Portrait de Catherine de Médicis en citations | L’Histoire en citations
Portraits en citations des Personnages de l’Histoire

 

Née à Florence en 1519, orpheline fort bien éduquée par son cousin le pape Clément VII, devenue reine de France par son mariage avec Henri II mort accidentellement en 1559, elle entre dans l’Histoire : veuve noire et mère des rois François II, Charles IX, Henri III, des reines Élisabeth (reine d’Espagne) et Marguerite (« la reine Margot » mariée à Henri IV), Catherine de Médicis gouvernera trente ans en maîtresse femme, reine-mère et régente dans une époque tourmentée.

Ses enfants sont trop jeunes ou trop faibles pour régner par eux-mêmes. Face aux partis qui tentent d’accaparer le pouvoir en faisant pression sur elle, Catherine fait preuve d’un rare mélange de caractère et de diplomatie afin d’éviter l’effondrement du pouvoir royal !
Dans la tourmente des guerres de Religion (1562-1598) qui opposent catholiques et protestants, elle opte avec son chancelier Michel de l’Hospital pour une politique de conciliation, instaure la liberté de conscience et de culte pour les protestants et crée le concept de tolérance civile (édit de janvier 1562). C’est mission impossible dans ce contexte chaotique, mais cela prépare l’édit de Nantes d’Henri IV (1598). En attendant, l’infatigable reine continuera de lutter pour son fils préféré Henri III dont elle pressent la fin - assassiné quelques mois après sa mort en 1589.

Reste la fameuse « légende noire » attachée au nom de Catherine de Médicis.

Victime de la xénophobie et la misogynie « ordinaires » dans notre Histoire, elle est pourtant bien vue des chroniqueurs qui comprennent cette femme plurielle à la politique ondoyante.
Un libelle anonyme de 1575 en fait soudain une arriviste jalouse du pouvoir, ne reculant devant aucun crime pour conserver son influence. Veuve noire sans ami, sans amant, sans favori et sans parti déterminé, ce personnage romanesque et théâtral, fascinant et maintes fois recréé, incarne aujourd’hui encore la noirceur, le machiavélisme et le despotisme.
Des historiens la réhabilitent depuis le XIXe siècle et force est de reconnaître en elle l’une des plus grandes reines de France. Mais son rôle non éclairci dans le massacre de la Saint-Barthélemy (1572) en fait à jamais une figure controversée.

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1. Première femme d’État de notre Histoire, cible d’une légende noire à revoir et corriger.

« Divide ut regnes. »
« Divise, afin de régner. »498

CATHERINE DE MÉDICIS (1519-1589), maxime politique

Cette maxime énoncée par Machiavel fut celle du Sénat romain, mais aussi de Louis XI, dernier grand roi du Moyen Âge, et de la nouvelle régente en 1560. Bien que devenue française, elle reste florentine dans l’âme et jusque dans sa cour qu’elle veut brillante, pour imposer cette image au pays quels que soient les malheurs à venir. Après presque trente années d’effacement derrière le roi, la favorite Diane de Poitiers et les conseillers, Catherine de Médicis va gouverner la France pendant près de trente autres années marquées par les guerres de Religion.

Les adversaires de Catherine vont lui reprocher de louvoyer entre les partis et de créer la discorde pour mieux régner. En réalité, elle s’est méfiée de tous les partis et s’est vouée, sa vie durant, à tous les rabaisser ne mettre en valeur que celui du roi ! C’est la faiblesse du pouvoir royal et de ses moyens qui l’ont réduite à s’appuyer selon les circonstances sur tel ou tel parti.

« L’argent est le nerf de la guerre. »512

CATHERINE DE MÉDICIS (1519-1589), Lettre à l’ambassadeur d’Espagne, août 1570. Histoire de la France et des Français (1972), André Castelot, Alain Decaux

La « petite phrase » de Rabelais dans Gargantua (selon qui « les nerfs des batailles sont les pécunes ») va faire fortune dans l’histoire. Au XVIe siècle, tous les souverains d’Europe ont d’énormes besoins d’argent pour leurs guerres qu’il faut sans cesse faire, ou préparer - record historique de quatre-vingt-cinq années de guerre en ce siècle ! Il faut que la France soit très riche et pleine de ressources pour s’être si longtemps battue et retrouver en dix ans une prospérité certaine, au début du XVIIe siècle.

« Par expérience, et tout chacun l’a aussi pu voir, les armes n’ont apporté que mal. »

CATHERINE DE MEDICIS (1519-1589), cité par Denis Crouzet, Une reine épistolaire. Lettres et pouvoir au temps de Catherine de Médicis (2014)

Au début de la cinquième guerre de Religion, elle écrit à son fils Henri III : « Gardez-vous de livrer bataille et souvenez-vous des conseils de Louis XI : la paix signée est toujours plus avantageuse avant la défaite. » La paix est le but sans fin poursuivi de cette diplomate hors norme qui intervient surtout pour accommoder ou modérer les partis ennemis. C’est elle qui mène les négociations et parcourt le royaume pour faire respecter les édits de paix et l’autorité du roi. Elle fait la paix, mais les partis (se) font la guerre.

