Jules Ferry : « Devrons-nous acculer la politique française dans une impasse (...) les yeux fixés sur la ligne bleue des Vosges ? » | L’Histoire en citations
Chronique du jour

 

Troisième République

L’expansion coloniale de la France

L’empire colonial s’agrandit (Extrême-Orient, Afrique du Nord, Afrique noire, Madagascar), ce qui provoque des débats à l’Assemblée : faut-il poursuivre l’aventure coloniale, ou concentrer les forces disponibles pour préparer la revanche ? Jules Ferry, fervent partisan de la colonisation, est aussi le père des grandes lois scolaires, pour éclairer les têtes, comme le disait Victor Hugo qui s’éteint et entre au Panthéon.

Les commentaires sont allégés, les coupes signalées (…) Retrouvez l’intégralité dans nos Chroniques de l’Histoire en citations.

« Au nom d’un chauvinisme exalté, devrons-nous acculer la politique française dans une impasse et, les yeux fixés sur la ligne bleue des Vosges, laisser tout faire, tout s’engager, tout se résoudre sans nous, autour de nous, contre nous ? »2473

Jules FERRY (1832-1893), Chambre des députés, 7 avril 1881

L’Essor industriel et l’impérialisme colonial, 1878-1904 (1965), Maurice Baumont.

Devenu président du Conseil, il défend l’intervention en Tunisie décidée par les députés, et qu’il a personnellement soutenue. La Tunisie devient protectorat français, le 12 mai 1881. L’expression « ligne bleue des Vosges » va revenir dans son testament et passer à la postérité. Cependant, conservateurs et radicaux s’entendent contre la politique coloniale de Ferry, également attaqué pour sa politique scolaire.

« Cette tête de l’homme du peuple, cultivez-la […] éclairez-la […] vous n’aurez pas besoin de la couper. »2474

Victor HUGO (1802-1885), Claude Gueux (1834)

Un bref roman de jeunesse, déjà contre la peine de mort.

La même idée inspire la politique scolaire de Jules Ferry : pour régler la question sociale, il faut selon lui faire disparaître « la dernière, la plus redoutable des inégalités qui viennent de la naissance, l’inégalité de l’éducation », permettre « la première fusion qui résulte du mélange des riches et des pauvres sur le banc de quelque école ». D’où les « lois Ferry » de 1881-1882, qui rendent l’enseignement primaire gratuit, ce qui permet de le rendre obligatoire de 7 à 13 ans, puis laïque (…)

« Qui vive ? La France ! »2475

Paul DÉROULÈDE (1846-1914), devise, et mot d’ordre de la Ligue des patriotes. M. Paul Déroulède et sa Ligue des patriotes (1889), Henri Canu, Georges Buisson

La Ligue est fondée le 18 mai 1882. Déroulède, volontaire de la guerre franco-allemande de 1870 1871, incarne un patriotisme nationaliste et revanchard qui va faire beaucoup de bruit et déchaîner pas mal de fureurs, jusqu’à la prochaine guerre (…)

« Avant d’aller planter le drapeau français là où il n’est jamais allé, il fallait le replanter d’abord là où il flottait jadis, là où nous l’avons tous vu de nos propres yeux. »2476

Paul DÉROULÈDE (1846-1914), Discours du Trocadéro, octobre 1884. Pour en finir avec la colonisation (2006), Bernard Logan

C’est l’expression du patriotisme continental, opposé à l’aventure coloniale incarnée par Ferry. Ce qui explique l’anticolonialisme de Déroulède.

« Faire passer avant toute chose la grandeur du pays et l’honneur du drapeau. »2477

Jules FERRY (1832-1893), Chambre des députés, 30 mars 1885. Discours et opinions de Jules Ferry (1897), Jules Ferry, Paul Robiquet

La conquête de l’Indochine a commencé sous Napoléon III, et Ferry poursuit cette colonisation en Extrême-Orient. Par le traité de Hué (25 août 1883), l’empereur du Vietnam dut céder, au nord, le Tonkin devenu protectorat français. Le Chine voisine qui conteste ce traité, envahit le Tonkin : ses troupes, les « Pavillons noirs », se heurtent aux troupes françaises. Presque deux ans de sièges et batailles navales s’ensuivent.

(…) Les radicaux, groupés autour de Clemenceau, dénoncent la politique coloniale de Jules Ferry, surnommé pour l’occasion « Ferry-Tonkin » et même accusé de haute trahison pour avoir engagé des troupes, sans bien en informer les députés. Ferry, président du Conseil, garde son calme et, le 30 mars, invoquant la grandeur du pays et l’honneur du drapeau, demande une augmentation des crédits pour envoyer des renforts au Tonkin. Il déchaîne des clameurs, à la gauche comme à la droite de l’Assemblée.

« Mon patriotisme est en France ! »2478

Georges CLEMENCEAU (1841-1929), Chambre des députés, 30 mars 1885. Affirmation nationale et village planétaire (1998), Jean Daniel

Le « Tigre » fait bloc avec les adversaires de Jules Ferry (détesté aussi de la droite) et réplique au chef du gouvernement : « Nous ne vous connaissons plus, nous ne voulons plus vous connaître […] Ce ne sont plus des ministres que j’ai devant moi […] Ce sont des accusés de haute trahison sur lesquels, s’il subsiste en France un principe de responsabilité et de justice, la main de la loi ne tardera pas à s’abattre. »

Pour Clemenceau, la politique coloniale est « trahison », parce qu’elle détourne la France de la ligne bleue des Vosges et rend impossible la revanche. Le pays n’est pas assez riche en hommes et en crédits pour se battre sur deux fronts à la fois : l’Alsace-Lorraine et des terres lointaines.

Le ministère Ferry est renversé (…)

« Une patrie se compose des morts qui l’ont fondée aussi bien que des vivants qui la continuent. »2479

Ernest RENAN (1823-1892), Réponse au discours de réception de Ferdinand de Lesseps à l’Académie française, 23 avril 1885, Discours et Conférences

Le célèbre et scandaleux auteur de la Vie de Jésus reçoit le vicomte octogénaire, heureux constructeur et administrateur du canal de Suez (qui lui a déjà ouvert les portes de l’Académie des sciences en 1873).

Aux grands hommes, la Patrie reconnaissante.2480

Inscription au fronton du Panthéon

Victor Hugo meurt le 22 mai 1885. Paris lui fait des funérailles nationales, avec un cortège qui va de l’Arc de Triomphe au Panthéon, monument voué au souvenir des grands hommes.

Ce vaste sanctuaire, à l’origine église Sainte-Geneviève édifiée par Soufflot, est transformé en Panthéon destiné à recevoir les cendres des grands hommes, sous la Révolution (1791). Mirabeau, Voltaire et Rousseau en sont les premiers locataires. L’Empire rend le Panthéon au culte. Avec la Restauration, l’église reçoit une nouvelle inscription en latin, hommage à sainte Geneviève, Louis XVI et Louis XVIII réunis. Sous la Monarchie de Juillet, le Panthéon redevient Panthéon et l’inscription reparaît, pour disparaître de nouveau à la fin de la Deuxième République, quand le bâtiment redevient église.

Le Panthéon devient définitivement Panthéon le 28 mai 1885, juste à temps pour recevoir les cendres du grand poète français.

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