François d'Aubert : « La cohabitation, c'est le jardin des supplices... » | L’Histoire en citations
François d'Aubert : « La cohabitation, c'est le jardin des supplices... »
Citation du jour

citations histoire La cohabitation au sommet de l’État : une originalité constitutionnelle qui a quelque peu étonné le monde, prouvé la souplesse des institutions de la Cinquième République et enchanté les Français qui se sentaient tous plus ou moins représentés dans ce pouvoir bicéphale. Coexistence plus ou moins pacifique d’un président de gauche (Mitterrand) et d’un gouvernement issu d’une Assemblée de droite. Et vice versa. Au total, trois cohabitations : 1986-1988, 1993-1995 et 1997-2002.

Feuilletez la Chronique sur la Ve République pour en savoir plus.

« La cohabitation, c’est le jardin des supplices pour le futur Premier ministre, le jardin des malices pour le président, le jardin des délices pour les nostalgiques de la Quatrième République. »3261

François d’AUBERT (né en 1943), député UDF de la nouvelle majorité

Dictionnaire des citations de l’histoire de France (1990), Michèle Ressi.

Les heurs et malheurs de Chirac Premier ministre commencent le 20 mars 1986. Édouard Balladur, élu député, proche de Chirac qu’il a poussé à cohabiter, avant d’éprouver lui-même les « supplices » d’une autre cohabitation, avait écrit dès 1983 : « Les responsables politiques auront le choix entre deux attitudes : ou bien rechercher l’affrontement, la majorité nouvelle tentant de paralyser le président, le président refusant de tenir compte dans la composition du gouvernement de l’existence d’une majorité nouvelle ; ou bien tenter la cohabitation, ce qui suppose que chacun accepte d’être quelque peu empêché dans la liberté de ses mouvements et de ses choix. »

« Contrairement à ce qui se passe dans les westerns, c’est le premier qui dégaine qui est mort. »3267

Édouard BALLADUR (né en 1929), parlant de la cohabitation Mitterrand-Chirac en 1986. Cité dans Le Nouvel Observateur, 7 janvier 1999, à propos d’une cohabitation inverse, entre Chirac (président) et Jospin (Premier ministre)

Contrairement à ce qui se passe dans les westerns, attaquer serait une stratégie suicidaire. Le Premier ministre, qui gouverne, est logiquement le plus exposé aux critiques et aux sondages. Mais les Français sont très satisfaits de la cohabitation, rêvant même (par sondages) d’un gouvernement idéal, dirigé par Michel Rocard et composé pour moitié de leaders PS et de RPR-UDF. C’est de la pure politique fiction. Pour l’heure, et dans la réalité, les deux cohabitants au sommet, Mitterrand et Chirac, doivent éviter de s’affronter ouvertement. Vu les tempéraments, les situations et les âges respectifs, le « supplice » vaut surtout pour Chirac.

« Une idée nouvelle se dégage : avec moi les Français ont aujourd’hui l’impression d’avoir gagné un arbitre. »3264

François MITTERRAND (1916-1996), Déclaration à Solutré, 18 mai 1986

Après deux mois de cohabitation, le stratège politique s’est trouvé un rôle à sa mesure et tient à le faire savoir au pays. Politique étrangère et Défense nationale mises à part – où la collaboration s’impose entre les deux têtes de l’exécutif –, le gouvernement gouverne comme le veut la Constitution et le président arbitre : « J’ai pour devoir d’intervenir chaque fois qu’une décision pourrait nuire à l’intérêt des Français, pourrait apparaître injuste, ou exclure du mouvement général une partie des Français. »

L’année suivante, alors que le président reçoit au fort de Brégançon, le 1er janvier, une délégation de cheminots grévistes et leur serre la main, Balladur, ministre de l’Économie, des Finances et de la Privatisation, ne peut s’empêcher de remarquer, avec toute la diplomatie qui le caractérise : « J’aimerais bien que dans sa fonction d’arbitre, il arrive au président de donner raison au gouvernement. »

« Détenir à la fois les clefs du pouvoir présidentiel et donc du long terme sans pour autant avoir la responsabilité de la gestion gouvernementale directe, tout en ayant un pied dans l’opposition par l’intermédiaire du PS, c’est vraisemblablement pour lui la forme la plus achevée du bonheur politique, celle qui, de toute évidence, convient le mieux à son mode de pensée. »3103

Serge JULY (né en 1942), Sofres, Opinion publique 1986, Revue française de science politique, volume XXXVI, n° 2 (1986)

Par ces lignes, le patron de Libération décrivait en 1985 cet équilibre instable que serait la cohabitation, héritage de la Constitution voulue par de Gaulle. Après les législatives ratées pour la gauche, voici une épreuve dont Mitterrand se tire mieux que son partenaire et Premier ministre, Jacques Chirac (mars 1986 à mai 1988). Au lieu de démissionner, comme ses proches le lui conseillent, il assume la situation. Le compromis, l’arrangement sont dans sa nature. La seconde fois, avec Édouard Balladur (mars 1993 à mai 1995), ce sera la « cohabitation de velours », plus consensuelle, vu la courtoisie du Premier ministre… qui y perd quand même ses chances à la présidentielle, d’où la victoire de Chirac.

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