Par son combat envers et contre tous pour la concorde, Catherine de Médicis est devenue aux yeux de ses contemporains une personne hors du commun qui impose le respect. Cependant, son entêtement à se battre en vain  pour une cause qui semble perdue la discrédite aux yeux de ceux qui veulent toujours en découdre avec leurs adversaires. C’est l’un des drames de sa vie et de son règne.

« Lacrymae hinc, hinc dolor. »
(De là viennent mes larmes et ma douleur.).

CATHERINE DE MÉDICIS (1519-1589), sa devise prise en 1559, avec pour emblème une lance brisée

Son mari le roi Henri II vient de mourir d’un accident de tournoi - une blessure à l’œil d’un coup de lance donné par le comte de Montgommery, capitaine des gardes et régicide involontaire. Nostradamus qui avait prédit le drame gagne sa place d’astronome à la cour, en même temps que Diane de Poitiers la favorite en titre est priée de partir.

Les contemporains constatent la douleur extrême manifestée par la reine. Catherine choisit de ne plus s’habiller qu’en noir, alors que le deuil se marquait traditionnellement en blanc. Elle arbore un voile qu’elle ne quittera plus – tous ses portraits à venir en témoignent. Elle reste prostrée quelques mois. Si grande est sa souffrance qu’elle ne peut même pas assister au sacre de son fils aîné François II, le 18 septembre.

« Quelle dame a la pratique
De tant de mathématique ?
Quelle princesse entend mieux
Du grand monde la peinture
Les chemins de la nature
Et la musique des cieux ? »

Pierre de RONSARD (1524-1585), L’Astrologie, Ode à la Reine (1587)

Il faut tenir compte de la flatterie inhérente à ce genre de littérature, mais le prince des poètes, également poète des princes et mécènes, célébra Catherine non pour sa beauté mais pour son savoir et son goût pour les arts.

Digne héritière des Médicis, elle s’entoure d’artistes, poètes, hommes de lettres et musiciens qu’elle fait venir à la cour et pensionne à son propre service, ce qu’aucune reine de France n’a fait. Elle privilégie les artistes français, au lieu de faire appel à des italiens comme les rois de France depuis la Renaissance.

Sa politique de mise en scène de la monarchie se double d’une passion personnelle pour les arts. Elle s’intéresse à l’orfèvrerie comme à la musique, la peinture et l’architecture. Elle affectionne le portrait français et multiplie le nombre de portraitistes à son service (tels François Clouet et les frères Dumonstier). Elle met en place une politique architecturales, faisant édifier le palais des Tuileries non loin du Louvre et agrandir le château de Chenonceau.

Elle contribue aussi à diffuser les mœurs et le goût italiens. Venue d’Italie à 14 ans accompagnée d’une quarantaine de cuisiniers, confiseurs et pâtissiers florentins, elle introduit à la cour de France des légumes inconnus jusqu’alors, les haricots, les artichauts, les brocolis ou les petits pois. Elle serait aussi à l’origine de la diffusion des asperges, des tomates, de l’épinard, de la fourchette, du sabayon, des macarons, des sorbets « tutti frutti » et de la ganache, donnant naissance à la « révolution gastronomique française ».

Il peut y avoir une part de légende dans cette réputation, mais le faste de sa cour fut remarquable et remarqué. C’est aussi un outil politique au service de la royauté – au siècle de Louis XIV, la politique-spectacle sera portée à son maximum.

« L’infatigable constance avec laquelle elle recevait toutes sortes de gens, écoutant leurs discours et usant à leur égard de tant de politesse qu’on n’eût su désirer mieux »

Cardinal Daniel Matteo BARBARO (1514-1570 ), cité par Lucien Romier, Le Royaume de Catherine de Médicis. La France à la veille des guerres de Religion (1922)

Parole d’ambassadeur vénitien, grand humaniste et connaisseur en art.

Cette qualité propre à Catherine de Médicis fut aussi considérée comme un défaut. Mais la dissimulation envisagée comme outil diplomatique rejoint l’exercice de cette vertu capitale pour la reine-mère, la « patience ». Jusqu’à la fin de sa vie à 69 ans, tout lui semble possible par la persuasion et cela prend un temps infini qu’elle n’estime jamais perdu. Obligée de combattre une « hérésie » prête à dévorer la monarchie, sans amis, apercevant la trahison dans les chefs du parti catholique et la république dans le parti calviniste, elle employa l’arme la plus dangereuse, mais la plus sûre de la politique, l’adresse ! Au gré des traîtrises, des complots, des changements d’alliance, elle joue son jeu et tant qu’elle a vécu, les Valois ont gardé leur trône.

« Elle entreprit, sauva, garantit et préserva ses enfants et leurs règnes. »

BRANTOME (vers 1537-1614), Œuvres complètes de Pierre de Bourdeille, seigneur de Brantôme, publiées d’après les manuscrits (posthume)

Autre témoignage contemporain et digne de foi. Militaire reconverti dans l’écriture suite à ses blessures, historiographe plus qu’historien, surnommé « le valet de chambre de l’Histoire » pour les détails intimes donnés sur certains personnages, Brantôme se plaît à chroniquer la cour de Catherine de Médicis, pleine de femmes plus ou moins galantes et toujours séduisantes, espionnes et/ou prostituées – son fameux « escadron volant » fit beaucoup fantasmer, contribuant aussi à la légende noire de la débauche.

