La politique est-elle en panne de rêve ? (de Napoléon à nos jours) | L’Histoire en citations
Édito de la semaine

Cet édito s’inscrit aux antipodes du « prêt à penser » ou des « petites phrases » : il n’y a pas une réponse à la question-titre, il y en a beaucoup qui se complètent et parfois se contredisent au fil des siècles et des auteurs (toujours empruntées à notre Histoire en citations).

II. De Napoléon à nos jours.  

NAPOLÉON BONAPARTE SOUS LA RÉVOLUTION ET LE DIRECTOIRE

Revivez toute l’Histoire en citations dans nos Chroniques, livres électroniques qui racontent l’histoire de France de la Gaule à nos jours, en 3 500 citations numérotées, sourcées, replacées dans leur contexte, et signées par près de 1 200 auteurs.

« Les hommes de génie sont des météores destinés à brûler pour éclairer leur siècle. »1766

Napoléon BONAPARTE (1769-1821), Discours de Lyon, 1791

Premiers mots du futur empereur retenus par l’histoire. Lieutenant d’artillerie de 22 ans, il participe au concours ouvert par l’Académie de Lyon, sur « l’éducation à donner aux hommes pour les mettre sur le chemin du bonheur » – d’où l’autre nom du « Discours sur le bonheur ». Bonaparte condamne la monarchie absolue et trouve bien des vertus au philosophe des Lumières qu’il traitera ensuite de « fou » dangereux pour la société : « Ô Rousseau, pourquoi faut-il que tu n’aies vécu que soixante ans ! Pour l’intérêt de la vertu, tu eusses dû être immortel. » C’est le style de l’époque. Restent le talent d’expression et l’ambition évidente de cette phrase prémonitoire que n’aurait pas désavouée Chateaubriand  ou Hugo sur le destin fulgurant des hommes de génie.

Du chef de brigade à l’empereur déchu, l’aventure va durer vingt-deux ans, assez pour en faire « le plus grand héros de tous les temps » (Encyclopædia Britannica), toujours comparé aux plus grands : « Qu’est-ce donc que cette chose dont parle Alexandre lorsqu’il évoque sa destinée, César sa chance, Napoléon son étoile ? Qu’est-ce donc sinon la confiance qu’ils avaient tous les trois dans leur rôle historique ? » (Charles de Gaulle, Mémoires).

« Vous n’avez ni souliers, ni habits, ni chemises, presque pas de pain, et nos magasins sont vides ; ceux de l’ennemi regorgent de tout. C’est à vous de les conquérir. Vous le voulez, vous le pouvez, partons ! »1656

Napoléon BONAPARTE (1769-1821), à ses soldats, Toulon, 29 mars 1796. L’Europe et la Révolution française, Cinquième partie, Bonaparte et le Directoire (1903), Albert Sorel

Nommé général en chef de l’armée d’Italie par le Directoire, il tient ce langage le jour de son arrivée devant Toulon : début de la (première) campagne d’Italie et commencement d’une irrésistible ascension. Général en chef de 26 ans, il a déjà l’art de galvaniser ses troupes – vagabonds en guenilles dont il fera des soldats victorieux face aux armées supérieures en nombre, avec les mots dictés par les circonstances : « Votre patience à supporter toutes les privations, votre bravoure à affronter tous les dangers excitent l’admiration de la France ; elle a les yeux tournés sur vos misères… »

EMPIRE

« On ne conduit le peuple qu’en lui montrant un avenir : un chef est un marchand d’espérances. »1768

NAPOLÉON Ier (1769-1821), Maximes et pensées

Précisant cette pensée, il dira aussi : « L’imagination gouverne le monde » (Mémorial de Sainte-Hélène). Et en 1800 : « Je ne suis qu’un magistrat de la République qui n’agit que sur les imaginations de la nation ; lorsque ce moyen me manquera, je ne serai plus rien ; un autre me succédera. » Et encore : « On ne peut gouverner l’homme que par l’imagination ; sans l’imagination, c’est une brute ! Ce n’est pas pour cinq sous par jour ou pour une chétive distinction que l’on se fait tuer ; c’est en parlant à l’âme que l’on électrise l’homme. » Ce message a dû plaire au général de Gaulle, admirateur de l’empereur à plus d’un titre.

« Il faut que je fasse de tous les peuples de l’Europe un même peuple et de Paris la capitale du monde. »1849

NAPOLÉON Ier (1769-1821), fin 1810, à son ministre Fouché. Histoire du Consulat et de l’Empire (1974), Louis Madelin

C’est le rêve européen, plus tenaillant et plus fou que jamais. « Ma destinée n’est pas accomplie ; je veux achever ce qui n’est qu’ébauché ; il me faut un code européen, une Cour de cassation européenne, une même monnaie, les mêmes poids et mesures, les mêmes lois… » Les historiens s’interrogent encore aujourd’hui : impérialiste à l’état pur et avide de conquêtes, patriote français voulant agrandir son pays, ou unificateur de l’Europe en avance sur l’histoire ?

Napoléon s’identifie à Charlemagne, mais le temps n’est plus à ce genre d’empire, les peuples sont devenus des nations, la Révolution leur a parlé de Liberté. Il invoque un autre modèle historique : « Les Romains donnaient leurs lois à leurs alliés ; pourquoi la France ne ferait-elle pas adopter les siennes ? » Sur ce point capital, il a raison. Le Code Napoléon, remarquable monument juridique, s’applique à l’Empire depuis 1807 et nombre de pays l’adopteront de leur plein gré.

« Voilà le commencement de la fin. »1869

TALLEYRAND (1754-1838), à l’annonce du désastre de la retraite de Russie, décembre 1812. Monsieur de Talleyrand (1870), Charles-Augustin Sainte-Beuve

Le rêve tourne au cauchemar. Ce grand diplomate et géopoliticien l’a prédit avant tout le monde, sans savoir l’ampleur de la débâcle. Les soldats sont victimes du « Général Hiver ». Le froid rend fous les chevaux et colle l’acier des armes aux doigts des soldats. Le passage de la Bérézina (fin novembre) est un épisode devenu légendaire : par –20°C le jour, –30°C la nuit, ce qui reste de la Grande Armée réussit à franchir la rivière, grâce aux pontonniers du général Eblé et aux troupes qui couvrent le passage (Ney et Victor). 8 000 traînards n’ont pas le temps de passer, ils seront tués par les Cosaques.

Exilé à Sainte-Hélène en 1815 après Waterloo et la deuxième abdication, Napoléon  conclut : « Fussé-je mort à Moscou, ma renommée serait celle du plus grand conquérant qu’on ait connu. Mais les sourires de la Fortune étaient à leur fin. »

RESTAURATION ET MONARCHIE DE JUILLET

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« Le peuple a besoin qu’on l’éblouisse et non pas qu’on l’éclaire. ».

Charles FOURIER (1772-1837), Théorie des quatre mouvements (1808)

Priorité au rêve sur la raison ! Philosophe et économiste fondateur de l’École sociétaire au début du siècle, il s’oppose ici à l’esprit des Lumières du XVIIIe. Il va donner son nom au « fouriérisme » et créer avec Saint-Simon (à l’origine du saint-simonisme) le socialisme utopique - qualifié aussi de romantique, prémarxiste, conceptuel, scientifique. Quoiqu’il en soit, il est à l’origine du socialisme, cette idée neuve qui va marquer le siècle (et bien au-delà) avec d’autres auteurs, les plus célèbres étant Marx et Proudhon, les frères ennemis.

« Aimez le travail, nous dit la morale : c’est un conseil ironique et ridicule. Qu’elle donne du travail à ceux qui en demandent, et qu’elle sache le rendre aimable. »1903

Charles FOURIER (1772-1837), Livret d’annonce du nouveau monde industriel (1829)

Il critique l’ordre social et trace les grandes lignes d’une société nouvelle, conforme à ses vœux : le phalanstère en est la cellule, regroupant les travailleurs associés en une sorte de coopérative. Il doit en résulter l’harmonie universelle : c’est moins de l’optimisme qu’une utopie qui fera des adeptes sous la Monarchie de Juillet, première époque du socialisme.

« À chacun selon sa capacité, à chaque capacité selon ses œuvres, plus d’héritage ! »2014

Comte de SAINT-SIMON (1760-1825), Doctrine de Saint-Simon : Exposition. Première année (1829)

Autre initiateur du socialisme à la française, il est mort depuis quatre ans. Mais le socialisme fait son chemin petit à petit dans le pays où les idées nouvelles se diffusent, en dépit de toutes les censures.

« Cette tête de l’homme du peuple, cultivez-la […], éclairez-la […], vous n’aurez pas besoin de la couper. »2474

Victor HUGO (1802-1885), Claude Gueux (1834)

Un bref roman de jeunesse, déjà contre la peine de mort. Hugo qui s’engagera vraiment en politique en 1848 ne sera jamais socialiste, moins encore communiste ! Mais cet homme de droite (et royaliste déclaré) va s’orienter dans une opposition de gauche au pouvoir en place – notamment sous le Second Empire. L’abolition de la peine de mort attendra 1981 (arrivée de la gauche au pouvoir). Mais cet espoir hugolien inspirera la politique scolaire de Jules Ferry : pour régler la question sociale, il faut faire disparaître « la dernière, la plus redoutable des inégalités qui viennent de la naissance, l’inégalité de l’éducation », permettre « la première fusion qui résulte du mélange des riches et des pauvres sur le banc de quelque école ». D’où les « lois Ferry » de 1881-1882 qui rendent l’enseignement primaire gratuit, ce qui permet de le rendre obligatoire de 7 à 13 ans, puis laïque.

