Montesquieu : « L’étude a été pour moi le souverain remède contre les dégoûts, n’ayant jamais eu de chagrin qu’une heure de lecture ne m’ait ôté. » | L’Histoire en citations
Chronique du jour

 

Siècle des Lumières.
Les philosophes.

Montesquieu est le premier des quatre, en termes de chronologie. Assurément le plus heureux et il s’en vante ! Il n’a pas de souci d’argent comme les trois autres, il ne s’engage pas non plus dans des combats idéologiques. Il rencontre immédiatement le succès littéraire avec un petit livre d’humour dans l’esprit du temps, ses Lettres persanes, et se consacre ensuite au monument philosophique de sa vie, L’Esprit des lois, succès encore plus étonnant, vu le sérieux du propos.

Les commentaires sont allégés, les coupes signalées (…) Retrouvez l’intégralité dans nos Chroniques de l’Histoire en citations.

Charles-Louis de Secondat, baron de la Brède et de Montesquieu.

« L’étude a été pour moi le souverain remède contre les dégoûts, n’ayant jamais eu de chagrin qu’une heure de lecture ne m’ait ôté. »1001

MONTESQUIEU (1689-1755), Cahiers (posthume)

Homme heureux, paisible magistrat qui écrit d’abord pour se distraire, il se libère de sa charge parlementaire et sans problème d’argent, peut se consacrer à des travaux qui ont le succès et le public espérés (…) « Je m’éveille le matin avec une joie secrète ; je vois la lumière avec une espèce de ravissement. Tout le reste du jour je suis content. »

« Je suis bon citoyen parce que j’aime le gouvernement où je suis né […] parce que j’ai toujours été content de l’état où je suis […] mais dans quelque pays que je fusse né, je l’aurais été tout de même. »1002

MONTESQUIEU (1689-1755), Cahiers (posthume)

Sa philosophie sera à l’image de l’homme et du citoyen, toute d’équilibre et de raison, en accord avec ce siècle où le bonheur est de règle et où, seul de la bande des quatre philosophes, Rousseau l’écorché vif fera exception.

« Si je savais quelque chose qui me fût utile et qui fût préjudiciable à ma famille, je le rejetterais de mon esprit. Si je savais quelque chose qui fût utile à ma famille et qui ne le fût pas à ma patrie, je chercherais à l’oublier. Si je savais quelque chose utile à ma patrie et qui fût préjudiciable à l’Europe et au genre humain, je le regarderais comme un crime. »1003

MONTESQUIEU (1689-1755), Cahiers (posthume)

Il est le premier de tous les philosophes à se proclamer européen et même citoyen du monde, à l’image d’un siècle à vocation cosmopolite.

« Les lois […] sont les rapports nécessaires qui dérivent de la nature des choses. »1004

MONTESQUIEU (1689-1755), L’Esprit des Lois (1748)

L’Esprit des Lois est la grande œuvre de sa vie (…) succès considérable, 22 éditions en un an et demi ! « C’est de l’esprit sur les lois », dit Mme du Deffand – ce n’est qu’un mot, et injuste. Montesquieu crée ici une science des lois : il cherche leur « âme », discerne un ordre, une raison et s’efforce de comprendre (…)

« Dans l’état de nature, les hommes naissent bien dans l’égalité ; mais ils n’y sauraient rester. La société la leur fait perdre, et ils ne redeviennent égaux que par les lois. »1005

MONTESQUIEU (1689-1755), L’Esprit des Lois (1748)

Il a plus souvent parlé de liberté que d’égalité – opposé en cela à Rousseau. Mais dans cette justification des lois (…) il existe un cousinage avec le Contrat social. Tout l’Ancien Régime étant fondé sur les privilèges (fiscaux et autres), donc sur un principe fondamental d’inégalité, seule une réforme littéralement révolutionnaire pouvait amener l’égalité (…)

« Une chose n’est pas juste parce qu’elle est loi […], mais elle doit être loi parce qu’elle est juste. »1006

MONTESQUIEU (1689-1755), Cahiers (posthume)

Que de chemin parcouru depuis Montaigne : « Les lois se maintiennent en crédit non parce qu’elles sont justes, mais parce qu’elles sont lois » (Essais) et Pascal : « Il est dangereux de dire au peuple que les lois ne sont pas justes, car il n’y obéit qu’à cause qu’il les croit justes » (Pensées) (…)