Brantôme fut amoureux de la reine - qui n’eut jamais d’amant ni même d’amis véritables, tant elle craignait les complots et les trahisons. Il résume ici en quelques mots tout le bien qu’il pense d’elle, après la Saint-Barthélemy. Fait paradoxal, car la légende noire naîtra surtout après ce drame national et les massacres qui suivirent, catholiques contre protestants.

« Elle connaissait bien où il fallait jeter sa pierre, et son mot, et où il y avait à redire. »

BRANTOME (vers 1537-1614), Œuvres complètes de Pierre de Bourdeille, seigneur de Brantôme, publiées d’après les manuscrits (posthume)

Maîtrisant parfaitement l’écriture, l’auteur rend hommage à cette Italienne de naissance qui savait si manier les mots, contrairement à une légende assurément malveillante et xénophobe. « À ceux de sa nation pourtant ne parlait bien souvent que français, tant elle honorait la France et sa langue, et faisait paraître son beau dire aux grands, aux étrangers et aux ambassadeurs qui la venaient trouver toujours après le roi. Elle leur répondait fort pertinemment, avec une fort belle grâce et majesté, comme je l’ai vue aussi parler aux cours de parlement, fût en public, fût en privé. »

Son art de manier la langue à défaut de l’épée se retrouve dans une correspondance étonnante, reflet de son être intime autant que de sa politique. Nous en donnerons quelques exemples qui valent naturellement citations.

« Il s’est passé beaucoup de choses qui m’ont fait grand mal au cœur, et je désirerois que ce mal fût tombé sur moi seule »

Catherine de MEDICIS (1519-1589), lettre citée par Matthieu Gellard, Une reine épistolaire. Lettres et pouvoir au temps de Catherine de Médicis (2015)

Sur le fond, c’est un trait remarquable de son caractère : orpheline de mère et de père à moins d’un mois, elle voudrait tant protéger ses enfants rois qu’elle est prête à prendre tous les coups pour leur éviter le pire. Ce ne fut pas toujours possible.

Restent 5 958 lettres publiées en 10 tomes (posthumes), dans un océan épistolaire - entre juillet 1559 et décembre 1588, la reine-mère aurait pu écrire ou fait écrire entre 10 000 et 30 000 lettres ! C’est presque le record de Voltaire dont le métier était d’écrire (souvent plus brièvement qu’elle).

La lettre était littéralement un « système de pouvoir » dans un univers humaniste qui croyait dans le pouvoir des mots. Contrairement à certains adversaires et persifleurs, rappelons qu’elle maîtrisait fort bien à l’écrit comme à l’oral le français appris très jeune en Italie.

« Elle était armée d’un haut cœur… un cœur supérieur, plein de force, de foi et d’intelligence qui la poussait à se dresser contre les passions qui ensanglantaient le royaume. »

Étienne PASQUIER (1529-1615) cité souvent par Denis Crouzet, historien contemporain

Contemporain de la reine et historien digne de foi, magistrat, juriste, avocat au Parlement de Paris et député aux États de Blois, conseiller du roi Henri III, humaniste et poète, il a ce très beau mot qui dit l’essentiel sur la reine, se plaisant à détailler : « Un cœur supérieur, plein de force, de foi et d’intelligence qui la poussa à se dresser contre les passions qui ensanglantaient le royaume. »

Malgré la « légende noire » qui récrit toujours l’histoire à sa façon, Catherine de Médicis est une femme intelligente et subtile, mécène cultivée et raffinée. Après presque trente années d’effacement derrière le roi Henri II, la belle favorite Diane de Poitiers et les conseillers en titre, elle va gouverner la France pendant trente autres années, tragiquement marquées par les guerres de Religion. Ce contexte explique bien des drames.

« Haut cœur », le mot est repris par Denis Crouzet qui travailla sur les guerres de Religion, avant de consacrer à Catherine de Médicis une savante biographie, source de nouvelles citations. Oscillant entre le bien et le mal, adepte de la parole et de la négociation, humaniste persuadée de sa mission de pacification du royaume, fine stratège forgeant les instruments idéologiques pour intervenir dans la décision politique, allant jusqu’à légitimer l’usage de la violence vue comme une nécessité pour l’avenir de la paix. Dans ce contexte tragique des guerres de Religion, la raison politique moderne prend forme autour d’une souveraine hors du commun.

« Le Discours merveilleux de la vie, actions et déportements de la reine Catherine de Médicis, déclarant tous les moyens qu’elle a tenus pour usurper le gouvernement du royaume de France et ruiner l’état d’icelui. »

Titre du libelle daté de 1575, cité dans « Pourquoi fut-elle si détestée ? », Denis Crouzet, Mensuel 314, novembre 2006

Ce texte anonyme (sans doute protestant) lance tardivement la rumeur, source de la légende noire. Son but est politique : déstabiliser la reine mère et favoriser l’accession au trône de François d’Alençon (1555-1584), son troisième fils proche d’Henri de Navarre et des milieux protestants.