« La pauvreté ne sera plus séditieuse, lorsque l’opulence ne sera plus oppressive. »2118

Louis-Napoléon BONAPARTE (1808-1873), L’Extinction du paupérisme (1844)

Le prince qui gouvernera la France (1851-1870) n’est encore qu’un évadé du fort de Ham. Il y a passé six ans après sa tentative de coup d’État, profitant de cette captivité pour exposer ses théories économiques influencées par le socialisme utopique de Saint-Simon. Il sait se présenter en protecteur du monde ouvrier. Sa sincérité socialiste est suspecte à en croire Hugo. Dans son Napoléon le Petit, il reproduira un billet joint à l’ouvrage envoyé à l’un de ses amis : « Lisez ce travail sur le paupérisme et dites-moi si vous pensez qu’il soit de nature à me faire du bien. »

« Le communisme, qui est la révolution même, doit se garder des allures de l’utopie et ne se séparer jamais de la politique. »2049

Auguste BLANQUI (1805-1881). Encyclopédie socialiste, syndicale et coopérative de l’Internationale ouvrière (1912), Adéodat Constant, Adolphe Compére-Morel

Théoricien socialiste, il a le sens de la formule : « L’économie politique est le code de l’usure » ; « Le capital est du travail volé » ; « L’Épargne, cette divinité du jour, prêchée dans toutes les chaires, l’Épargne est une peste » ; etc. Mais Blanqui est aussi un homme d’action, révolutionnaire pur et dur qui organise des sociétés secrètes, multiplie les conspirations… et passera trente ans de sa vie en prison.

DEUXIÈME RÉPUBLIQUE

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« L’enthousiasme fanatique et double de la République que je fonde et de l’ordre que je sauve. »2145

Alphonse de LAMARTINE (1790-1869), chef du gouvernement provisoire, 24 février 1848. XIXe siècle : les grands auteurs français du programme (1968), André Lagarde et Laurent Michard

Entré en politique avec la Révolution de 1830, l’auteur doit continuer d’écrire pour des raisons financières et fait œuvre d’historien avec son Histoire des Girondins. Mais la République va le mobiliser deux ans à plein temps et plein cœur.

Depuis son discours du 27 janvier 1843 qui le mit à la tête de l’opposition de gauche à la Monarchie de Juillet, Lamartine jouit d’une immense popularité. Il conduit le peuple à la révolution rendue inévitable par l’aveuglement des conservateurs et le voilà porté au pouvoir par une unanimité dont la fragilité et surtout l’ambiguïté vont bientôt éclater.

« Le drapeau rouge que vous nous rapportez n’a jamais fait que le tour du Champ de Mars, traîné dans le sang du peuple en 91 et 93, et le drapeau tricolore a fait le tour du monde avec le nom, la gloire et la liberté de la patrie ! »2146

Alphonse de LAMARTINE (1790-1869), chef du gouvernement provisoire, derniers mots de son discours du 25 février 1848. Les Orateurs politiques de la France, de 1830 à nos jours (1898), Maurice Pellisson

Son lyrisme fait merveille aux grandes heures du siècle romantique. La veille, il a accepté la proclamation de la République comme un fait accompli. Mais il refuse l’adoption officielle du drapeau rouge et, seul des onze membres du gouvernement provisoire, il a le courage d’aller vers la foule en armes qui cerne l’Hôtel de Ville. Lui seul peut apaiser les insurgés du jour et rallier le lendemain les modérés à la République.

« Vive la République ! Quel rêve ! […] On est fou, on est ivre, on est heureux de s’être endormi dans la fange et de se réveiller dans les cieux. »2150

George SAND (1804-1876), Lettre au poète ouvrier Charles Poncy, 9 mars 1848, Correspondance (posthume)

La Dame de Nohant, très populaire pour ses romans humanitaires et rustiques, se précipite à Paris et s’enthousiasme avec ses confrères pour la République. Elle fonde La Cause du Peuple (hebdomadaire dont Sartre fera revivre le nom et qui deviendra Libération), elle ne pense plus qu’à la politique, le proclame et s’affiche aux côtés de Barbès (émeutier libéré de prison grâce à la révolution), Louis Blanc et Ledru-Rollin (membres du gouvernement provisoire).

« Toute l’Europe est sous les armes, / C’est le dernier râle des rois :
Soldats, ne soyons point gendarmes, / Soutenons le peuple et ses droits […]
Refrain : Aux armes, courons aux frontières,
Les peuples sont pour nous des frères ! »2143

Pierre DUPONT (1821-1870), Chant des soldats. Muse populaire : chants et poésies (1858), Pierre Dupont

La révolution française de 1848 entraîne une flambée de mouvements révolutionnaires en Europe : Allemagne, Autriche, Italie, Hongrie, Pologne. C’est le « printemps des peuples » et la France qui retrouve sa mission libératrice chante : « Que la République française / Entraîne encore ses bataillons / Au refrain de La Marseillaise / À travers de rouges sillons / Que la victoire de son aile / Touche nos fronts et, cette fois / La République universelle / Aura balayé tous les rois / Aux armes, courons aux frontières… » Mais l’été qui suit ce printemps sera celui de toutes les répressions. Cette contagion du rêve se retrouvera dans le « Printemps arabe » en 2011. Deux ans plus tôt, l’effondrement du régime communiste aura libéré les pays de l’Europe de l’Est.

« Périsse l’humanité plutôt que le principe ! C’est la devise des utopistes comme des fanatiques de tous les siècles. Le socialisme, interprété de la sorte, est devenu une religion […] qui au XIXe siècle est ce qu’il y a de moins révolutionnaire. »2137

Pierre-Joseph PROUDHON (1809-1865), Idée générale de la Révolution au XIXe siècle (1851)

Représentant du socialisme à la française, épouvantail pour la bourgeoisie de la Monarchie de Juillet traumatisée par le fameux « Qu’est-ce que la propriété ? C’est le vol ! », Proudhon critiquait le communisme de Marx dans La Philosophie de la misère (1846) et Marx lui a répondu dans La Misère de la philosophie (1847), le traitant de « petit-bourgeois constamment ballotté entre le Travail et le Capital, entre l’économie politique et le communisme ».

« La politique d’illusions est une politique fatale, elle conduit à la décadence. »

Émile de GIRARDIN (1806-1881), Pensées et maximes (1867)

C’est le créateur de la presse moderne, homme d’affaires, personnage politique influent, journaliste et grand patron de presse. En 1836, il a lancé La Presse, quotidien gouvernemental à bon marché, 40 francs l’abonnement annuel, comme Le Siècle, quotidien d’opposition de Dutacq. La Liberté d’Alexandre Dumas sera vendue un sou et tirée en 1840 à plus de 100 000 exemplaires. Avec l’introduction du roman-feuilleton et de la publicité, la création de l’Agence Havas et de la presse rotative, la presse moderne est née.

Cette démocratisation de la presse va de pair avec vulgarisation, voire vulgarité, dénoncée par Barbey d’Aurevilly, poète et critique surnommé le Connétable des lettres : « Les journaux qui devraient être les éducateurs du public, n’en sont que les courtisans, quand ils n’en sont pas les courtisanes. » C’est quand même un incontestable progrès dans la communication des idées. Au siècle suivant, la télévision publique contrôlée par le pouvoir gaulliste s’exposera aux mêmes critiques lors de sa privatisation. C’est quand même un incontestable progrès dans la communication.

COMMUNE DE PARIS

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« Plus de rois, plus de maîtres, plus de chefs imposés, mais des agents constamment responsables et révocables à tous les degrés du pouvoir. »2357

Fédération des bataillons de la garde nationale, Serment du 10 mars 1871. Enquête parlementaire sur l’insurrection du 18 mars (1872), Commission d’enquête sur l’insurrection du 18 mars, Napoléon Daru

Utopie radicale s’il en est ! Cette Fédération, nouveau pouvoir surgi aux élections de février, jaillit spontanément du peuple de Paris, ouvriers, artisans, petits bourgeois confondus, unis dans le même amour de la patrie (en guerre avec la Prusse) et de la République nouvelle. Ils rejettent le suffrage universel qui a fait l’Assemblée à l’image de la nation (bourgeoise, conservatrice et royaliste), ils revendiquent la démocratie directe. Voilà tout ce que redoutent la France profonde et le gouvernement qui se rappellent la Terreur de 1793 et les désordres de la Deuxième République en 1848.

« Paris ouvrait à une page blanche le livre de l’histoire et y inscrivait son nom puissant ! »2364

Comité central de la garde nationale, Proclamation du 28 mars 1871. Histoire du socialisme (1879), Benoît Malon

En présence de 200 000 Parisiens, le comité central de la garde nationale s’efface devant la Commune, le jour même de sa proclamation officielle. Le lyrisme s’affiche avec l’espoir : « Aujourd’hui il nous a été donné d’assister au spectacle populaire le plus grandiose qui ait jamais frappé nos yeux, qui ait jamais ému notre âme. » Le mouvement s’étend à quelques villes : Lyon, Marseille, Narbonne, Toulouse, Saint-Étienne.

