Billaud-Varenne : « Un abîme est ouvert sous nos pas. Il ne faut pas hésiter à le combler de nos cadavres ou à triompher des traîtres. »

27 juillet 1794 (9 Thermidor an II). Jour du coup d’État proprement dit.

Le drame se joue en quelques heures : à la tribune de l’Assemblée, puis dans les rues de Paris où les insurgés de la Commune tentent de sauver Robespierre. Le lendemain, Robespierre et ses amis sont guillotinés.

À feuilleter pour tout savoir.

« Un abîme est ouvert sous nos pas. Il ne faut pas hésiter à le combler de nos cadavres ou à triompher des traîtres. »1604

Jean-Nicolas BILLAUD-VARENNE (1756-1819), Convention, 27 juillet 1794

Histoire socialiste, 1789-1900, volume 4, La Convention (1908), Jean Jaurès.

Le député est conscient du danger. Certes, il est membre du Comité de salut public, il fut l’allié de Robespierre contre les factieux : hébertistes et dantonistes résolument éliminés. Mais il fait partie de ceux qui ont organisé le coup d’État du 9 thermidor an II. La veille au soir, le 26, avec les membres également menacés du Comité de sûreté générale, il s’est allié aux conventionnels modérés de la Plaine : on leur a promis la fin de la Terreur. Il faut seulement empêcher Robespierre et Saint-Just de parler à la Convention, ce 27 juillet 1794.

« Je ne suis d’aucune faction, je les combattrai toutes. »1605

SAINT-JUST (1767-1794), Convention, 27 juillet 1794

Dernier discours, déposé sur le bureau, et imprimé le 30, par ordre de la Convention. Un très long discours. Saint-Just s’apprête à donner des noms, entre autres Billaud-Varenne et Collot-d’Herbois ; à défendre son ami Robespierre, ces derniers jours injustement accusé, persécuté, victime des ennemis de la patrie ; à opposer le vice à la vertu, le mensonge à la vérité, la traîtrise au patriotisme ; et à accuser les factieux. « L’orgueil enfante les factions […] Les factions sont le poison le plus terrible de l’ordre social. » Faction, factieux, mots récurrents, et suprême injure parlementaire. Dans le langage de l’époque, cela vaut condamnation à mort.

Saint-Just n’a pas le temps d’argumenter. Au quatrième alinéa, il est violemment interrompu par Tallien et d’autres députés. Ayant passé la nuit à écrire son discours, il n’est pas au courant du coup d’État préparé par les factions.

« C’est le sang de Danton qui t’étouffe. »1606

GARNIER de l’AUBE (1742-1805), à Robespierre suffoquant sous la chaleur torride, Convention, 27 juillet 1794. Mot parfois attribué à Garnier de Saintes (1755-1818) et à Louis Legendre (1752-1797), ami de Danton, qu’il avait abandonné pour sauver sa tête.

Robespierre monte à la tribune à 11 heures du matin, pour donner la liste des « épurés ».

Tallien et les modérés lui coupent la parole, à onze reprises, et son ami Saint-Just ne réagit plus (peut-être nerveusement épuisé). Louchet et Lozeau, deux modérés, demandent la mise en accusation de Robespierre, Couthon, Saint-Just, Lebas. Augustin Robespierre (frère de Maximilien) réclame la sienne : « Je partage ses vertus, je veux partager son sort. » L’arrestation des cinq députés est décrétée aux voix.

Vers 17 heures, tentative d’insurrection des sections populaires de la Commune pour libérer Robespierre et ses amis, transférés à l’Hôtel de Ville, tandis que la Convention met Robespierre « hors la loi » – il peut désormais être exécuté sans jugement.

Le soir, la pluie disperse les insurgés, les sections modérées occupent l’Hôtel de Ville. On trouve Robespierre, mâchoire brisée (coup de pistolet ou tentative de suicide).

Le 28 juillet (10 thermidor), Robespierre, Couthon, Saint-Just et 19 de leurs alliés sont guillotinés sans jugement. Puis 71 le lendemain et quelques autres encore, les jours suivants. Au total, une centaine.