Le Discours merveilleux veut démontrer comment l’étrangère fit basculer le royaume dans le malheur, dès son arrivée à la cour de France en 1533. À peine mariée au futur roi Henri II, elle tente d’accaparer le pouvoir. Épouse jalouse, régente machiavélique manipulée par Nostradamus et autres mages, magiciens et astrologues, hérétique pour les catholiques, ordonnatrice de la Saint-Barthélemy contre les huguenots, elle incarne la « reine noire » : en relation avec le vêtement adopté après la mort du roi en 1559 et l’âme diabolique qui l’anime, elle capitalise tout l’imaginaire du crime occulte forgé par la Renaissance. Elle use des médications quasi sorcellaires, philtres et autres poisons - même son patronyme renvoie aux mauvaises médecines. Elle est aussi accusée d’entretenir les guerres de Religion, conflit national qui affaiblit les nobles et les grands du royaume, écartés du pouvoir en vue d’établir son pouvoir tyrannique. Elle est le malheur d’un royaume qui ne retrouvera la paix que quand elle aura disparu.

Dans son Histoire de Charles IX (1686), l’historien Antoine Varillas reprendra le libelle de 1575,  relançant la thématique de la « reine noire », criminelle et machiavélienne. La Révolution accentuera la dénonciation des rois et les révolutionnaires comme Marat reprennent les légendes sordides qui ont couru à son sujet pour vilipender la monarchie. Le romantisme et la littérature populaire d’Alexandre Dumas ou de Michel Zévaco suivront au XIXe siècle, avant que l’école républicaine et la tradition populaire ne pérennisent cette légende.

« Ce n’est pas une femme, c’est la royauté qui vient de mourir. »

Jacques Auguste de THOU (1553-Paris 1617), cité par Balzac, Sur Catherine de Médicis (1846)

Dernier témoin contemporain à la barre de l’Histoire et toujours digne de foi, historien et magistrat apprenant la mort de la reine, il a ce mot très fort. Catherine eut au plus haut degré le sentiment de la royauté. Aussi la défendit-elle avec un courage et une persistance admirables jusqu’aux derniers jours de sa vie.

Entre maints exemples, citons les deux « tours de France » conçus pour présenter ses fils Charles IX puis Henri III au peuple, leur faire découvrir en même temps leur royaume et favoriser la rencontre avec d’autres membres de la famille ou les représentants de tel ou tel parti : un grand spectacle parfois fastueux qui se joue sur plus de deux ans, authentique marathon royal organisé par la reine-mère en 1564, puis 1578. Ce dernier épisode peut sembler épuisant pour une femme déjà âgée, affectée de rhumatismes, privée parfois de confort, alternant entre voyage en litière ou à dos de mule, traversant des régions aux mains des rebelles ou frôlant une épidémie de peste, mais toujours avec le même courage et la certitude que « ça servira ».

« Humiliez vos cœurs devant Dieu, vous qui êtes Français, reconnaissez que vous avez perdu la plus grande reine en vertu, la plus noble en race et génération, la plus excellente en honneur, la plus chaste entre toutes les femmes, la plus prudente en son administration, la plus douce en sa conversation, la plus affable et la plus bénigne à tous ceux qui ont voulu l’aborder, la plus humble et la plus charitable envers ses enfants, la plus obéissante à son mari, mais surtout la plus dévote envers Dieu, la plus affectionnée envers les plus pauvres que reine qui oncques régna en France. »

Renaud de BEAUNE (1527-1606), archevêque de Bourges, oraison funèbre prononcée le 4 février 1589, lors des obsèques de Catherine de Médicis

Transcrit par Janine Garrisson (1932-2019), protestante, historienne, professeure d’histoire et romancière, spécialiste de l’histoire politique et religieuse française du XVIᵉ siècle, cet éloge funèbre frôle l’apologie – c’est une loi du genre. Mais il reflète une part de réalité, la face intime d’une reine qui s’attachait à convaincre plus qu’à vaincre, une femme de famille qui défendit toujours les siens, une catholique qui avait nombre de vertus chrétiennes et une Française de cœur plus patriote que tant de Français de souche.

On pourrait en dire autant de Mazarin né Mazarini, le plus impopulaire de tous nos Premiers ministres, qui défendit pendant cinq années de Fronde le jeune roi Louis XIV, la reine-régente et la royauté française, au péril de sa vie. Mais la postérité a reconnu sa qualité d’homme politique exceptionnel. Alors que la légende noire de Catherine a la vie dure… Un avocat imprévu vole quand même à son secours, Balzac.

« Aucune femme, si ce n’est Brunehaut ou Frédégonde, n’a plus souffert des erreurs populaires que Catherine de Médicis… Une femme extraordinaire (qui) a sauvé la couronne de France (avec) les plus rares qualités, les plus précieux dons de l’homme d’État. »

Honoré de BALZAC (1799-1850), Sur Catherine de Médicis (1846), roman historique

Au siècle romantique, le chef de file du réalisme défend Catherine de Médicis contre l’anathème des libéraux qui depuis la Révolution de 1830 présentaient la reine-mère comme un despote arbitraire et sanguinaire. Côté forme, son roman est composite et « mal fichu », mais sur le fond, sa plaidoirie est historiquement juste, parfaitement claire et bien documentée.