« Nous avons la mission d’accomplir la révolution moderne la plus large et la plus féconde de toutes celles qui ont illuminé l’histoire. »2369

La Commune, Déclaration au peuple français, 19 avril 1871. Enquête parlementaire sur l’insurrection du 18 mars (1872), Commission d’enquête sur l’insurrection du 18 mars, Napoléon Daru

La Commune ne fait pas que se défendre et attaquer. Elle gouverne Paris et prend des mesures importantes qui préfigurent l’œuvre de la Troisième République : séparation des Églises et de l’État, instruction laïque, gratuite et obligatoire en projet. Elle est socialiste quand elle « communalise » par décret du 16 avril les ateliers abandonnés par les fabricants en fuite, pour donner la gestion à des coopératives formées par les Chambres syndicales ouvrières. Karl Marx, témoin, écrit  l’année même : « C’était la première révolution dans laquelle la classe ouvrière était ouvertement reconnue comme la seule qui fût encore capable d’initiatives sociales. » (La Guerre civile en France)

« La révolution sera la floraison de l’humanité comme l’amour est la floraison du cœur. »2365

Louise MICHEL (1830-1905), La Commune, Histoire et souvenirs (1898)

Ex-institutrice, militante républicaine et anarchiste (prête à un attentat contre Thiers chef du gouvernement), auteure de poèmes et de théâtre, c’est une idéaliste comme tant de communards et l’héroïne restée la plus populaire. Un quart de siècle après, elle fait revivre ces souvenirs vibrants et tragiques. La « Vierge rouge », pasionaria des barricades, appelle les quartiers populaires à l’insurrection et jusqu’au sacrifice : « Montmartre, Belleville, ô légions vaillantes, / Venez, c’est l’heure d’en finir. / Debout ! La honte est lourde et pesantes les chaînes, / Debout ! Il est beau de mourir. »

Face aux Communards (ou Fédérés), les Versaillais (pouvoir légitime réfugié hors Paris) se préparent, troupes commandées par les généraux Mac-Mahon et Vinoy. En plus des 63 500 hommes dont l’État dispose, il y a les 130 000 prisonniers libérés par le chancelier Bismarck – hostile à tout mouvement populaire à tendance révolutionnaire. Le 30 mars, Paris est pour la seconde fois ville assiégée, bombardée à présent par des Français.

Premiers affrontements, le 2 avril : les rêveurs de la Commune qualifient les obus qui les écrasent de « choses printanières ». 17 tués et 25 prisonniers chez les Fédérés. Dans l’armée versaillaise, 5 morts et 21 blessés. La répression finale sera terrible : la Semaine sanglante (21 au 28 mai) aboutit à l’un des pires massacres de l’Histoire – estimé à quelque 100 000 morts. Reste la force de l’utopie…

« C’est la lutte finale ; / Groupons-nous et demain
L’Internationale / Sera le genre humain. »2527

Eugène POTTIER (1816-1888), paroles, et Pierre DEGEYTER (1848-1932), musique, L’Internationale (refrain), chanson

Ce chant est écrit par Pottier durant la Commune dec1871. Mis en musique en 1888 par Degeyter, un ouvrier tourneur, chanté pour la première fois au Congrès de Lille du Parti ouvrier en 1896, il deviendra l’hymne du mouvement ouvrier français en 1899. Immense succès dans les classes populaires sensibles à ces mots : « Du passé faisons table rase / Foule esclave, debout ! debout ! / Le monde va changer de base / Nous ne sommes rien, soyons tout ! » Ce n’est pas la révolution souhaitée par les Communards en 1871, mais c’est un progrès pour la gauche qui arrive au pouvoir avec les radicaux. Elle va y rester au prix de diverses alliances, jusqu’à la Première Guerre mondiale.

Il faut rendre justice à cette Troisième République si décriée à juste titre pour ses crises en tous genres et sa faiblesse constitutionnelle, mais riche aussi de grands progrès et de nouvelles utopies.

TROISIÈME RÉPUBLIQUE

Revivez toute l’Histoire en citations dans nos Chroniques, livres électroniques qui racontent l’histoire de France de la Gaule à nos jours, en 3 500 citations numérotées, sourcées, replacées dans leur contexte, et signées par près de 1 200 auteurs.

« Le progrès n’est pas une suite de soubresauts ni de coups de force. Non : c’est un phénomène de croissance sociale, de transformation, qui se produit d’abord dans les idées et descend dans les mœurs pour passer ensuite dans les lois. »2402

Jules FERRY (1832-1893), Chambre des députés, 7 mars 1883

Président du Conseil, il répond à Clemenceau le « tombeur de ministères », turbulent leader radical qui demande l’ordre républicain dans son intégralité. Le progrès social, mais aussi économique et politique, est vu comme un cercle vertueux, porteur d’un espoir indéfectible en des jours meilleurs pour toute la société.

« Un seul patron, un seul capitaliste : tout le monde ! Mais tout le monde travaillant, obligé de travailler et maître de la totalité des valeurs sorties de ses mains. »2403

Jules GUESDE (1845-1922), Collectivisme et Révolution (1879)

Appelé « le socialisme fait homme » (venant après Blanqui et avant Jaurès, Blum, Briand), fondateur de L’Égalité, premier journal marxiste français, il crée en 1880 le Parti ouvrier français (POF) qu’il veut internationaliste, collectiviste et révolutionnaire. Le guesdisme joue un rôle important jusqu’à son intégration dans le Parti socialiste unifié (Section française de l’Internationale ouvrière, SFIO) en 1905. Deux fois député (de Roubaix, de Lille), Guesde sera ministre d’État en 1914-1916, malgré son hostilité de principe à toute participation socialiste dans un ministère bourgeois : la guerre le rend avant tout français et nationaliste. C’est l’union sacrée, autre rêve qui prend forme en cas de guerre.

« Pensons-y toujours, n’en parlons jamais. »2419

Léon GAMBETTA (1838-1882), Discours de Saint-Quentin, 16 novembre 1871

Silence forcé de la France ; silence encore plus forcé de l’Alsace. Gambetta, comme tous les Français, pense aux deux provinces sœurs devenues étrangères, l’Alsace et la Lorraine. Charles Maurras traduira à sa façon l’unanimité nationale autour du culte de l’Alsace-Lorraine en parlant de « la Revanche reine de France ». Paul Déroulède, créant la Ligue des patriotes en 1882, incarnera un patriotisme nationaliste et revanchard qui fera beaucoup de bruit et déchaînera pas mal de fureurs, jusqu’à la prochaine guerre.

Mais les milieux gouvernementaux font preuve d’une grande réserve, sachant la France trop isolée pour mettre la revanche dans les faits. Il faudra beaucoup de temps et d’efforts pour se dresser devant l’Allemagne unie, avec à sa tête Guillaume Ier, vainqueur et proclamé empereur du nouveau Reich, Bismarck devenu chancelier (équivalent de Premier ministre) de cette nouvelle puissance européenne.

« La France est un éblouissement pour le monde. »2460

Léon GAMBETTA (1838-1882), Inauguration de la troisième Exposition universelle de Paris, 1er mai 1878. Gloires et tragédies de la IIIe République (1956), Maurice Baumont

Ancien ministre de l’Intérieur et futur président du Conseil (des ministres), républicain ardent, avocat toujours éloquent, c’est l’une des personnalités politiques majeures qui exprime ici notre fierté nationale. La Troisième République est portée par la vague du progrès scientifique et technique et par l’avènement de la civilisation industrielle. Deux autres Expositions universelles qui se tiendront à Paris avant 1914 (en 1889 et 1900) en témoigneront.

« Ni Dieu ni maître. »2408

Auguste BLANQUI (1805-1881), titre de son journal créé en 1877

Entré en politique sous la Restauration, arrêté en 1871, condamné à mort et amnistié, cet infatigable socialiste reprend son activité révolutionnaire à 72 ans. Son « Ni Dieu ni maître » deviendra la devise des anarchistes qui troubleront la Troisième République pendant un quart de siècle. Une forme d’utopie violente qui va séduire divers extrémistes plus ou moins politisés.

« Prenez ce qu’il vous faut. »2409

Prince KROPOTKINE (1842-1921), devise anarchiste. La Conquête du pain (1892), Pierre Kropotkine

Officier, explorateur, savant, ce prince russe adhéra au mouvement révolutionnaire né dans son pays. Arrêté, évadé, il fonde en Suisse une société secrète à tendance anarchiste. Expulsé, il vient en France où il aura aussi des ennuis avec la justice. Son influence est grande sur les mouvements anarchistes qui essaiment en Europe.

En France, les attentats se multiplient surtout de 1892 à 1894. L’anarchie a diverses causes : souvenir de la Commune de Paris, hostilité envers les partis politique de gauche, haine et mépris pour la bourgeoisie affairiste. Une des dernières victime, le président de la République Sadi Carnot, assassiné le 24 juin 1894, visitant l’Exposition de Lyon et poignardé par Caserio, jeune anarchiste italien, plus illuminé que politisé ». Les derniers anarchistes célèbres en France seront ceux de « la bande à Bonnot » : 20 accusés, 4 condamnés à mort exécutés en 1912.

