facteurs environnementaux nouveaux ». En particulier aux pesticides, a-t-il poursuivi, en évoquant aussi une exposition accrue aux « radiations électromagnétiques non ionisantes ».
Facteurs environnementaux et génétiques participeraient à un phénomène de « stress oxydatif » susceptible de provoquer des « modifications neuronales et un dysfonctionnement immunitaire ». Les enfants autistes souffriraient ainsi d’infections chroniques. Le Pr Montagnier a fait état de « 55% d’amélioration rapide » obtenus avec des cures d’antibiotiques sur 97 autistes, en notant que « les enfants réagissent beaucoup mieux avant l’âge de sept ans ».
À la fin des années 2000, Luc Montagnier multiplie ainsi les prises de position sans rapport avec son domaine de connaissances et dépourvues de tout fondement scientifique. La liste fait penser à un inventaire à la Prévert :
- théorie de la « mémoire de l’eau » (de Jacques Benveniste prouvant l’efficacité de l’homéopathie, discrédité en 1993) ;
- théorie de la téléportation de l’ADN pouvant imprimer une empreinte électromagnétique aux molécules d’eau ;
- papaye fermentée recommandée comme remède à la maladie de Parkinson auprès du pape Jean-Paul II ;
- guérison du SIDA par le biais de la diététique…
Plus grave, il prend position contre les vaccins en nourrissant le complotisme ambiant, d’où la condamnation cinglante et officielle de 106 membres des Académies des sciences et de médecine en novembre 2017.
Durant la pandémie de Covid-19, il affirme que le virus SARS-CoV-2 a été manipulé en laboratoire avec l’ajout de « séquences, notamment, du VIH » … et que les vaccins sont responsables de l’apparition des variants.
Quant au (banal) stress oxydant inhérent à toute activité physique comme à l’absorption de médicaments, il fait l’objet d’un tel délire… que le Net a censuré toutes ses causes et ses conséquences revues par Luc Montagnier : Au cœur des maladies chroniques (texte déréférencé). Reste Les Combats de la vie. Mieux que guérir, prévenir (2009).
« Nous sommes dramatiquement revenus à la médecine du XVIIe siècle. »
Déclaration anonyme d’un membre de l’Académie de médecine au sortir de la séance du mardi 20 mars 2012. Cité dans la Revue Médicale Suisse, 4 avril 2012, article signé Jean-Yves Nau
Le Professeur Montagnier a voulu tenir une « conférence » pour résumer le résultat de ses derniers travaux. Pourquoi tant d’émotion ? L’affaire a été bien résumée par une dépêche mandée dans la soirée du même jour par l’Agence France-Presse. La voici :
« France, Paris. Le professeur Luc Montagnier, prix Nobel de médecine, a défendu les recherches sur « la piste microbienne » de l’autisme devant l’Académie de médecine, en soutenant que les antibiotiques permettraient d’améliorer un grand nombre d’enfants atteints. (…) « On compte chaque année en France 5 000 nouveaux cas d’autisme ou de troubles apparentés », a-t-il dit, notant le caractère « multifactoriel » de ce syndrome des troubles de la communication. C’est « une véritable épidémie » que les facteurs de prédisposition génétique ne peuvent à eux seuls expliquer. Il est donc « logique de s’intéresser à des facteurs environnementaux nouveaux ». En particulier aux pesticides, a-t-il poursuivi, en évoquant aussi une exposition accrue aux « radiations électromagnétiques non ionisantes ».
Circonstance sinon atténuante, du moins explication à ce comportement, la « maladie du Nobel » qui existe bel et bien ! Elle s’explique facilement.
« Si quelqu’un remporte le prix Nobel, il est immédiatement bousculé par toutes sortes de personnes qui lui posent toutes sortes de questions sur toutes sortes de sujets dont il ne sait rien. Il est très difficile de résister à la tentation de répondre – de donner n’importe quelle vieille réponse sur des sujets dont on ne sait rien. »
Hubert CURIEN (1924-2005), scientifique, ministre de la Recherche et de la Technologie, Conférence du 25 novembre 1991
« Nous avons vu des collègues qui ont remporté un prix Nobel dire des bêtises sur telle ou telle question politique, sur laquelle ils n’ont vraiment aucune connaissance. » Mais le Professeur Montagnier reste à ce jour l’un des plus célèbres « modèles » du genre.