« Catherine de Médicis a sauvé la couronne de France ; elle a maintenu l’autorité royale dans des circonstances au milieu desquelles plus d’un grand prince aurait succombé. Ayant en tête des factieux et des ambitions comme celles des Guise et de la maison de Bourbon, des hommes comme les deux cardinaux de Lorraine et comme les deux Balafré, les deux princes de Condé, la reine Jeanne d’Albret, Henri IV, le connétable de Montmorency, Calvin, les Coligny, Théodore de Bèze, il lui a fallu déployer les plus rares qualités, les plus précieux dons de l’homme d’État, sous le feu des railleries de la presse calviniste. Voilà des faits qui, certes, sont incontestables… Cette femme extraordinaire, qui n’eut aucune des faiblesses de son sexe, qui vécut chaste au milieu des amours de la cour la plus galante de l’Europe, et qui sut, malgré sa pénurie d’argent, bâtir d’admirables monuments, comme pour réparer les pertes que causaient les démolitions des Calvinistes qui firent à l’art autant de blessures qu’au corps politique. »

Balzac s’insurge aussi contre le dénigrement des légitimistes, Chateaubriand en tête qui refusait à une Médicis toute capacité politique. Femme et (née) étrangère, c’en était trop selon leurs critères qu’on qualifierait aujourd’hui de misogyne et xénophobe. L’historien Michelet voit en elle « un ver sorti du tombeau de l’Italie » (cité par Robert Sauzet dans Henri III et son temps).

François Guizot, à la fois historien et homme d’État lui rend quand même un hommage à peine nuancé : « Si au point de vue moral on ne saurait juger Catherine de Médicis trop sévèrement, à travers tant de vices, elle eut des mérites ; elle prit à cœur la royauté et la France ; elle défendit de son mieux contre les Guises et l’Espagne l’indépendance de l’une et de l’autre, ne voulant les livrer ni aux partis extrêmes ni à l’étranger. »

Mais la légende noire persiste, véhiculée par le roman et relancée par Dumas dans La Reine Margot. L’adaptation au cinéma signée Patrice Chéreau en 1994 relancera avec talent la légende de la mère et de sa fille, première femme d’Henri IV, elle aussi impliquée dans la Saint-Barthélemy.

« Cette pleine possession de soi est peut-être le trait le plus caractéristique de son caractère ; non-seulement elle n’eut pas d’amants, mais elle n’eut pas de favoris. Elle eut à peine des amitiés, elle vécut entièrement pour ses enfants et elle vit sa race rester stérile : ce fut sans doute le châtiment le plus cruel pour une mère qui voulait se survivre dans plusieurs lignées royales ; rameau de la tige flétrie des Médicis, elle vit se dessécher entièrement la tige des Valois, sur laquelle, jeune, on l’avait greffée. »

Auguste LAUGEL (1830-1914), La Correspondance de Catherine de Médicis, Revue des Deux Mondes, 3e période, tome 51, 1882

Autre historien et philosophe du XIXe siècle, il analyse parfaitement l’originalité de Catherine de Médicis, s’étant longuement penché sur son étonnante et abondante correspondance et sa vie riche en drames.

« De son vivant et comme en reflet négatif de son infatigabilité laborieuse et têtue, de cette posture à la fois active et protectrice, sa légende noire s’est d’ailleurs développée sur le motif de la ‘jalousie’ du pouvoir qui l’aurait fait recourir aux moyens les plus obliques ou maléficieux pour conserver l’autorité ou une parcelle de celle-ci : poison, magie noire, assassinat, massacre, mensonge, mépris, complot, ruse, calomnie. »

Denis CROUZET (né en 1953), Le Haut cœur de Catherine de Médicis (2015)

Historien contemporain le plus fasciné par Catherine de Médicis, il résume les racines du mal… disons même de la malédiction dont le personnage souffre encore dans l’imaginaire collectif.

La chronique de l’Histoire en citations est faite pour présenter une version conforme à la réalité, certes complexe, à l’image du personnage principal également passionnant, et du contexte tragique : huit guerres civiles d’origine religieuse qui se sont succédé dans le royaume de France de 1562 à 1598, opposant partisans du catholicisme (souvent les plus ultras) et partisans du protestantisme (les « huguenots » de plus en plus déterminés) dans des opérations militaires pouvant aller jusqu’à la bataille rangée.

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2. Chronique de trente ans au pouvoir : entre quatre drames familiaux et la tragédie nationale des guerres de Religion.

« J’ai eu la fille toute nue ! »,

FRANÇOIS Ier (1494-1547), cité par Jean Orieux, Catherine de Médicis, la reine noire

Nulle grivoiserie dans ce commentaire d’un roi réputé très leste ! C’est juste la déception d’un père qui croyait  organiser en 1533 un « bon mariage » pour son fils cadet, Henri d’Orléans, 14 ans, uni à Catarina Medici, même âge, cousine du pape Clément VII  qui l’appelle « ma nièce » et richement dotée (100 000 écus d’argent, 28 000 écus de bijoux, apanages et autres faveurs). Mais l’année suivante, son successeur Paul III rompt le traité d’alliance avec la France contre Charles Quint et refuse de payer la dot.