« La vérité est en marche ; rien ne peut plus l’arrêter. »2515

Émile ZOLA (1840-1902), Le Figaro, 25 novembre 1897

Zola commente la demande en révision du procès du capitaine Dreyfus. L’Affaire, complexe et longue, commence fin septembre 1894, quand une femme de ménage française de l’ambassade allemande, travaillant pour le Service de renseignements, découvre un bordereau prouvant la trahison d’un officier de l’état-major français. Le général Mercier, ministre de la Guerre, met en cause Alfred Dreyfus. On lui fait faire une dictée, il y a similitude entre son écriture et celle du bordereau en cause. Dreyfus est condamné à la déportation en Guyane par le Conseil de guerre de Paris, 22 décembre 1894. Diverses irrégularités sont mises en évidence. Sa qualité de juif joue contre lui à une époque où l’antisémitisme a ses hérauts, ses journaux, ses réseaux : « Il n’y a pas d’affaire Dreyfus » selon le président du Conseil Jules Méline qui refuse la demande en révision du procès.

Les dreyfusards (minoritaires) vont mobiliser l’opinion publique par une campagne de presse. L’Aurore, journal de Clemenceau, publie : J’accuse. Titre de l’article en forme de lettre ouverte au président de la République Félix Faure écrite par Zola, romancier très populaire : il accuse deux ministres de la Guerre, les principaux officiers de l’état-major et les experts en écriture d’avoir « mené dans la presse une campagne abominable pour égarer l’opinion » et le Conseil de guerre qui a condamné Dreyfus d’« avoir violé le droit en condamnant un accusé sur une pièce restée secrète ». Le ministre de la Guerre, général Billot, intente au célèbre écrivain un procès en diffamation.

« Un jour la France me remerciera d’avoir aidé à sauver son honneur. »2518

Émile ZOLA (1840-1902), La Vérité en marche, déclaration au jury. L’Aurore, 22 février 1898

Le procès Zola en cour d’assises (7-21 février 1898) fait connaître l’affaire Dreyfus au monde entier. Formidable tribune pour l’intellectuel converti aux doctrines socialistes et aux grandes idées humanitaires ! « Tout semble être contre moi, les deux Chambres, le pouvoir civil, le pouvoir militaire, les journaux à grand tirage, l’opinion publique qu’ils ont empoisonnée. Et je n’ai pour moi que l’idée, un idéal de vérité et de justice. Et je suis bien tranquille, je vaincrai. »

Zola est condamné à un an de prison et 3 000 francs d’amende. Mais le 3 juin 1899, la Cour de cassation se prononce pour « l’annulation du jugement de condamnation rendu le 22 décembre 1894 contre Alfred Dreyfus. Gracié par le président de la République, il sera réintégré dans l’armée en 1906. L’honneur est sauf, justice est faite, mais l’Affaire a littéralement déchiré en deux la France, tous les partis, les milieux, les familles.

PREMIÈRE GUERRE MONDIALE

« Dans la guerre qui s’engage, la France […] sera héroïquement défendue par tous ses fils dont rien ne brisera, devant l’ennemi, l’union sacrée. »2581

Raymond POINCARÉ (1860-1934), Message aux Chambres, 4 août 1914. La République souveraine : la vie politique en France, 1879-1939 (2002), René Rémond

Contexte tragique. L’Allemagne a déclaré la guerre à la France le 3 août, envahissant la Belgique pour arriver aux frontières françaises : selon le chancelier allemand Bethmann-Hollweg, le traité international garantissant la neutralité de ce pays n’était qu’un « chiffon de papier ». La violation de la Belgique, en exposant directement les côtes anglaises, a pour effet de pousser cet allié à entrer en guerre.

La guerre va bouleverser l’échiquier politique en France. L’« union sacrée », c’est le gouvernement qui élargit sa base avec l’arrivée de ministres socialistes. C’est surtout la volonté de tous les Français de servir la patrie : royalistes, princes d’Orléans et princes Bonaparte s’engagent avec les militants d’extrême gauche, hier encore pacifistes et internationalistes.

« Courage ! On les aura ! »2597

Général PÉTAIN (1856-1951), derniers mots de l’Ordre du jour rédigé le 10 avril 1916. Verdun, 1914-1918 (1996), Alain Denizot

Il prend la direction des opérations après la première offensive allemande, réorganise le commandement et le ravitaillement des troupes par la Voie sacrée (qui relie Verdun à Bar-le-Duc). Il redonne confiance aux « poilus » et même s’il n’obtient pas les renforts demandés, il impose que les troupes soient périodiquement remplacées - système du « tourniquet » en vertu de quoi 70 % de l’armée française a « fait » Verdun.

Dix mois de batailles de tranchées, chaque jour 500 000 obus de la Ve armée allemande pour « saigner à blanc l’armée française », 80 % des pertes venant de l’artillerie. Chaque unité perdra plus de la moitié de ses effectifs – 162 000 morts et 216 000 blessés, côté français. La saignée est comparable, chez l’ennemi. Dans l’« enfer de Verdun » - le mot est juste -, la résistance française devient aux yeux du monde un exemple d’héroïsme et de ténacité, demeurant une page de l’histoire de France et un symbole pour des générations. Pétain restera comme le vainqueur de Verdun.

Mais la guerre d’usure a dépassé les forces physiques, morales, militaires du pays. Clemenceau, 76 ans, est appelé en dernier recours par le président Poincaré le 16 novembre 1917 : « Nous voulons vaincre pour être justes » dit-il le 20 novembre. Peut-on parler d’utopie, dans la bouche de cet homme politique si réaliste ?

« Ce que nous voulons, c’est que le monde devienne un lieu sûr où tous puissent vivre, un lieu possible pour toute nation éprise de la paix comme la nôtre, pour toute nation qui désire vivre librement de sa vie propre, décider de ses propres institutions, et être sûre d’être traitée en toute justice et loyauté par les autres nations, au lieu d’être exposée à la violence et aux agressions égoïstes de jadis. Tous les peuples du monde sont en effet solidaires dans cet intérêt suprême, et en ce qui nous concerne, nous voyons très clairement qu’à moins que justice ne soit rendue aux autres, elle ne nous sera pas rendue à nous-mêmes. C’est donc le programme de la paix du monde qui constitue notre programme. »,

Woodrow WILSON (1856-1924), Message du Président des Etats-Unis d’Amérique, discours au Congrès, 8 janvier 1918

Les Etats-Unis sont entrés en guerre le 5 avril 1917 – au cri de « La Fayette, nous voici ! ». Le conflit mondial est loin d’être fini et ce message présidentiel peut sembler une folle utopie. Mais Wilson donne la liste des 14 points nécessaires à l’obtention de la paix : « La paix dans le monde pour l’établissement de la démocratie » réclame notamment la création d’une « League of Nations » (SDN). Les autres points serviront de base au traité de Versailles de 1919 qui créera la SDN.

« Ma formule est la même partout. Politique intérieure ? Je fais la guerre. Politique étrangère ? Je fais la guerre. Je fais toujours la guerre. »2606

Georges CLEMENCEAU (1841-1929), Chambre des députés, 8 mars 1918. Le Véritable Clemenceau (1920), Ernest Judet

Il s’exprime à la tribune : « Moi aussi j’ai le désir de la paix le plus tôt possible et tout le monde la désire, il serait un grand criminel celui qui aurait une autre pensée, mais il faut savoir ce qu’on veut. Ce n’est pas en bêlant la paix qu’on fait taire le militarisme prussien. »

Un tel discours, dans un tel moment, ce n’est plus un homme politique qui parle en orateur, mais un boulet de canon qui vise l’ennemi. Il répond ici à une interpellation d’Émile Constant au sujet de procès intentés pour défaitisme et de campagnes de presse menées contre tel ou tel député. La situation est de nouveau grave, au début de 1918. L’Allemagne a reçu le renfort des 700 000 hommes libérés du front russe (après l’armistice des Soviets). La grande bataille de France est déclenchée sans attendre que l’Entente (France et Angleterre) reçoive la suite des renforts américains, prévus pour juillet.

« Je me battrai devant Paris, je me battrai dans Paris, je me battrai derrière Paris ! »2609

Georges CLEMENCEAU (1841-1929), printemps 1918. Les Grandes Heures de la Troisième République (1968), Robert Aron

L’offensive allemande du 27 mai sur le Chemin des Dames enfonce en quelques heures les positions franco-anglaises, fait une avancée de 20 km en un jour, franchit bientôt l’Aisne et la Marne, créant une nouvelle « poche » de 70 km sur 50. Foch, un moment contesté, est sauvé par Clemenceau et les Alliés reçoivent d’Amérique les renforts prévus, en hommes et en matériel. D’où la contre-offensive : seconde bataille de la Marne, déclenchée le 18 juillet. Les chars d’assaut (tanks) sont pour la première fois utilisés à grande échelle. Ils enfoncent les barbelés allemands en un rien de temps. La victoire est plus rapide qu’espéré. Malgré tout, ce ne sera jamais la débâcle, seulement le recul sur le terrain peu à peu reconquis.

