Marie-Antoinette : « Nous avons plus grand besoin d’un vaisseau que d’un collier. » | L’Histoire en citations
Chronique du jour

 

Siècle des Lumières. Règne de Louis XVI.

L’Affaire du Collier de la Reine (1786).

Un fait divers romanesque (simple escroquerie) tourne à l’affaire d’État, dans un contexte prérévolutionnaire. La cote de popularité de Marie-Antoinette s’effondre, Louis XVI bénéficie encore d’un sursis. Calonne, ministre des Finances, a enfin compris la gravité de la situation et souffle au roi une « fausse bonne idée » qui va faire illusion.

En fait, la monarchie court désormais à l’abîme. Les antagonismes se sont durcis entre classes, les disettes face au luxe affiché à la cour provoquent des émeutes populaires, la situation financière est aggravée par les frais de la très coûteuse guerre en Amérique. La bourgeoisie des Lumières, informée par les écrits des philosophes révolutionnaires malgré eux, fait un triomphe au théâtre impertinent de Beaumarchais qui défie la censure, avec son Mariage de Figaro.

Les commentaires sont allégés, les coupes signalées (…) Retrouvez l’intégralité dans nos Chroniques de l’Histoire en citations.

« Nous avons plus grand besoin d’un vaisseau que d’un collier. »1238

MARIE-ANTOINETTE (1755-1793), aux joailliers de la couronne, Boehmer et Bassenge. Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette (1823), Madame Campan

La reine, quoique toujours coquette et fort dépensière, a refusé une somptueuse parure de 540 diamants d’une valeur de 1 600 000 livres – c’est même le prix de deux vaisseaux de guerre. Étonnante réaction de l’« étrangère » accusée de ruiner la France ! (…) Début d’une escroquerie dont Dumas tirera un roman et qui va devenir, dès l’année suivante, l’historique « affaire du Collier de la reine ».

« Corse de caractère et de nation, ce jeune homme ira loin, s’il est favorisé par les circonstances. »1239

Avis du professeur d’histoire de Napoléon Bonaparte en 1785. Histoire de la vie politique, militaire et privée de Napoléon Bonaparte (1825), L.-E. Chennechot

L’élève officier de 16 ans n’est pourtant classé que 42e sur une promotion de 58, et affecté comme sous-lieutenant d’artillerie.

« Le mur murant Paris rend Paris murmurant. »1240

Alexandrin cité par beaumarchais (1732-1799) évoquant l’impopularité du mur en 1785, au point d’en faire une des causes de la Révolution. Histoire des agrandissements de Paris (1860), Auguste Descauriet

C’est le mur des Fermiers généraux, enceinte de 24 km avec une soixantaine de passages (ou barrières) flanqués de bureaux d’octroi – impôt perçu à l’entrée des marchandises. Calonne (aux Finances) a donné satisfaction aux fermiers généraux : pouvant mieux réprimer les fraudes, notamment la contrebande sur le sel au nez des gabelous (commis de la gabelle), ils verseront davantage au Trésor (…) Mur achevé sous la Révolution (…) démoli par le préfet Haussmann, Paris s’agrandissant de 11 à 20 arrondissements.

« Notre Saint Père l’a rougi,
Le roi de France l’a noirci,
Le Parlement le blanchira,
Alleluya. »1241

Alleluya sur l’affaire du Collier (1786), chanson. La Bastille dévoilée ou Recueil de pièces authentiques pour servir à son histoire (1789), Charpentier, Louis-Pierre Manuel

L’Affaire éclate quand, le cardinal de Rohan ne pouvant couvrir une échéance en juillet 1785, les bijoutiers adressent la facture à la reine qui n’a jamais touché aux diamants – revendus au détail par deux escrocs. Louis XVI (…) ennemi du cardinal, porte l’affaire devant le Parlement de Paris. Rohan, plus naïf que coupable, est acquitté (…) La reine, innocente dans cette affaire (…) devient « Madame Déficit ».

« Plus scélérate qu’Agrippine
Dont les crimes sont inouïs,
Plus lubrique que Messaline,
Plus barbare que Médicis. »1242

Pamphlet contre la reine. Vers 1785. Dictionnaire critique de la Révolution française (1992), François Furet, Mona Ozouf

Dauphine adorée, reine devenue terriblement impopulaire en dix ans, pour sa légèreté de mœurs, ses intrigues, son ascendant sur un roi faible jusqu’à la soumission. L’affaire du Collier va renforcer ce sentiment. La Révolution héritera de l’œuvre de Voltaire et Rousseau, mais aussi des « basses Lumières », masse de libelles et de pamphlets à scandale (…) Marie-Antoinette devient la cible privilégiée : quelque 3 000 pamphlets la visant relèvent de l’assassinat politique.

« Grande et heureuse affaire ! Que de fange sur la crosse et sur le sceptre ! Quel triomphe pour les idées de la liberté. »1243

Emmanuel Marie FRÉTEAU de SAINT-JUST (1745-1794), conseiller au Parlement. Les Grands Procès de l’histoire (1924), Me Henri-Robert

Mirabeau dira plus tard : « Le procès du Collier a été le prélude de la Révolution. » La royauté déjà malade sort encore affaiblie de cette affaire. Et Marie-Antoinette le paiera cher, lors de son procès.

« Il est impossible d’imposer plus, ruineux d’emprunter toujours ; non suffisant de se borner aux réformes économiques. »1244

CALONNE (1734-1802), Plan d’amélioration des finances, Mémoire, 20 août 1786. La Révolution française (1922), Albert Mathiez

L’Enchanteur a commencé par rassurer les prêteurs, multiplié les projets industriels, financé les fêtes à Versailles, les spectacles à l’Opéra de Paris, dopé le commerce en diminuant les taxes (…) Mais l’emprunt coûte de plus en plus cher, les recettes n’augmentent pas comme espéré, l’inflation encourage la spéculation, les faillites se multiplient (…) Calonne a compris, mais il est bien tard.

« Mais c’est du Necker tout pur que vous me donnez là ! »1245

LOUIS XVI (1754-1793), lisant le mémoire de Calonne, d’ordinaire moins rigoureux dans sa gestion publique. Histoire de France (1874), Victor Duruy

Le roi s’étonne du changement de politique. Plus que « du Necker », c’est du Turgot (…) Un projet radical pour unifier l’administration des provinces et établir l’égalité fiscale. Mais jamais les Parlements n’accepteront de cautionner cette réforme remettant en cause tous les privilèges ! (…) Il va convaincre le roi de convoquer une Assemblée des notables pour leur présenter son projet, au début de 1787. C’est le type même de la fausse bonne idée.

« Prenons-y garde, nous aurons peut-être un jour à nous reprocher un peu trop d’indulgence pour les philosophes et pour leurs opinions […] La philosophie trop audacieuse du siècle a une arrière-pensée. »1246

LOUIS XVI (1754-1793), Lettre à M. de Malesherbes, 13 décembre 1786 (…)

Malesherbes a voulu la presse plus libre, aidé les philosophes à répandre leurs idées, permis à l’Encyclopédie de paraître (…) Plusieurs fois disgracié, il revient au Conseil du roi en 1787 et sera l’un de ses avocats en 1792. Louis XVI manifeste ici une prise de conscience tardive d’un siècle de Lumières déjà répandues dans une opinion publique toujours plus avide de réformes.

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