La psychiatrie pourrait donner des clés à l’histoire et vice versa, dans le cas de cette « fille toute nue ». Catherine fut orpheline de mère et de père avant d’avoir un mois. Placée sous tutelle, très bien entourée par la grande famille des Médicis, elle devient la duchessina, la petite duchesse des Florentins. Mais son enfance est perturbée par la guerre entre son protecteur le pape Clément VII et l’empereur Charles Quint. Les républicains florentins profitent de la défaite du pape pour se révolter contre les Médicis, prendre le contrôle de la ville… et Catherine en otage, menaçant de la violer et la tuer quand les troupes de Charles-Quint font le siège de la ville. L’enfant de dix ans restera marquée à vie par la violence de ce conflit et la haine viscérale de la guerre.

Pour la protéger, on la place dans différents couvents où par souci de sécurité, on lui fait prendre l’habit de nonne. Une fois la ville de Florence soumise au pouvoir du pape et de l’empereur, Catherine est emmenée à Rome, au Vatican où elle va grandir auprès de Clément VII. Elle bénéficie d’une culture raffinée, imprégnée d’humanisme et de néoplatonisme. Elle en restera toujours imprégnée. Elle quitte l’Italie en 1533, lorsque le pape fait alliance avec le roi de France.

À défaut d’être belle, la princesse de 14 ans est gracieuse, naturellement gaie, elle aime les fêtes, bien différente de l’image sévère qu’elle laissera dans sa maturité, veuve noire à 40 ans. Très superstitieuse, elle s’entoure d’astrologues, dont le célèbre Nostradamus. L’Italienne est plus ou moins bien accueillie à la cour. Elle apporte le raffinement extrême d’un pays où la Renaissance a un siècle d’avance. Mais pour les courtisans toujours jaloux, c’est « la Banquière » ou « la Fille des marchands », voire « l’épicière ». Elle incarne malgré tout la richissime Florence.

C’est l’occasion de faire le rapprochement avec Marie de Médicis : à part l’homonymie et la naissance à Florence, tout oppose ces deux lointaines cousines. Marie de Médicis, seconde femme d’Henri IV, surnommée à juste titre « la grosse banquière » apportera une dot record de 600 000 écus d’or. Mais ce sera une reine catastrophique pour la France, femme détestable pour son mari, mère haïe par son fils Louis XIII qui la fera exiler, éternelle comploteuse qui finira ridiculisée, humiliée, ruinée. Tout le contraire de Catherine.

« Je lis les histoires de ce royaume, et j’y trouve que de tous les temps, les putains ont dirigé les affaires des rois ! »479

CATHERINE DE MÉDICIS (1519-1589) à Diane de Poitiers. Le Royaume de Catherine de Médicis (1922), Lucien Romier

Catherine faillit être répudiée pour cause de stérilité pendant onze ans, avant de donner dix enfants au roi, dont trois accèderont au trône (François II, Charles IX et Henri III). Tel était le premier devoir d’une reine : assurer la succession. Mission accomplie. L’ex-orpheline sera aussi une vraie mère, passionnément attentive à sa progéniture physiquement fragile et politiquement menacée.

Depuis 1538 et durant les douze années de règne d’Henri II, Catherine est éclipsée par Diane de Poitiers. De vingt ans l’aînée du roi, elle fit son éducation à la cour quand l’enfant de 11 ans rentra, après quatre années passées comme otage en Espagne (à la place de son père François Ier, vaincu et prisonnier à Pavie). Influente et intrigante, elle reste sa favorite jusqu’à la fin, même si certains historiens doutent de la nature exacte de leur liaison. C’est aussi une grande mécène pour les peintres de la première école de Fontainebleau qui l’ont peinte adorablement nue.

On imagine la jalousie que pouvait en concevoir la reine Catherine, mais elle ne fit rien contre sa rivale. Henri II se montrait discret, pour ne pas humilier sa femme… C’était quand même un ménage à trois et la cour était au courant de (presque) tout. Mais les soucis politiques et religieux avaient une autre importance !

« Partout où le calvinisme réussit, l’autorité royale devient incertaine, et l’on court le risque de tomber en une espèce de république, comme les Suisses. »491

HENRI II (1519-1559). De la démocratie chez les prédicateurs de la Ligue (1841), Charles Labitte

Sa mort prochaine ne laissera pas au roi le temps de profiter de la paix conclue (traité de Cateau-Cambrésis signé avec le roi d’Espagne et mettant fin à la 11eme guerre d’Italie, 3 avril 1559) pour lutter contre les ravages du protestantisme qui se répand en France.

Par ailleurs, la paix revenue augmente les risques de troubles intérieurs : elle laisse sans emploi les gentilshommes, à présent disponibles pour d’autres combats et prêts, selon leurs convictions ou leur clientèle nobiliaire, à se ranger du côté des catholiques ou des protestants.

« Que mon peuple persiste et demeure ferme en la foi en laquelle je meurs. »492

HENRI II (1519-1559), mot de la fin, le 10 juillet 1559. Henri II, roi gentilhomme (1987), Georges Bordonove

Le roi meurt des suites d’un accident de tournoi – blessure à l’œil d’un coup de lance, donné par le comte de Montgommery, capitaine des gardes et régicide involontaire. Nostradamus qui a prédit ce malheur devient astrologue de la cour, très prisé de Catherine de Médicis fort superstitieuse… et très mal vu par son entourage. Mais tout ce qui concerne le personnage est discuté, y compris cette prophétie et le lien avec sa promotion.