« La victoire annoncée n’est pas encore venue et le plus terrible compte de peuple à peuple s’est ouvert : il sera payé. »2610

Georges CLEMENCEAU (1841-1929), Discours au Sénat, 17 septembre 1918

Dernier appel au combat du Père la Victoire. Le recul des armées allemandes permet de constater l’étendue des dévastations : sur l’ensemble du territoire, plus de 800 000 immeubles détruits en tout ou partie, 54 000 km de routes à refaire, des milliers de ponts à reconstruire.
Le bilan humain est vertigineux. En Europe, la Grande Guerre aura fait 18 millions de morts, 6 millions d’invalides, plus de 4 millions de veuves et deux fois plus d’orphelins. Le maréchal Lyautey, ministre de la Guerre quelques mois dans le cabinet Briand, avait dit au déclenchement du conflit : « C’est la plus monumentale ânerie que le monde ait jamais faite. »

ENTRE-DEUX-GUERRES

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« Certes, nos différends n’ont pas disparu, mais, désormais, c’est le juge qui dira le droit […] Arrière les fusils, les mitrailleuses, les canons ! »2654

Aristide BRIAND (1862-1932), ministre des Affaires étrangères, Discours du 10 septembre 1926

Rêve, espoir, utopie ? Le « Pèlerin de la Paix » est surnommé aussi « l’Arrangeur » pour son aptitude à trouver à tout problème une solution de compromis, plus de vingt fois ministre, notamment aux Affaires étrangères et à la Justice où Clemenceau lui reprochait de se prendre pour Jésus-Christ ! Il reçoit le prix Nobel de la paix – avec son homologue allemand, Gustav Stresemann.

À l’inverse de Poincaré qui incarne la fermeté face à l’Allemagne, Briand croit à la réconciliation, au désarmement, au droit international et à la Société des nations (SDN) garante de la paix – voulue par le président américain Wilson dès janvier 1918. Après le pacte de Locarno d’octobre 1925 qui garantit les frontières fixées au traité de Versailles, Briand salue l’entrée de l’Allemagne au sein de la SDN : « Moi, je dis que la France […] ne se diminue pas, ne se compromet pas, quand, libre de toutes visées impérialistes et ne servant que des idées de progrès et d’humanité, elle se dresse et dit à la face du monde : « Je vous déclare la Paix ! » »

« L’esprit donne l’idée d’une nation ; mais ce qui fait sa force sentimentale, c’est la communauté de rêves. »2656

André MALRAUX (1901-1976), La Tentation de l’Occident (1926)

Malraux, 25 ans, a déjà flirté avec l’Action française et le surréalisme, fait la contrebande de statues khmères en Indochine, croisé les révolutionnaires communistes en Chine. Il confronte ici deux cultures, Extrême-Orient face à Occident, et va participer à l’histoire en train de se faire. Il appartient à la dernière grande génération d’écrivains français qui fait rimer aventure et littérature : Malraux et Montherlant, Camus et Saint-Exupéry, Sartre et Aragon, d’autres noms encore, chacun suivant un itinéraire personnel.

« L’Histoire est le produit le plus dangereux que la chimie de l’intellect ait élaboré. Ses propriétés sont bien connues. Il fait rêver, il enivre les peuples, leur engendre de faux souvenirs, exagère leurs réflexes, entretient leurs vieilles plaies, les tourmente dans leur repos, les conduit au délire des grandeurs ou à celui de la persécution et rend les nations amères, superbes, insupportables et vaines. »2660

Paul VALÉRY (1871-1945), Discours de l’histoire (1932)

« Espèce de poète d’État » (dit-il de lui-même), croulant sous les honneurs, il demeure plus que jamais lucide au monde. Cette leçon d’histoire est paradoxalement signée d’un intellectuel qui refuse à l’histoire le nom de vraie science et lui dénie toute vertu d’enseignement, car « elle contient tout, et donne des exemples de tout ». Donc, se méfier des prétendues leçons du passé, d’autant que « nous entrons dans l’avenir à reculons ».

FRONT POPULAIRE

« Il s’agit, après avoir toujours plié, tout subi, tout encaissé en silence, d’oser enfin se redresser. Se tenir debout. Prendre la parole à son tour. Se sentir des hommes pendant quelques jours… Cette grève est en elle-même une joie. »2678

Simone WEIL (1909-1943), La Révolution prolétarienne, 10 juin 1936

Agrégée de philosophie, ouvrière chez Renault pour être au contact du réel, passionnée de justice, mystique d’inspiration chrétienne quoique née juive, toujours contre la force et du côté des faibles, des vaincus et des opprimés, la jeune femme vibre à cette aventure et participe pleinement : « Joie de vivre parmi ces machines muettes, au rythme de la vie humaine. Bien sûr, cette vie si dure recommencera dans quelques jours. Mais on n’y pense pas, on est comme des soldats en permission pendant la guerre. Joie de pénétrer dans l’usine avec l’autorisation souriante d’un ouvrier. Joie de trouver tant de sourires, tant de paroles d’accueil fraternel. Joie de parcourir ces ateliers où on était rivé sur sa machine. »

D’innombrables témoignages concordent sur ces « grèves de la joie » : mai 36, comme Mai 68, c’est une fête. En juin, plus de 12 000 grèves toucheront près de 2 millions d’ouvriers – le secteur public ne sera cependant pas concerné.

« Il est revenu un espoir, un goût du travail, un goût de la vie. »2681

Léon BLUM (1872-1950), constat du chef du gouvernement, 31 décembre 1936

« … La France a une autre mine et un autre air. Le sang coule plus vite dans un corps rajeuni. Tout fait sentir qu’en France, la condition humaine s’est relevée. » Georges Duby confirme, dans son Histoire de la France : « Le Front populaire, ce n’est pas seulement un catalogue de lois ou une coalition parlementaire. C’est avant tout l’intrusion des masses dans la vie politique et l’éclosion chez elle d’une immense espérance […] Il y a une exaltation de 1936 faite de foi dans l’homme, de croyance au progrès, de retour à la nature, de fraternité et qu’on retrouve aussi bien dans les films de Renoir que dans ce roman de Malraux qui relate son aventure espagnole et justement s’appelle L’Espoir. »

SECONDE GUERRE MONDIALE

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« Un fou a dit « Moi, la France » et personne n’a ri parce que c’était vrai. »2709

François MAURIAC (1885-1970). Encyclopædia Universalis, article « France »

Rappelons les termes de l’Appel à la BBC, 19 juin 1940. « Devant la confusion des âmes françaises, devant la liquéfaction d’un gouvernement tombé sous la servitude ennemie, devant l’impossibilité de faire jouer nos institutions, moi, général de Gaulle, soldat et chef français, j’ai conscience de parler au nom de la France. »

Simple général de brigade à titre temporaire, Charles de Gaulle en 1940, absolument seul et contre le destin, refuse la défaite entérinée par le gouvernement légal de la France face à l’Allemagne nazie, continue la lutte dans l’Angleterre toujours en guerre, mobilise des résistants, combattants français de plus en plus nombreux à entendre cette autre voix de la France parlant espoir et grandeur, se fait reconnaître non sans peine des Alliés, déchaîne des haines et des passions également inconditionnelles, et permet enfin à la France d’être présente au jour de la victoire finale.

« Elle [la France] n’est pas seule […] Elle peut faire bloc avec l’Empire britannique qui tient la mer et continue la lutte […] Quoi qu’il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra pas. »2713

Charles de GAULLE (1890-1970), Appel du 18 juin 1940, Mémoires de guerre, tome I, L’Appel, 1940-1942 (1954)

Cette foi en la résistance est fondée sur un atout majeur : la Grande-Bretagne a aussi trouvé son grand homme, Churchill, partenaire essentiel pour de Gaulle. Au lendemain de la défaite française de juin 1940, la « bataille d’Angleterre » commence avec la marine qui empêche tout débarquement allemand, l’aviation qui met en échec la Luftwaffe, enfin l’Empire britannique qui permet de tenir tête à Mussolini et même à Hitler, dans la guerre méditerranéenne.

« Comment voulez-vous que je fasse avec un homme qui se prend à la fois pour Jeanne d’Arc et Napoléon ! »2724

Franklin Delano ROOSEVELT (1882-1945). La Vie politique en France de 1940 à 1958 (1984), Jacques Chapsal

La référence à ces deux personnages de l’histoire de France est d’autant plus juste que Napoléon est le grand homme de De Gaulle (avec César et Alexandre), cependant qu’il entretient avec la France un dialogue dont il fait souvent état dans ses Mémoires : « Je suis son fils qui l’appelle […] J’entends la France me répondre. » Mais le président des États-Unis n’éprouve pas la sympathie d’un Churchill pour le chef de la France libre et de Gaulle doit se battre dans les coulisses de la guerre, pour ne pas être systématiquement éliminé des opérations.

« La gloire se donne seulement à ceux qui l’ont toujours rêvée. »2727

Charles de GAULLE (1890-1970), Vers l’armée de métier (1934)

Il se dévoile et l’on croirait entendre Napoléon. Mais comme lui, de Gaulle se fait surtout remarquer par ses idées de stratégie militaire. Il a prédit l’importance d’une armée motorisée et blindée dans un prochain conflit à l’encontre des idées reçues chez nos militaires de l’entre-deux-guerres : la défaite éclair de l’armée française en 1940 lui donnera raison.

« On ne fait rien de sérieux si on se soumet aux chimères, mais que faire de grand sans elles ? »2729

Charles de GAULLE (1890-1970). Les Chênes qu’on abat (1979), André Malraux

Dilemme philosophico-politico-existentiel ! Malraux a parfait le personnage de Gaulle aussi soigneusement que le sien propre – « son côté Chateaubriand » que décèle si bien Mauriac en Malraux. De Gaulle lui ressemblait en cela aussi, cultivant son personnage et soucieux de laisser à l’histoire ses Mémoires.