« L’État […] doit à tous les citoyens une subsistance assurée, la nourriture, un vêtement convenable, et un genre de vie qui ne soit pas contraire à sa santé. »1007

MONTESQUIEU (1689-1755), L’Esprit des Lois (1748)

Dans cette œuvre de science politique, rien de moins abstrait que ces droits du citoyen ! Au nom d’un profond respect de la personne humaine, Montesquieu refuse les lettres de cachet, la torture, l’intolérance, le paupérisme, la guerre. Les révolutionnaires trouveront chez lui bien des sujets de réforme (…)

« Le gouvernement républicain est celui où le peuple en corps, ou seulement une partie du peuple, a la souveraine puissance ; le monarchique, celui où un seul gouverne, mais par des lois fixes et établies ; au lieu que dans le despotique, un seul, sans loi et sans règle, entraîne tout par sa volonté et ses caprices. »1008

MONTESQUIEU (1689-1755), L’Esprit des Lois (1748)

Cette classification des formes de gouvernements fonde tout l’édifice théorique du philosophe qui prend parti : toujours et partout contre le despotisme, et selon les temps et les lieux, pour une république avec démocratie à l’antique, pour la constitution anglaise modèle XVIIIe siècle, pour une monarchie française revue, corrigée, modérée.

« Les hommes sont tous égaux dans le gouvernement républicain ; ils sont égaux dans le gouvernement despotique. Dans le premier, c’est parce qu’ils sont tout ; dans le second, c’est parce qu’ils ne sont rien. »1009

MONTESQUIEU (1689-1755), L’Esprit des Lois (1748)

Montesquieu va largement inspirer l’Encyclopédie dans ses vues politiques, notamment quand elle condamne le despotisme, réserve la république aux petits États, loue la monarchie anglaise.

« Il ne faut pas beaucoup de probité pour qu’un gouvernement monarchique ou un gouvernement despotique se maintienne ou se soutienne […] Mais dans un État [gouvernement] populaire, il faut un ressort de plus, qui est la vertu. »1010

MONTESQUIEU (1689-1755), L’Esprit des Lois (1748)

Le grand mot est lâché. La vertu est, avec le bonheur, une des idées clés du siècle. Montesquieu précise cette notion complexe, cette valeur rare qui rend si difficile le régime républicain : « Ce que j’appelle la vertu dans la république est l’amour de la patrie, c’est-à-dire de l’égalité […] un renoncement à soi-même qui est toujours une chose très pénible […] demandant une préférence continuelle de l’intérêt public au sien propre. » (…)

« Il n’y a point encore de liberté si la puissance de juger n’est pas séparée de la puissance législative et de l’exécutrice. »1011

MONTESQUIEU (1689-1755), L’Esprit des Lois (1748)

Fameux principe de la séparation des pouvoirs : « Tout serait perdu si le même homme, ou le même corps […] exerçait ces trois pouvoirs : celui de faire les lois, celui d’exécuter les résolutions publiques, et celui de juger les crimes ou les différends des particuliers. » (…) La Déclaration des droits de l’homme (…) consacrera la séparation des pouvoirs en 1789.

« Pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que par la disposition des choses le pouvoir arrête le pouvoir. »1012

MONTESQUIEU (1689-1755), L’Esprit des Lois (1748)

En plus de la séparation des pouvoirs, il souhaite leur équilibre : pouvoirs intermédiaires (noblesse, Parlements) face à l’arbitraire royal. D’où une monarchie tempérée (…) Les Monarchiens des premiers mois de la Révolution tenteront de faire triompher cette évolution qui aurait fait l’économie d’une révolution (…)

« Le gouvernement est comme toutes les choses du monde ; pour le conserver, il faut l’aimer. »1013

MONTESQUIEU (1689-1755), L’Esprit des Lois (1748)

(…) Cette phrase de grand bon sens explique tout, y compris le chaos politique du siècle des Lumières et la mort d’un Ancien Régime mal aimé de tous les Français (…) On se réfère toujours à Montesquieu : pour sa classification des trois formes de gouvernement (républicain, monarchique, despotique), pour son principe de la séparation des pouvoirs (exécutif, législatif, judiciaire).

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