Trois fils d’Henri II vont lui succéder, sans jamais avoir son autorité. L’aîné François II, 15 ans, confie le gouvernement à sa mère Catherine de Médicis : elle renvoie le très influent connétable Anne de Montmorency, exile Diane de Poitiers la favorite haïe et donne le pouvoir aux Guise, les oncles du jeune roi. Pendant quelques mois, la reine devenue à jamais Veuve noire est très abattue – on dirait aujourd’hui qu’elle fit une véritable dépression. Elle n’assista même pas au sacre de son fils aîné.

Sous l’influence de cette famille très catholique, la guerre aux protestants reprend de plus belle, cette année où se tient à Paris le premier synode national des Églises réformées de France. L’édit d’Écouen décide d’« extirper l’hérésie » : ordre d’abattre sans jugement tout protestant en fuite ou révolté. Le conseiller Anne du Bourg s’élève contre tant d’intolérance : il est exécuté, le 23 décembre 1559.

« Il n’était fils de bonne mère qui n’en voulût goûter. »493

Blaise de MONLUC (1502-1577), Commentaires (posthume)

Soldat à 16 ans sous les ordres du chevalier Bayard, servant sous quatre rois successifs avec sa fière devise « Deo duce, ferro comite » (« Dieu pour chef, le fer pour compagnon »), fait maréchal de France à 72 ans, couvert de gloire et de blessures, Monluc reste fidèle à la religion catholique et s’indigne en 1559 de voir les seigneurs de France embrasser le calvinisme.

Ainsi Louis Ier, prince de Condé (futur chef du parti protestant contre les Guise) et trois neveux du connétable de Montmorency, le plus célèbre étant l’amiral Gaspard de Coligny (dont l’assassinat déclenchera le massacre de la Saint-Barthélemy). Pour Monluc, militaire gascon pur et dur, tout protestant est un rebelle, un ennemi du roi : c’est pour cette trahison et non par fanatisme religieux qu’il participera à la répression, durant les guerres de Religion. Il s’en justifie dans ses Commentaires, « bible du soldat » selon Henri IV, document clair et précis sur l’histoire politique et militaire du XVIe siècle.

« Ils ont décapité la France, les bourreaux ! »495

Jean d’AUBIGNÉ (??-1563), à son fils, devant le château d’Amboise, mars 1560. La Vie d’un héros, Agrippa d’Aubigné (1913), Samuel Rocheblave

Enfant de 8 ans, Agrippa d’Aubigné sera marqué à vie par la vue des conjurés protestants pendus sur la terrasse du château. C’est l’épilogue de la conjuration d’Amboise.

Les chefs protestants (Condé, Coligny, Henri de Bourbon) voulaient exprimer leurs doléances et soustraire le jeune roi François II à l’influence de ses oncles, le duc de Guise et le cardinal de Lorraine, catholiques responsables de la répression religieuse. Refusant la violence armée, ils projettent l’enlèvement organisé par d’autres gentilshommes, dont Jean d’Aubigné. Le complot échoue, le « tumulte d’Amboise » est noyé dans le sang. Le prince de Condé sera arrêté, mais relâché à la demande du pouvoir, et aussitôt prêt à une nouvelle conjuration, dans la logique de l’époque.

Le père d’Aubigné demande à son fils Agrippa de « venger ces chefs pleins d’honneur » au péril de sa vie : ce qu’il fera, la plume et l’épée à la main, soldat, poète et mystique, parfaite incarnation des excès et des vertus de son temps… Mais la guerre civile imminente est différée par un autre drame qui replonge Catherine la veuve noire dans un nouveau drame, la mort du jeune roi.

« Dieu qui avait frappé le père à l’œil a frappé le fils à l’oreille. »496

Jean CALVIN (1509-1564). Charles IX (1986), Emmanuel Bourassin

Le « pape de Genève », promoteur  du calvinisme, fait en ces termes l’oraison funèbre de François II, mort à 16 ans d’une infection à l’oreille, le 5 décembre 1560 – un an et demi après Henri II, mort d’un œil crevé dans un tournoi.

Charles IX lui succède à 10 ans et sa mère Catherine de Médicis se retrouve régente. Protestants et catholiques semblent d’accord pour regretter que le pouvoir politique échappe aux hommes : « Ceux-là ont sagement pourvu à leur État qui ont ordonné que les femmes ne vinssent jamais à régner » selon Théodore de Bèze, le grand théoricien protestant, rappelant la loi salique. Alors que pour Fournier, prédicateur catholique de Saint-Séverin : « Ce n’est pas l’état d’une femme de conférer les évêchés et les bénéfices. La mère de Jésus-Christ se voulut-elle mêler de l’élection de saint Mathias ? » (élu pour être le douzième apôtre, à la place de Judas).

Au pays de la loi salique, ce préjugé contre les femmes au pouvoir visa la mère de Louis IX, Blanche de Castille au Moyen Âge, une forte femme comme Catherine et une mère assurément abusive – Catherine fut seulement attentive, il y a plus qu’une nuance. Pour l’heure, elle est surtout désespérée par ce deuxième deuil.