« Mon empire vivra mille ans ! »2769

Adolf HITLER (1889-1945), dont l’empire vivra douze ans (1933-1945). Les 100 personnages du XXe siècle (1999), Frank Jamet

Prophétie du « Reich de mille ans » : au-delà de la propagande nazie, le Führer est le nouveau messie pour un peuple humilié, avide de revanche depuis 1918. Première visée, la France, l’ennemie mortelle et vaincue : elle subit la domination allemande des deux tiers de son territoire dans la zone occupée, avec une zone libre qui le sera de moins en moins, tandis que les trois départements d’Alsace-Lorraine sont annexés, les deux départements du Nord et du Pas-de-Calais réunis à la Belgique – elle-même envahie par les chars d’assaut lors de la Blitzkrieg (guerre éclair) et passée sous administration allemande, le 15 septembre 1940.

D’autres pays font les frais de cet impérialisme qui redessine la carte de l’Europe. En vertu du pacte tripartite signé le 27 septembre 1940, donnant à l’Allemagne, à l’Italie et au Japon le droit à l’« espace vital » dont chacun a besoin et par le jeu des empires coloniaux, c’est le monde que les trois dictateurs, Hitler, Mussolini et Hiro-Hito veulent se partager. En un quart de siècle, incluant l’instauration de régimes communistes et leur cortège de persécutions, « soixante-dix millions d’Européens, hommes, femmes et enfants, ont été déracinés, déportés et tués », écrira Albert Camus.

« Maréchal, nous voilà ! / Devant toi, le sauveur de la France !
Nous jurons, nous tes gars / De servir et de suivre tes pas !
Maréchal, vous voilà ! / Tu nous as redonné l’espérance ! »2778

André MONTAGNARD (1887-1963), paroles, et Charles COURTIOUX (1880-1946), musique, Maréchal, nous voilà, chanson

Autre rêve, autre France ! Chanson témoin d’une époque et reflet d’un régime, on la fait chanter aux enfants des écoles et elle passe quotidiennement à la radio, interprétée par André Dassary, plus tard mis en cause. La « collaboration » des artistes sous l’Occupation est un phénomène complexe : la plupart, auteurs, acteurs, chanteurs, réalisateurs, font un métier qu’ils aiment, avant d’aimer les Allemands.

« Or, du fond de la nuit, nous témoignons encore
De la splendeur du jour et de tous ses présents.
Si nous ne dormons pas, c’est pour guetter l’aurore
Qui prouvera qu’enfin nous vivons au présent. »2804

Robert DESNOS (1900-1945), « Demain », État de veille (1943)

Même chemin qu’Éluard et Aragon : après le surréalisme, l’engagement, le communisme, puis la Résistance et les poèmes de l’espoir. Cependant, les Français souffrent plus que jamais en 1943 : l’ordre allemand s’impose avec les SS et la Gestapo, les restrictions, le système des otages, les déportations, les délations. Mais le poète donne toujours de la voix : « Nous parlons à voix basse et nous tendons l’oreille […] / Âgé de cent mille ans, j’aurai encore la force / De t’attendre, ô demain pressenti par l’espoir. » Desnos mourra en déportation.

« Qu’entre la mer du Nord et la Méditerranée, depuis l’Atlantique jusqu’au Rhin, soit libérée de l’ennemi cette nation […] Nous rapportons à la France l’indépendance, l’empire et l’épée. »2816

Charles de GAULLE (1890-1970), Mémoires de guerre, tome II, L’Unité, 1942-1944 (1956)

Le « fou » cher à Mauriac avait finalement raison ! Après le débarquement en Normandie et avant la libération de Paris, un second débarquement a été mené en Provence par les Américains et la Première Armée française (de Lattre de Tassigny) le 15 août 1944. Ces forces remontent par les Alpes et la vallée du Rhône pour faire la jonction avec celles du nord le 12 septembre. L’insurrection des villes et l’action des FFI précèdent ou achèvent l’œuvre des forces de libération.

La libération du territoire, commencée aux rives de la Corse (septembre 1943), s’achève dans l’Est, le 23 novembre 1944 à Strasbourg. L’honneur en revient à la division Leclerc. De Lattre de Tassigny libérera la Haute-Alsace (dernières poches occupées) au début de 1945, avec le colonel Berger (alias Malraux) commandant la brigade Alsace-Lorraine.

QUATRIÈME RÉPUBLIQUE

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« Considérant que la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde (…) l’Assemblée générale proclame la présente Déclaration universelle des droits de l’homme comme l’idéal commun à atteindre par tous les peuples et toutes les nations (…) »

Préambule de la Déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations-Unies le 10 décembre 1948 à Paris, au Palais de Chaillot

Article 1 : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. » On retrouve la trinité républicaine de la Révolution française votée dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789. Même utopie juridique devenue littéralement universelle, traduite aujourd’hui dans plus de 500 langues différentes. Pour commémorer son adoption, la Journée mondiale des droits de l’homme est célébrée chaque année le 10 décembre.

« L’internationalisme qui fut un beau rêve n’est plus que l’illusion têtue de quelques trotskistes. »2833

Jean-Paul SARTRE (1905-1980), Situations III (1949)

Pendant dix ans, de la Libération aux événements de Budapest, c’est l’époque des maîtres à penser et des engagements impératifs. Sartre règne en maître contestataire et d’ailleurs contesté. Le communisme séduit encore nombre d’intellectuels, même s’il faut renoncer à l’union des peuples, au-delà des frontières.

« Le socialisme, c’est un rêve. Il n’existe nulle part. Les pays que nous appelons socialistes aujourd’hui ne le sont pas du tout. »

Simone de BEAUVOIR (1908-1986), interview dans Le Monde, 10 janvier 1978

Aveu politique en relation avec sa lutte féministe : « J’ai pensé que la victoire des femmes serait liée à l’avènement du socialisme. » C’est naturellement l’auteur du Deuxième sexe (1949) qui s’exprime, mais c’est aussi « Notre-Dame de Sartre » qui restera toujours fidèle à sa pensée.

« Choisir, pour une femme, la morale de gauche, c’est voter pour l’homme réel contre le mythe du Prince Charmant, pour le droit de vivre contre le droit de rêver. »2903

Françoise GIROUD (1916-2003), « Voter pour le Prince Charmant », l’Express, 18 décembre 1955

La journaliste tente de mobiliser l’électorat féminin en lui prouvant à quel point gauche et droite font la différence dans sa vie quotidienne. Résultat des élections du 2 janvier 1956 ? Percée des poujadistes, effondrement des gaullistes, renforcement des communistes (exclus du gouvernement). Les partis classiques de la Quatrième se retrouvent plus ou moins perdants (SFIO, radicaux, MRP) ou gagnants (indépendants et modérés). Aucune majorité ne se dégage vraiment, mais le PCF est redevenu premier parti de France. Le président René Coty aurait pu s’adresser à Mendès France ou Christian Pineau pour former le gouvernement, mais il leur préfère Guy Mollet, secrétaire du Parti socialiste.

« Ce que nous voulons, c’est inventer en permanence de l’utopie concrète. »2956

Gilbert TRIGANO (1920-2001). Manager en toutes lettres (2009), François Aélion

Manager très médiatisé du Club Méditerranée, ex-militant communiste rêvant de faire du Club une « société sans classe, sans frontière, sans lois » et « d’y faire vivre nos adhérents dans une économie et une psychologie d’abondance », il invente une forme de vacances qui séduira des « gentils membres » par millions. Va-t-on Vers une civilisation du loisir ? Le sociologue Joffre Dumazedier s’interroge, dans ce célèbre essai daté de 1962. Le poste « loisirs » est en progrès constant dans la consommation des ménages, mais sa composition change et surtout se diversifie, à l’image des nouvelles pratiques de consommateurs toujours plus sollicités, courtisés, voire harcelés. Ce n’est qu’un début…

CINQUIÈME RÉPUBLIQUE SOUS DE GAULLE

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« Oui, c’est l’Europe depuis l’Atlantique jusqu’à l’Oural, c’est l’Europe, toutes ces vieilles terres où naquit, où fleurit la civilisation moderne, c’est toute l’Europe qui décidera du destin du monde. »2987

Charles de GAULLE (1890-1970), Discours de Strasbourg, 23 novembre 1959. De Gaulle et l’Europe (1963), Roger Massip

Autre problème majeur, mais question toujours posée au XXIe siècle. De quelle Europe s’agit-il ? Un an plus tôt, de Gaulle écrit à Paul Reynaud : « Vous savez qu’à mon sens, on peut voir l’Europe et peut-être la faire de deux façons : l’intégration par le supranational, ou la coopération des États et des nations. C’est à la deuxième que j’adhère. »

Le discours de Strasbourg reste prophétique sur un autre plan. L’Europe a vécu la réunification de l’Allemagne et la réconciliation entre les deux pays jadis ennemis, devenus alliés. Plus globalement, la guerre froide et le communisme dans sa version soviétique appartiennent à un passé révolu. L’idée de « maison commune » européenne et de cette Europe « de l’Atlantique à l’Oural » ne relève plus de l’utopie. La guerre en Ukraine la renforce plus qu’elle ne la contredit.

« Hourra pour la France ! Depuis ce matin, elle est plus forte et plus fière. »2991

Charles de GAULLE (1890-1970), Télégramme, 13 février 1960. De Gaulle : le souverain, 1959-1970 (1986), Jean Lacouture

Première explosion de la bombe A française à Reggane (Sahara). C’est une étape dans la politique d’indépendance militaire du général qui se refuse à la « docilité atlantique » et veut doter le pays des « moyens modernes de la dissuasion ». La France entre ainsi dans le club encore très fermé des puissances atomiques. Elle refusera de signer le traité de Moscou du 3 août 1963 sur la non-prolifération nucléaire. Le 28 août 1968, c’est l’explosion de la première bombe H dans le Pacifique.

