22 juillet 1461. Louis XI accède enfin au pouvoir.
Surnommé « l’universelle araigne », le personnage n’a rien pour plaire. Raison de plus pour faire entendre et comprendre l’un de nos plus grands rois. Il a sa place dans notre récit national et l’Histoire en citations, tout autant que Saint-Louis ou Jeanne d’Arc, certes plus attachants et très prisés dans un « roman » national.
En vingt-deux années de règne, ce dernier roi du Moyen Âge accomplit une œuvre fondamentale : il accroît les territoires de la couronne (sans recours à la guerre !) et donne à l’État royal les bases administratives que ses successeurs vont développer. La France est prête pour sa Renaissance, en attendant la monarchie absolue.
Premier jour : le long et dur apprentissage du métier de roi.
À feuilleter pour en savoir plus.
« Ce Dauphin en son Dauphiné, c’est déjà le roi Louis. »362
(1880-1942), Louis XI (1927)
Né à Bourges en 1423, « petite fleur malingre au jardin de France », le futur Louis XI, pendant dix ans, administre soigneusement le Dauphiné : il y fait son apprentissage de roi, révélant déjà toutes les qualités de l’un des plus grands souverains notre histoire.
« Mon très redouté seigneur, je me recommande à votre bonne grâce tant et si très humblement que je puis […] vous suppliant de m’avoir et tenir toujours en votre bonne grâce en me commandant vos bons plaisirs pour les accomplir en mon bon pouvoir. »361
Dauphin LOUIS, futur LOUIS XI (1423-1483), Lettre à son père le roi Charles VII, octobre 1452
On ne saurait être plus hypocrite dans ses propos ! Depuis 1447 et jusqu’à la mort de Charles VII en 1461, père et fils se fâchèrent au point de ne plus se voir. Très jaloux de son père, d’Agnès Sorel, du favori de Brézé, par ailleurs impatient de régner, Louis n’a cessé de comploter pour prendre sa place. Cas assez rare dans l’histoire de nos rois de France, ce mauvais rôle étant plus souvent tenu par « Monsieur », frère du roi, que par le Dauphin son fils.
Le dauphin Louis, âgé de 17 ans, avait participé à la coalition de grands féodaux, furieux de la réorganisation de l’armée qui donne au roi seul le droit de lever des troupes. Les rebelles furent maîtrisés, le dauphin pardonné. Pour l’occuper et l’exiler, Charles VII l’envoie gouverner le Dauphiné. Ce qui ne l’empêche pas de continuer les intrigues contre son royal père.
« Il a reçu chez lui un renard qui mangera ses poules. »363
CHARLES VII (1403-1461), apprenant que son fils s’est réfugié chez le duc de Bourgogne, fin août 1456. Histoire de France (1833-1841), tome V (1841), Jules Michelet
Philippe III le Bon, duc de Bourgogne, s’est réconcilié avec Charles VII en signant la paix d’Arras (1435). Maître de la Bourgogne, la Franche-Comté, la Flandre, l’Artois et les provinces belges, ce grand féodal est le plus puissant souverain d’Europe. Il est trop heureux d’accueillir somptueusement le futur roi de France, venu conspirer contre son père, et lui fait une pension annuelle de 36 000 livres.
Charles VII connaît la perfidie de son renard de fils. Le fils de Philippe, Charles le Téméraire, l’apprendra bientôt à ses dépens.
« Il fut contraint de plaire à ceux dont il avait besoin : voilà ce que lui apprit l’adversité, et ce n’est pas mince avantage. »272
Philippe de COMMYNES (1447-1511), Mémoires (1524). Parlant ici du futur Louis XI, encore dauphin et impatient de régner
Ayant conspiré contre son père avec le duc de Bourgogne, son pire ennemi, devenu roi, Louis XI gardera la même attitude, selon ce chroniqueur témoin et fin psychologue : « Entre tous ceux que j’ai jamais connus, le plus avisé pour se tirer d’un mauvais pas en temps d’adversité, c’était le roi Louis XI, notre maître […] et l’être qui se donnait le plus de peine pour gagner un homme qui le pouvait servir ou qui lui pouvait nuire. »
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