Éginhard : « Passionné pour la science, [Charlemagne]... » | L’Histoire en citations
 Éginhard : « Passionné pour la science, [Charlemagne]... »
Citation du jour

 

Charlemagne et les lettrés. Il n’a pas « inventé l’école », comme dit la chanson, mais contrairement à certaine réputation infondée, Charles le Grand savait lire, écrire : véritablement cultivé « pour un empereur » par ailleurs combattant et conquérant. Mieux encore, il entretenait d’excellentes relations avec les lettrés européens.

« Passionné pour la science, il eut toujours en vénération et comblait de toutes sortes d’honneurs ceux qui l’enseignaient. »65

ÉGINHARD (vers 770-840), Vie de Charlemagne (écrite dans les années 830)

On peut se fier au témoignage d’Éginhard, ministre et secrétaire de Charlemagne, auteur de cette biographie. Un précieux document, contemporain des faits et gestes relatés en deux parties : les guerres menées par Charlemagne ; le portrait de l’empereur, la vie à la cour, son testament.

Bien qu’autodidacte, Charlemagne est lui-même fort savant, ayant appris la rhétorique, la dialectique, le grec, le latin, l’astronomie ; il compose même une grammaire de la langue franque !

Paradoxalement, c’est à partir d’une remarque d’Éginhard, mal traduite (du latin) et mal comprise, que l’erreur s’est répandue : certains vulgarisateurs ont prétendu que Charlemagne savait à peine écrire. En réalité, cette remarque signifiait que même à un âge avancé, l’empereur s’exerçait à la calligraphie, pour atteindre cette perfection propre aux scribes avec lesquels il ne put cependant rivaliser. Voilà qui méritait d’être dit, pour mieux apprécier le personnage !

Plus fondamentalement, l’empereur mène une véritable politique culturelle, au point que les historiens voient en son siècle une « Renaissance carolingienne ».

« J’aimais justement en vous ce que je vous voyais chercher en moi. »66

ALCUIN (vers 735-804), Derniers mots d’une lettre à Charlemagne

Alcuin et Charlemagne (1864), Francis Monnier

Moine anglais originaire de Northumbrie, considéré comme l’« homme le plus savant de son temps » (Éginhard).

Charles (qui n’est encore que roi des Francs) place Alcuin à la tête de l’École palatine d’Aix-la-Chapelle, créée en 782. Véritable maître à penser du monde franc, Alcuin promeut l’enseignement des arts libéraux et les ateliers de copies, permettant la diffusion des textes sacrés et profanes. Il laisse de nombreux traités de pédagogie et de théologie, et une version révisée de la Bible.

Ami et conseiller de Charles, il lui écrit en ces termes très explicites : « Je savais le vif intérêt que vous portiez à la science et combien vous l’aimiez. Je savais que vous excitiez tout le monde à la connaître et que vous offriez des récompenses et des dignités à ceux qui l’aimaient comme vous, pour les engager à venir s’associer à votre généreuse entreprise. Vous avez bien voulu m’appeler, moi le moindre serviteur de cette science sainte, et me faire venir du fond de la [Grande-]Bretagne. Ah ! que n’ai-je apporté dans le service de Dieu autant d’empressement et de zèle que j’en ai mis à vous seconder ! C’est que j’aimais justement en vous… »

« Charles, savant, modeste, […] maître du monde, bien-aimé du peuple […], sommet de l’Europe […] est en train de tracer les murs de la Rome nouvelle. »70

ANGILBERT (vers 740-814) parlant de Charlemagne en 799

Encyclopædia Universalis, article « Europe »

Poète et historien, ministre, conseiller et ami de Charlemagne, Angilbert épousa en secret sa sœur Berthe (sa fille, selon d’autres sources) et se retira dans un monastère où elle le suivra. Il finira saint. C’est l’un des principaux acteurs de cette Renaissance culturelle.

À cette époque, la « Rome nouvelle » désigne l’Empire d’Occident reconstitué - en gros les six premiers pays du Marché commun, future Union européenne. Voilà pourquoi on baptise parfois Charlemagne « père de l’Europe ».

Charlemagne, dûment béni et sacré par le pape en 800, exerce sur ce vaste territoire une influence personnelle en tout domaine. Son empire est unifié par la langue (le latin), la religion, la justice et l’impôt. Mais il ne restaure qu’en apparence l’Empire romain. Gouverné d’Aix-la-Chapelle, hétérogène, mais avant tout franc, la suite de l’histoire montrera la fragilité de cet empire.

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