MAI 68, LA PETITE RÉVOLUTION DES « ANNEES DE RÊVE »

L’imagination au pouvoir.
Exagérer, c’est commencer d’inventer.
Prenez vos désirs pour des réalités.
Faites l’amour, pas la guerre.2952

Slogans de Mai 68. Génération, tome I, Les Années de rêve (1987), Hervé Hamon, Patrick Rotman

Les sociologues ont commenté à l’infini ces mots qui restent dans la mémoire collective, bien au-delà de la génération spontanée qui les créa, entre barricades bon enfant, manifs en chaîne et grèves de la joie. Fait remarquable, la plupart des slogans proposent le rêve d’une autre vie.

Sous les pavés, la plage.3044

Slogan de la nuit du 10 au 11 mai 1968. Génération, tome I, Les Années de rêve (1987), Hervé Hamon, Patrick Rotman

Première nuit d’émeute, dite nuit des Barricades : des dizaines se dressent, barrant petites rues et grandes artères du Quartier latin (boulevard Saint-Michel, rue Gay-Lussac), entassements de voitures et pavés, arbres et palissades, matériaux volés aux chantiers voisins. Le samedi 11, aux aurores et en trois heures de combat, la police vient à bout de la résistance étudiante : centaines de blessés, dégâts matériels considérables. L’opinion bascule du côté des jeunes et juge la police plus sévèrement que les manifestants. Récits vibrants, rumeurs incontrôlables, fracas de guérilla sur les ondes radio font croire au pays que le cœur de Paris est en guerre.

Les centrales ouvrières et la FEN (Fédération de l’éducation nationale, appelée la forteresse enseignante pour son pouvoir) appellent à la grève générale pour le surlendemain, lundi 13 mai.

Soyez réalistes, demandez l’impossible.3051

Slogan à Censier (annexe de la Sorbonne), 14 mai 1968.Génération, tome I, Les Années de rêve (1987), Hervé Hamon, Patrick Rotman

Que répondre à cette logique !? Les professeurs, les politiques, les commentateurs sont dépassés, mais les acteurs et les auteurs de Mai 68 ne le sont pas moins.

CINQUIÈME RÉPUBLIQUE APRÈS DE GAULLE

« C’est un petit pas pour l’homme, mais un grand bond pour l’humanité. »3115

Neil ARMSTRONG (1930-2012), premiers mots en direct de la Lune, 21 juillet 1969

L’astronaute américain pose une plaque en forme de message : « Ici, des hommes de la planète Terre ont mis pour la première fois le pied sur la Lune en juillet 1969 après J.-C., nous sommes venus pacifiquement au nom de toute l’Humanité. » L’humanité oublie d’être blasée et assiste en temps réel à ce rêve aussi vieux qu’elle, devenu réalité.

La conquête spatiale, prodige de technologie, est aussi, ou d’abord, un enjeu politique, dans la « guerre froide » entre les États-Unis d’Amérique (incarnation du capitalisme) et l’Union soviétique (chantre du communisme). L’URSS a tiré la première, en lançant Spoutnik 1 en 1957, puis l’Amérique s’est rattrapée l’année suivante, avec Explorer 1. En 1961, le premier homme dans l’espace est russe, Youri Gagarine. Mais avec Apollo 11 qui décolle de Cap Kennedy en Floride, c’est un Américain qui marche enfin sur le sol lunaire.

Les explorations lunaires sont abandonnées au cours des années 1970, par les Américains comme par les Soviétiques. Mais la conquête de l’espace continue et la France y a sa place. En 1961, de Gaulle a créé le Centre national d’études spatiales, et le CNES est devenu un acteur majeur de l’Europe spatiale : après l’échec d’Europa, trop lourd, trop coûteux, trop ambitieux, Ariane 1 est le premier modèle d’une famille de lanceurs qui place l’Europe en tête du marché mondial, au XXIe siècle. Une incontestable réussite, en termes d’emplois, de progrès économique et de recherche scientifique.

« Il y a peu de moments dans l’existence d’un peuple où il puisse autrement qu’en rêve se dire : Quelle est la société dans laquelle je veux vivre ? J’ai le sentiment que nous abordons un de ces moments. Nous pouvons donc entreprendre de construire une nouvelle société. »3116

Jacques CHABAN-DELMAS (1915-2000), Discours à l’Assemblée nationale, 16 septembre 1969

Aucun discours parlementaire de Premier ministre n’eut plus de retentissement, sous la Cinquième République. La dénonciation du « conservatisme » et des « blocages » de la société française annonce un programme ambitieux de réformes – maître mot des quatre prochains présidents, mais malheureusement pas de Pompidou, aux priorités plus concrètes que sociétales !

Chaban-Delmas, dans L’Ardeur (1975), donne de sa « nouvelle société » deux définitions : « L’une politique, c’est une société qui tend vers plus de justice et de liberté […] L’autre sociologique, c’est une société où chacun considère chacun comme un partenaire ».

« La France bougonne, grommelle, conteste, se bat et se survit. En 1970, les rêves se tarissent et s’opposent. À l’époque de la voiture et du Frigidaire, de la vente à crédit et des loisirs collectifs, là où des observateurs pondérés attendaient une génération raisonnable, la France découvre le romantisme de l’illégalité. »3120

Michel-Antoine BURNIER (né en 1942) et Bernard KOUCHNER (né en 1939), La France sauvage (1970)

Kouchner, médecin, militant, journaliste, entré en politique à 14 ans, au côté du FLN et contre l’OAS dans la guerre d’Algérie, va se faire connaître comme «  french doctor », fondateur de Médecins sans Frontières (puis Médecins du Monde). Partagé entre engagement politique et mission humanitaire, se revendiquant à la fois « communiste et Rastignac », revenu du Biafra en guerre et de Cuba sous le signe de Castro, le jeune trentenaire témoigne ici sur l’état de son pays, avec Burnier, son ami, son frère de combat, bientôt son biographe.

La France vit un étrange paradoxe : jamais gouvernement ne fut plus soucieux d’établir le dialogue et jamais société n’a paru plus cloisonnée, « bloquée », selon le diagnostic du sociologue Michel Crozier.

Chaban-Delmas dira souvent qu’il est à la tête du meilleur des gouvernements réformistes, mais dans la pire des situations émeutières, plus grave que le folklore bon enfant qui colorait la plupart des manifestations de Mai 68.

« Comment ne pas rêver à une société idéale où des hommes égaux et justes dans une cité ordonnée par leurs soins se répartiraient les fruits de leur travail, toute forme de profit écartée, quand il n’y a autour de soi qu’exploitation de l’homme par l’homme. »3195

François MITTERRAND (1916-1996), Ici et maintenant (1980)

Dernier écrit avant son élection à la présidence de la République : il donne à rêver au « socialisme à la française », qui emprunte à l’utopie sociale et à la théorie marxiste, et qu’il voudrait exemplaire pour le monde, ici et maintenant.

Refondateur du PS, homme de la mythique et défunte Union de la gauche, challenger courageux face à de Gaulle en 1965 et s’opposant au gaullisme toujours vivant, Mitterrand a acquis une stature d’homme d’État. Il doit cependant compter avec Michel Rocard qui pose sa candidature à la présidence le 19 octobre 1980 et qui le dépasse dans les sondages.

« Je vous demande de vous souvenir de ceci : pendant ces sept ans, j’avais un rêve. »3206

Valéry GISCARD D’ESTAING (1926-2020), message télévisé au pays, 19 mai 1981

Son adversaire a donc gagné le 10 mai, avec 51,75 % des suffrages exprimés. Selon les commentateurs, Mitterrand doit sa victoire à la discipline communiste, à un transfert d’électeurs chiraquiens, au report d’une majorité d’écologistes. Ajoutons : à son entêtement et son talent personnel, et au slogan de Jacques Séguéla, « la force tranquille », puisque la publicité politique fait une entrée médiatique dans l’histoire.

Le ton du président sortant se veut apaisé, serein, mais ce jeune retraité (55 ans) demeure à la disposition du pays. « Et dans ces temps difficiles, où le mal rôde et frappe dans le monde, je souhaite que la Providence veille sur la France, pour son bonheur, pour son bien et pour sa grandeur. Au revoir ! » Un fauteuil vide reste en gros plan, cependant qu’il s’éloigne de dos et sort du champ de la caméra. Une sortie de scène bien jouée, presque trop. VGE a souffert de cet échec, il en a beaucoup parlé, pour finalement conclure : « Aucun roi de France n’aurait été réélu au bout de sept ans. »

« Il est dans la nature d’une grande nation de concevoir de grands desseins. Dans le monde d’aujourd’hui, quelle plus haute exigence pour notre pays que de réaliser la nouvelle alliance du socialisme et de la liberté, quelle plus belle ambition que l’offrir au monde de demain ? »3208

François MITTERRAND (1916-1996), Discours d’investiture à l’Élysée, 21 mai 1981

Le nouveau président doit rassurer ceux qui ne l’ont pas élu et craignent les réformes annoncées dans son programme électoral (nationalisations, impôt sur les grandes fortunes…). Il poursuit et précise : « C’est convaincre qui m’importe et non vaincre. Il n’y a eu qu’un vainqueur le 10 mai 1981, c’est l’espoir. Puisse-t-il devenir la chose de France la mieux partagée ! » Ce souci de réunir tous les Français fait partie du discours (et du dessein politique) de chaque président élu. Mais Mitterrand se distingue du fait qu’il incarne la gauche au pouvoir pour la première fois sous la Cinquième : « Quand la France rencontre une grande idée, elles font ensemble le tour du monde », a-t-il écrit en 1980 (Ici et maintenant). Et sa « grande idée », c’est de rester dans l’histoire comme l’homme du « socialisme à la française ».

