Tocqueville : « Le sentiment de l'instabilité, ce sentiment précurseur des révolutions, existe à un degré très redoutable dans le pays. » | L’Histoire en citations
Chronique du jour

 

Monarchie de Juillet

La révolution en marche.

La « campagne des banquets » tourne habilement l’interdiction de réunion. En interdisant le banquet de clôture de la campagne électorale, le roi met le feu aux poudres. Une manifestation de rue dégénère en émeute. Louis-Philippe, vieilli et découragé, refuse le plan de Thiers pour « pacifier Paris » et abdique le 24 février 1848, pendant que les insurgés proclament la République.

Les commentaires sont allégés, les coupes signalées (…) Retrouvez l’intégralité dans nos Chroniques de l’Histoire en citations.

« Le sentiment de l’instabilité, ce sentiment précurseur des révolutions, existe à un degré très redoutable dans le pays. »2125

Alexis de TOCQUEVILLE (1805-1859), Chambre des députés, 27 janvier 1848

Grands moments d’éloquences parlementaire [en ligne], Assemblée nationale.

Historien, rendu célèbre par son grand essai, De la démocratie en Amérique, il s’est jeté dans la vie politique, comme nombre de ses confrères. Lui aussi a une vue claire de la situation. Mais Louis-Philippe reste aveugle, comme le chef du gouvernement. Lamennais a eu ce mot prémonitoire en 1843 : « C’est Guizot qui doit conduire la monarchie de Louis-Philippe à son dernier gîte. Il est né fossoyeur. »

« Ils voulaient un banquet. Ils n’en auront même pas les miettes ! »2126

LOUIS-PHILIPPE (1773-1850), interdisant le banquet de clôture de la campagne

La campagne des Banquets – 70 réunissant au total quelque 20 000 convives – commença bien, puis tourna mal. Ledru-Rollin le radical, l’un des chefs de file de la campagne, s’apprête à demander le suffrage universel – qui a peu de partisans, et aucun exemple dans le monde (…) Le climat est tel que tout peut arriver, et dégénérer.

« Une révolution ! une révolution ! On voit bien que vous êtes étranger au gouvernement et que vous ne connaissez pas ses forces. »2127

Adolphe THIERS (1797-1877), au comte de Falloux, le soir du défilé du 21 février 1848

Le comte prédit la révolution imminente. Thiers dit n’importe quoi : même s’il compte sur la garde nationale pour maintenir l’ordre, il ne pense qu’à faire chuter le gouvernement Guizot (son rival, en place depuis sept ans), il a encouragé la campagne des Banquets et se découvre des ardeurs républicaines (…) La révolution commence le lendemain, avec les premières barricades.

« Par la voix du canon d’alarme,
La France appelle ses enfants.
« Allons, dit le soldat, Aux armes !
C’est ma mère, je la défends. »
Mourir pour la patrie,
C’est le sort le plus beau,
Le plus digne d’envie. »2128

Auguste MAQUET (1813-1888), paroles, et Alphonse Varney (1811-1879), musique, Chant des Girondins (1847), entonné le 22 février 1848 au matin, place de la Concorde. Chansons nationales et populaires de France (1850), Théophile Marion Dumersan

Chœur tiré du Chevalier de Maison-Rouge, version théâtrale du roman historico-héroïco-révolutionnaire signé Dumas et Maquet. Succès populaire, le soir de la première représentation, ce morceau va devenir « la Marseillaise de la Révolution de 1848 ». Il est chanté pour la première fois au matin du 22 février, par les Parisiens venus en masse à la Concorde, ignorant l’interdiction du dernier banquet et du défilé, décommandés. La foule commence à crier : « À bas Guizot ! » (…)

« Louis-Philippe tend la main droite et montre le poing gauche. »2129

Victor HUGO (1802-1885), Choses vues, 1847-1848 (posthume)

Le roi comprend la gravité de la situation, le 23 février 1848. Le matin, 16 soldats tués à l’assaut d’une barricade, rue Quincampoix (…) La garde nationale sympathise avec les émeutiers. Il renvoie Guizot, appelle Molé. Paris illumine, la rue semble se calmer (…) Mais les républicains ne veulent pas laisser passer l’occasion (…) La fusillade des Capucines laisse plus de 50 cadavres sur le pavé. Le roi se résigne à appeler Thiers qu’il n’aime guère (…) C’est la main droite tendue. Dans le même temps, ili met le maréchal Bugeaud à la tête de l’armée : le pacificateur de l’Algérie va pacifier Paris, pense-t-il. C’est le poing gauche.

« La liberté, cette vierge féconde
Vous voudriez l’étrangler au berceau
Et que son nom fût effacé du monde. »2130

Pierre DUPONT (1821-1870), La Chanson du banquet

Pierre Dupont, ex-apprenti canut, l’un des premiers chansonniers de la classe ouvrière, s’insurge contre la répression des journées de février 1848. Et devant l’émeute qui continue, le roi demande : « Quel vent a soufflé sur Paris ? »

« Partout on travaille activement aux barricades déjà formidables. C’est plus qu’une émeute, cette fois, c’est une insurrection. »2131

Victor HUGO (1802-1885), Choses vues, 24 février 1848 (posthume)

Lamartine, Dumas, Flaubert, Baudelaire, George Sand (…) sont témoins, parfois acteurs et enthousiastes. Hugo vibre à ces nouvelles journées des Barricades, toujours aux premières loges – après les Trois Glorieuses de 1830 et l’insurrection républicaine de 1832, célébrée dans les Misérables (…) Thiers a un plan, celui qu’il appliquera contre les communards en 1871 (…) Le roi ne peut s’y résoudre.

« J’abdique cette couronne, que la voix nationale m’avait appelé à porter, en faveur de mon petit-fils le comte de Paris. Puisse-t-il réussir dans la grande tâche qui lui échoit aujourd’hui. »2132

LOUIS-PHILIPPE (1773-1850), 24 février 1848

Le roi refuse le plan de Thiers : s’enfuir à Saint-Cloud et reconquérir Paris à la tête de l’armée. L’idée de faire couler le sang l’horrifie, comme Louis XVI en son temps. Et il est vieux, fatigué, découragé depuis la mort de son fils préféré en 1842 (…) Émile de Girardin, directeur de La Presse, vient lui souffler la solution, le mot tabou, que son entourage n’ose prononcer : abdication. Il s’y résout, et il écrit l’acte, alors que la foule menace de forcer les grilles des Tuileries (…)

« La populace ne peut faire que des émeutes. Pour faire une révolution, il faut le peuple. »2133

Victor HUGO (1802-1885), Tas de pierres (posthume)

Hugo, le grand témoin des événements, observe le corps social malade : « Je continue de tâter le pouls à la situation. » Et il oppose, comme il aime faire dans ses œuvres de fiction, le bien et le mal, le peuple glorieux et la populace méprisable.

« Fils de Saint Louis, montez en fiacre. »2134

Mot célèbre et anonyme. Dictionnaire des citations françaises et étrangères, Larousse

Devant le château des Tuileries, le roi s’apprête à monter en voiture. Un homme du peuple lui aurait ouvert la porte et lancé ce mot par dérision. Paraphrase du « Fils de Saint Louis, montez au ciel », derniers mots de l’abbé Edgeworth de Firmont, confesseur de Louis XVI, au roi montant sur l’échafaud en 1793. Louis-Philippe ne part que pour l’exil, en Angleterre, où il mourra deux ans plus tard (…)

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