Michelet : « Une enfant de douze ans, une toute jeune fille, confondant la voix du cœur et la voix du ciel, conçoit l’idée étrange... » | L’Histoire en citations
Chronique du jour

 

Jeanne d’Arc, héroïne providentielle dans la Guerre de Cent Ans.

Tout semble perdu en 1429, quand Jeanne d’Arc surgit : l’épopée dure deux ans.

Forte de sa foi et son charisme, la Pucelle (17 ans) redonne confiance au dérisoire « roi de Bourges » et courage à l’armée, délivre Orléans assiégée par les Anglais, ouvre la route du sacre au Dauphin Charles, mais échoue devant Compiègne. Vendue aux Anglais, oubliée par Charles VII, emprisonnée à Rouen, elle est sitôt jugée, condamnée et brûlée vive (1431). Bergère ou princesse, le personnage entre dans la légende. Héroïne du récit national, elle inspire nombre d’artistes, d’auteurs et l’historien Michelet. La récupération politique du mythe fait encore débat.

Les commentaires sont allégés, les coupes signalées (…) Retrouvez l’intégralité dans nos Chroniques de l’Histoire en citations.

« Une enfant de douze ans, une toute jeune fille, confondant la voix du cœur et la voix du ciel, conçoit l’idée étrange, improbable, absurde si l’on veut, d’exécuter la chose que les hommes ne peuvent plus faire, de sauver son pays. »334

Jules MICHELET (1798-1874), Jeanne d’Arc (1853)

Elle lui inspire ses plus belles pages : « Née sous les murs mêmes de l’église, bercée du son des cloches et nourrie de légendes, elle fut une légende elle-même, rapide et pure, de la naissance à la mort. » (…) Princesse ou bergère, c’est un personnage providentiel qui va galvaniser les énergies, rendre l’espoir à tout un peuple et d’abord à son roi

« En nom Dieu, je ne crains pas les gens d’armes, car ma voie est ouverte ! Et s’il y en a sur ma route, Dieu Messire me fraiera la voix jusqu’au gentil Dauphin. Car c’est pour cela que je suis née. »335

JEANNE d’ARC (1412-1431), quittant Vaucouleurs, fin février 1429 (…)

Elle répond à ceux qui s’effraient en pensant qu’elle va devoir traverser la France infestée d’Anglais et de Bourguignons. À peine âgée de 17 ans, elle parvient à persuader le sire de Baudricourt, capitaine royal de Vaucouleurs, de lui donner une escorte. Et elle se met en route pour Chinon où se trouve le dauphin (…) pas encore sacré roi.

« Je viens de la part du roi des Cieux pour faire lever le siège d’Orléans et pour conduire le roi à Reims pour son couronnement et son sacre. »336

JEANNE d’ARC (1412-1431), Château de Chinon, 7 mars 1429. Jeanne d’Arc (1860), Henri Wallon

Réponse aux conseillers de Charles VII qui lui demandent pourquoi elle est venue. Curieusement, sa réponse ne semble pas surprendre les conseillers. Le lendemain, elle est conduite dans la salle du trône, au château de Chinon.

« Gentil Dauphin, j’ai nom Jeanne la Pucelle […] Mettez-moi en besogne et le pays sera bientôt soulagé. Vous recouvrerez votre royaume avec l’aide de Dieu et par mon labeur. »337

JEANNE d’ARC (1412-1431), château de Chinon, 8 mars 1429. Jeanne d’Arc, la Pucelle (1988), marquis de la Franquerie

Le dauphin, qui croit d’abord à une farce, est caché parmi ses partisans, et le comte de Clermont placé près du trône. Au lieu de se diriger vers le comte, Jeanne va directement vers Charles et lui parle ainsi, à la stupeur des témoins. Leur entretien dure une heure et restera secret, hormis la dernière phrase.

« Je vous dis, de la part de Messire, que vous êtes vrai héritier de France et fils du roi. »338

JEANNE d’ARC (1412-1431), 8 mars 1429. Jeanne d’Arc (1870), Frédéric Lock

Tels sont les derniers mots qu’elle prononce lors de l’entretien avec le dauphin, et dont elle fera état plus tard à son confesseur. Jeanne a rendu doublement confiance à Charles : il est bien le roi légitime de France et le fils également légitime de son père, lui qu’on traite toujours de bâtard.

« Dieu premier servi. »339

JEANNE d’ARC (1412-1431), devise

Ni l’Église, ni le roi, ni la France, ni rien ni personne d’autre ne passe avant Lui, « Messire Dieu », le « roi du Ciel », le « roi des Cieux », obsessionnellement invoqué ou évoqué par Jeanne, aux moments les plus glorieux ou les plus sombres de sa vie. C’est la raison même de sa passion, cette foi forte et fragile, à l’image du personnage.

« Roi d’Angleterre et vous, duc de Bedford, rendez à la Pucelle qui est ici envoyée par le roi du Ciel, les clefs de toutes les bonnes villes que vous avez prises et violées en France. »340

EANNE d’ARC (1412-1431), Lettre au roi d’Angleterre et au duc de Bedford, 22 mars 1429

Le duc de Bedford est régent, le roi d’Angleterre n’ayant que 8 ans. Par le traité de Troyes (1420), le roi cumule les deux couronnes, de France et d’Angleterre. La chevauchée fantastique de Jeanne et ses compagnons remonte la Loire pour entrer par le fleuve dans Orléans assiégée par l’ennemi, le 29 avril.