« Regarde : Quelque chose a changé. / L’air semble plus léger.
C’est indéfinissable.
Un homme, Une rose à la main, / A ouvert le chemin,
Vers un autre demain…
Regarde : Au ciel de notre histoire,
Une rose, à nos mémoires, / Dessine le mot espoir ! »

BARBARA (1930-1997), Regarde. Chanson dédiée à François Mitterrand et ovationnée en novembre 1981 à l’hippodrome de Pantin, emplacement actuel du Zénith de Paris

Beaucoup d’artistes ont accompagné le président en campagne et au lendemain de sa victoire, mais les mots, la musique, l’émotion de Barbara étonnent toujours et résonnent encore (sur You Tube, Daily Motion) : « Regarde : C’est fanfare et musique, / Tintamarre et magique, / Féerie féerique. / Regarde : Moins chagrins, moins voûtés, / Tous, ils semblent danser, / Leur vie recommencée. / Regarde : On pourrait encore y croire. / Il suffit de le vouloir, / Avant qu’il ne soit trop tard. / Regarde : On en a tellement rêvé, / Que sur les mur bétonnés, / Poussent des fleurs de papier […] / Regarde : On a envie de se parler, De s’aimer, de se toucher, / Et de tout recommencer. / Regarde : Plantée dans la grisaille, / Par-delà les murailles, / C’est la fête retrouvée… »

« On ne peut gouverner un peuple sans le faire rêver. »3212

Jacques ATTALI (né en 1943), La Vie éternelle (1989)

Conseiller personnel du président Mitterrand depuis 1981, auteur de nombreux essais très intellectuels, cette phrase figure dans son premier roman. Quant au rêve, c’est une idée récurrente en politique. Il semble que la gauche ait, sinon le monopole, du moins une vocation plus affirmée pour le rêve, laissant à la droite la voix (ou voie) plus ingrate du réalisme.

« Je rêve d’un pays où l’on se parle à nouveau. »3277

Michel ROCARD (1930-2016), Premier ministre, Assemblée nationale, 29 juin 1988

Dans sa déclaration de politique générale, le nouveau chef de gouvernement prend acte de l’évolution de la société française. Il ne s’agit plus comme en Mai 68 et dans le Programme commun de 1972 de « changer la vie », mais de changer la vie quotidienne : « Je rêve de villes où les tensions sont moindres. Je rêve d’une politique où l’on soit attentif à ce qui est dit, plutôt qu’à qui le dit. Je rêve tout simplement d’un pays ambitieux dont tous les habitants redécouvrent le sens du dialogue – pourquoi pas de la fête ? – et de la liberté. »

L’homme de la « deuxième gauche » a beaucoup rêvé, mais les hommes et les circonstances ont freiné ses ambitions et contrarié ses intuitions. Mitterrand et Rocard se sont affrontés dans le passé. Leur coexistence ne sera pas simple ni pacifique.

« La France est notre patrie, l’Europe est notre avenir. »3279

François MITTERRAND (1916-1996), campagne pour les élections européennes de juin 1989. Mitterrand : une histoire de Français (1998), Jean Lacouture

Prononcés en janvier 1989, ces mots seront souvent repris - à l’époque, l’incertitude porte essentiellement sur le devenir de l’Europe de l’Est, communiste pour quelques mois encore. L’Europe est plus que jamais l’avenir, même si la réalité européenne est toujours en crise. Institutions bloquées, méfiance face à cette forme de globalisation qui entraîne délocalisations, insécurité sociale, suspicions nationales. L’Union européenne reste malgré tout un gage de paix avec la réconciliation devenue amitié franco-allemande, et l’euro, monnaie unique pratiquement acceptée de tous.

La fin du communisme et la critique du capitalisme laissent ouvert un vaste chantier, avec la question de l’identité européenne et des frontières. La foi européenne n’est plus ce qu’elle était, mais peu de causes mobilisent durablement.

« Ce qui s’est fait sous le nom d’Union européenne ne ressemble à rien de connu jusqu’ici. Sans cohésion politique ni identité commune, c’est essentiellement un espace de paix régi par le droit. Il faut rappeler inlassablement que la paix n’est ni fatale ni même naturelle en Europe. Ce « machin » à 25 nations qui rend toute guerre impossible entre elles est historiquement déjà miraculeux. »2968

Michel ROCARD (1930-2016), point de vue sur l’Europe, paru dans Le Monde du 28 novembre 2003

(Le « machin » fait allusion à l’expression du général de Gaulle pour qualifier l’ONU, et non l’Europe). Rocard le socialiste est un européen convaincu et toujours militant pour dire notre « besoin d’Europe », avec des arguments comparables à ceux du centriste François Bayrou.

Bien au-delà de l’intérêt économique qu’on peut éternellement discuter dans la situation de crise qui frappe presque tous les pays européens depuis 2008, l’argument de la paix demeure indiscutable et doit être sans cesse mis en avant pour les nouvelles générations qui n’ont pas connu la guerre. Le prix Nobel de la paix attribué à cette Union européenne le 12 octobre 2012 viendra consacrer cette évidence. La guerre en Ukraine ne fait que la renforcer.

La France black blanc beur.3349

Slogan du 12 juillet 1998. Qu’est-ce que la France ? (2007), Alain Finkielkraut

Victoire ! Et divine diversion ! Ce soir-là, ivre de joie, la France fête sa première Coupe du monde gagnée par son équipe « black-blanc-beur », avec Zinédine Zidane en tête d’affiche, Zizou de légende comme le sport en crée toujours.

Que reste-t-il de ce moment de fraternité, les Champs-Élysées envahis par une foule bigarrée, cette France idéalement métissée ? « Ça n’a duré qu’un été » selon Ludovic Lestrelin, maître de conférences en STAPS (Sciences et techniques des activités physiques et sportives). « Un bel élan unanime a salué la victoire d’un État-nation, d’un modèle d’intégration, pas seulement d’une équipe. » Les grands rendez-vous sportifs, tels les JO et les Coupes du monde, génèrent des mouvements collectifs très forts, mais éphémères. Et de tous les sports, le foot est celui dont la magie opère le plus spectaculairement. En 2022, c’est l’Argentine qui nous en donne la preuve.

« Il est temps de reprendre le rêve français. »3440

François HOLLANDE (né en 1954), Discours de Lorient, 27 juin 2009

Il annonce ainsi sa volonté de poursuivre son engagement au service de la France comme candidat à la présidentielle. Il passera aux primaires du PS. Il entre peu à peu dans le rôle. Il possédait le fond, il acquiert la forme. C’est l’apprentissage du pouvoir, après un long retard passé dans les coulisses à l’ombre des autres : « Je ne suis plus dans les petits rôles ou dans les personnages secondaires. » Il apprend vite et y prend plaisir : « Certains jours, il faut que l’on me retienne pour que je ne me précipite pas au-devant des micros ! » Il reprendra ce thème du rêve qui lui est cher et si peu sarkozyste !

« Un président qui donne aux Français confiance, respect et espoir, qui a donc la hauteur nécessaire pour incarner la France et l’humilité indispensable pour être au plus près des citoyens. »3458

François HOLLANDE (né en 1954), AFP, 16 juillet 2011

Le futur candidat fait son autoportrait, s’opposant naturellement à l’hyperprésident président Sarkozy en place, espérant aller au-devant du désir des Français. Il se positionne aussi parmi les autres prétendants, en vue des primaires socialistes. Il sortira gagnant, mais il ne se représentera même pas en 2017, sûr de perdre face au nouveau candidat qu’il connaît bien.

« Il faut des jeunes Français qui aient envie de devenir milliardaires. »

Emmanuel MACRON (né en 1977), ministre de l’Économie, les Échos, 7 janvier 2015

Le rêve français ne peut se résumer à cette profession de foi économique, même si le souci du niveau de vie est récurrent dans les sondages en 2022, aggravé par le retour de l’inflation, ce mal français qu’on croyait réservé au passé. Mais la succession des crises a rendu les milliardaires plus riches et les pauvres plus pauvres, malgré toutes les aides publiques. Cette fracture sociale est fatalement ressentie comme une injustice.

« C’est le foot, c’est le sport mais ça, vous n’y pouvez rien. Vous avez eu le cœur, la faim, l’envie et le talent d’y aller. Rien que pour ça je voulais venir vous voir et vous dire merci. Vous avez fait rêver des Françaises et des Français qui en avaient besoin. Donc merci à vous. »

Emmanuel MACRON (né en 1977), bref discours présidentiel du 18 décembre 2022 aux joueurs, suite à la finale perdue de la Coupe du monde de football au Qatar

Déclaration évidente ou intervention contestée ? Ne commentons pas cette actualité, même si toute citation peut avoir vocation politique, sinon historique.

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