Sarkozy, promoteur de la « République irréprochable » et toujours impliqué dans cinq affaires relatives à son quinquennat (2007-2012) : « Personne n’y comprend rien », film de Mediapart, janvier 2025.
« Je veux une République irréprochable. »3417
Nicolas Sarkozy (né en 1955), Meeting à Meaux, 13 avril 2007
La formule reste dans les mémoires, déjà prononcée au congrès de l’UMP en janvier, reprise à Épinal, déclinée en diverses versions : « Je veux être le Président qui va remettre la morale au cœur de la politique » ; « Je veux une démocratie irréprochable »… « Une République exemplaire, caractérisée notamment par des nominations irréprochables » ; « Si l’État veut être respecté, il doit être respectable. Je ne transigerai pas. »
Après les années Mitterrand et les années Chirac, riches en « affaires » plus ou moins chargées de mystères et autres zones d’ombre, le quinquennat sera loin d’être irréprochable ! Et le président est assurément responsable, sinon coupable – en attendant que la justice tranche.
Cinq ministres devront démissionner, dont Michèle Alliot-Marie et Éric Woerth. Deux ex-ministres ont maille à partir avec la Cour de justice de la République : Éric Woerth, pour la vente de l’hippodrome de Compiègne, Christine Lagarde pour l’affaire Adidas-Tapie.
Les proches du président sont mis en examen, sur fond de mallettes, ventes d’armes et financement politique : Nicolas Bazire, Thierry Gaubert, Éric Woerth (encore lui) pour « trafic d’influence passif et recel »… Face aux soupçons de népotisme, Jean Sarkozy, 23 ans, renonce à diriger l’EPAD (Établissement public pour l’aménagement de la défense), seule erreur reconnue par son père. Reste l’affaire Woerth-Bettencourt, la plus gênante, même si le président nie tout, et d’abord le financement illégal de sa campagne par la milliardaire. La justice est-elle vraiment indépendante et libre d’enquêter ?
« Près de trois Français sur quatre (72%) estiment que d’une manière générale les élus et les dirigeants politiques sont « plutôt corrompus », contre 19% qui pensent qu’ils sont « plutôt honnêtes » »
Sondage TNS Sofres, Le Point, 28 septembre 201
Cela conforte le fameux « tous pourris », dénoncé par les populistes de gauche et surtout de droite (Le Pen, père et fille).
Seul progrès, le contrôle public sur les comptes et la gestion des services de la Présidence : « Ni Mitterrand, ni Chirac n’avaient osé donner cette autorisation. Je suis le premier président à jouer la transparence. Vous croyez que ça m’amuse d’être contrôlé tous les ans, vous croyez que ça m’amuse de supporter les contrôleurs de la Cour des comptes, y compris chez moi, au Cap Nègre ? Au moins, on sera nickel pour 2012. » (Le Canard enchaîné, 22 juillet 2009)
« Personne n’y comprend rien »
Film de Mediapart, janvier 2025
« Une démocratie et une dictature. Une campagne présidentielle et de l’argent noir. Une guerre et des morts. ‘Personne n’y comprend rien’ se rassure Nicolas Sarkozy au sujet de ses liens avec le colonel Kadhafi. Alors que s’ouvre le procès de l’affaire des financements libyens, voici le film qui va enfin vous permettre de tout comprendre à l’un des scandales les plus retentissants de la Cinquième République. »
L’affaire du financement libyen de la campagne présidentielle est en cours d’instruction. Une fiche Wikipédia en donne un bon résumé de cette affaire Sarkozy-Kadhafi.
Restent les autres affaires où Nicolas Sarkozy est impliqué après son quinquennat (2007-2012) : écoutes téléphoniques (il est condamné après rejet du pourvoi en Cassation), affaire Bygmalion (affaire politico-financière des comptes de campagne de 2012), affaire Ziad Takieddine et sa rétractation (en relation avec l’affaire du financement libyen), affaire des sondages de l’Élysée (condamnation de ses anciens conseillers, Claude Guéant et Patrick Buisson)…
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