« Vous, hommes d’Angleterre, qui n’avez aucun droit en ce royaume, le roi des Cieux vous mande et ordonne par moi, Jehanne la Pucelle, que vous quittiez vos bastilles et retourniez en votre pays, ou sinon, je ferai de vous un tel hahu [dommage] qu’il y en aura éternelle mémoire. »341

JEANNE d’ARC (1412-1431), Lettre du 5 mai 1429

4 mai, à la tête de l’armée de secours envoyée par le roi et commandée par le Bâtard d’Orléans (…) Jeanne attaque la bastille Saint-Loup et l’emporte. 5 mai, fête de l’Ascension, on ne se bat pas, mais elle envoie par flèche cette nouvelle lettre. 7 mai, elle libère Orléans (…)

« Entrez hardiment parmi les Anglais ! Les Anglais ne se défendront pas et seront vaincus et il faudra avoir de bons éperons pour leur courir après ! »342

JEANNE d’ARC (1412-1431), Harangue aux capitaines, Patay, 18 juin 1429

Nouvelle victoire, défaite des archers anglais et revanche de la cavalerie française. Ensuite, Auxerre, Troyes, Chalons ouvrent la route de Reims aux Français qui ont repris confiance en leurs armes et se réapproprient leur terre de France.

« Gentil roi, or est exécuté le plaisir de Dieu qui voulait que vous vinssiez à Reims recevoir votre saint sacre, en montrant que vous êtes vrai roi et celui auquel le royaume de France doit appartenir. »343

JEANNE d’ARC (1412-1431). Jeanne d’Arc (1860), Henri Wallon

Jeanne a tenu parole, Charles est sacré à Reims le 17 juillet 1429. Charles VII peut porter son titre de roi. Plusieurs villes font allégeance : c’est « la moisson du sacre » (…) Les victoires ont permis de reconquérir une part de la « France anglaise », mais Jeanne, blessée, échoue devant Paris (…) Le 23 mai 1430, capturée devant Compiègne, elle est vendue aux Anglais pour 10 000 livres, et emprisonnée à Rouen le 14 décembre. (…)

« Jeanne, croyez-vous être en état de grâce ?
— Si je n’y suis, Dieu veuille m’y mettre ; si j’y suis, Dieu veuille m’y tenir. »344

JEANNE d’ARC (1412-1431), Rouen, procès de Jeanne d’Arc, 24 février 1431. Jeanne d’Arc (1888), Jules Michelet, Émile Bourgeois

(…) Premier procès d’« inquisition en matière de foi » (…) Qu’est-ce que l’Église lui reproche ? Le port de vêtements d’homme, sacrilège à l’époque, ses visions considérées comme imposture ou signe de sorcellerie (…)

[Question à l’accusée] « Dieu hait-il les Anglais ? — De l’amour ou de la haine que Dieu a pour les Anglais, je n’en sais rien ; mais je sais bien qu’ils seront tous boutés hors de France, excepté ceux qui y périront. »345

JEANNE d’ARC (1412-1431), Rouen, procès de Jeanne d’Arc, interrogatoire du 17 mars 1431 (…)

(…) Jeanne est rebelle au pouvoir légitime, au terme du traité de 1420. Le procès se déroule selon les règles (…) Mais la partialité est évidente dans la conduite des interrogatoires et dans la manière dont on abuse de l’ignorance de Jeanne (…)

« Me racontait l’ange, la pitié qui était au royaume de France. »346

JEANNE d’ARC (1412-1431), Rouen, procès de Jeanne d’Arc, 9e interrogatoire du 15 mars 1431 (…)

Elle évoque longuement et à plusieurs reprises ses voix, et rapporte ce que lui disait saint Michel. L’extrême piété est ce qui frappe le plus, dans les témoignages relatifs aux premières années de Jeanne.

[Question à l’accusée] « Pourquoi votre étendard fut-il porté en l’église de Reims au sacre, plutôt que ceux des autres capitaines ? — Il avait été à la peine, c’était bien raison qu’il fût à l’honneur. »347

JEANNE d’ARC (1412-1431), Procès, 9e interrogatoire du 15 mars 1431. Dictionnaire de français Larousse, au mot « peine »

Le calme bon sens de la jeune fille l’emporte sur tous les pièges du frère. Le théâtre et le cinéma ont repris, presque au mot à mot, ce dialogue (consigné dans les minutes du procès).

« Nous sommes perdus, nous avons brûlé une sainte. »348

Secrétaire du roi d’Angleterre, après l’exécution de Jeanne, Rouen, 30 mai 1431. Histoire de France, tome V (1841), Jules Michelet

(…) Jeanne abjure ses erreurs et accepte de faire pénitence. Elle se ressaisit et, en signe de fidélité envers ses voix et son Dieu, reprend ses habits d’homme. Second procès : condamnée au bûcher comme hérétique et relapse, brûlée vive (…)

« Souvenons-nous toujours, Français, que la patrie, chez nous, est née du cœur d’une femme, de sa tendresse, de ses larmes, du sang qu’elle a donné pour nous. »349

Jules MICHELET (1798-1874), Jeanne d’Arc (1853)

Charles VII qui n’a rien tenté pour sauver Jeanne, fit procéder à une enquête quand il reconquit Rouen. Le 7 juillet 1456, on fit le procès du procès, d’où annulation, réhabilitation (…) La récupération politique viendra plus tard (…)

« Mais où sont les neiges d’antan ? […]
Et Jeanne la bonne Lorraine
Qu’Anglais brûlèrent à Rouen ? »350

François VILLON (vers 1431-1463), Le Grand Testament, Ballade des dames du temps jadis (1462)

Un des premiers poètes à lui rendre hommage est Villon, né (vraisemblablement) l’année de sa mort.

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