« Dieu m’a laissée avec trois enfants petits et un royaume tout divisé, n’y ayant aucun à qui je puisse entièrement me fier. »499

CATHERINE DE MÉDICIS (1519-1589), Lettre à sa fille Élisabeth, janvier 1561. Le Siècle de la Renaissance (1909), Louis Batiffol

5 958 lettres publiées en 10 tomes (posthumes), dans un océan épistolaire. La lettre était littéralement un « système de pouvoir ». C’est aussi un espace de confidence avec ses enfants, à commencer par Élisabeth de France, devenue reine d’Espagne par son mariage avec Philippe II qui la fit venir en sa cour, la destinant d’abord à son fils Carlo. C’est tout le drame de l’opéra quelque peu romancé Don Carlo, de Verdi.

Désormais, Catherine de Médicis n’a plus qu’une ambition : assurer le règne de ses fils dont la santé, minée par la tuberculose, justifiera de sombres prédictions. Elle va manœuvrer entre les partis, intriguer avec les intrigants contre d’autres intrigants : « Divide ut regnes. »

Elle commence par renvoyer les Guise, comprenant que la politique de répression de ces ultra catholiques ne faisait que renforcer la résistance des protestants et menaient à la guerre… Marquée par son enfance italienne et la violence dont elle fut non seulement témoin, mais victime à dix ans, elle voudra toujours éviter le pire !

Antoine de Navarre (protestant, mais sans vraie conviction comme son fils le futur Henri IV) devient lieutenant général du royaume et catholique opportuniste. Michel de L’Hospital, promu chancelier, sera son principal ministre. Son choix est bon. La vraie religion de ce grand juriste est la tolérance.

« Qu’y a-t-il besoin de tant de bûchers et de tortures ? C’est avec les armes de la charité qu’il faut aller à tel combat. Le couteau vaut peu contre l’esprit. »500

Michel de L’HOSPITAL (vers 1504-1573), Assemblée de Fontainebleau, 21 août 1560. Nouvelle Histoire de France (1922), Albert Malet

Le chancelier de France parlera ce langage aussi longtemps qu’il sera au pouvoir. Catherine de Médicis va le maintenir sept ans à ses côtés et l’histoire est donc injuste avec elle, en ne retenant que sa responsabilité dans le massacre de la Saint-Barthélemy ! Les heures les plus tragiques du règne.

« Tuez-les, mais tuez-les tous, pour qu’il n’en reste pas un pour me le reprocher. »523

CHARLES IX (1550-1574), 23 août 1572. Nouvelle Histoire de France (1922), Albert Malet

L’amiral de Coligny échappa au matin du 22 août à un attentat, vraisemblablement organisé par les Guise. Le médecin Ambroise Paré assure que ce coup d’arquebuse au bras sera sans conséquence. Le roi se rend au chevet de son conseiller qui le conjure de se « défier de sa mère ».

Rentré au Louvre, il répète pourtant ses propos à Catherine de Médicis qui se concerte avec les Guise : le massacre des huguenots est-il décidé ? C’est l’un des mystères de l’Histoire. En fait, les protestants se répandent déjà dans les rues, réclamant justice au nom de Coligny. Il n’y a plus vraiment le choix. Catherine persuade son fils. Et lui-même à contrecœur, il donne son accord : « Tuez-les, tuez-les tous… »

« Le corps d’un ennemi mort sent toujours bon. »525

CHARLES IX (1550-1574), le 24 août, jour de la Saint-Barthélemy (du nom du saint, fêté sur le calendrier). Cité au XVIIIe siècle par Voltaire (Œuvres complètes, volume X) et au XIXe siècle par Alexandre Dumas (La Reine Margot), entre autres sources

Les guerres de Religion, c’est l’une des pages d’Histoire les plus riches en mots. Ce mot (de l’empereur romain Vitellius) est donc attribué à Charles IX, devant le corps de Coligny. Cette nuit, cet assassinat et ses suites – les milliers de morts et le sacrifice de son conseiller – hanteront cependant les nuits du jeune roi, jusqu’à sa mort prochaine.

Faible de caractère, manipulé par sa mère et ses proches (les Guise et son frère Henri, le duc d’Anjou), il semble qu’il ait donné son accord pour tuer tous les chefs… Oui, MAIS pas tous les protestants de Paris, de Navarre et de France !

Selon certaines sources (dont Agrippa d’Aubigné), il tirait à l’arquebuse sur les fuyards. Selon d’autres historiens, il a tenté d’arrêter la tuerie qui commence dans les rues, les ruelles. De toute manière, il est trop tard ! On a fermé les portes de Paris et la capitale est profondément anti-huguenote. La haine se déchaîne. Chaque protestant passe pour un Coligny en puissance : « Tuez-les tous ! » L’ordre royal du 23 août est répété à tous les échos, tous les carrefours.

« Saignez, saignez, la saignée est aussi bonne au mois d’août qu’au mois de mai ! »527

Maréchal de TAVANNES (1509-1573), 24 août 1572. Œuvres complètes, volume X (1823), Voltaire

Ancien page de François Ier, gouverneur de Bourgogne où il se distingua par son fanatisme contre les réformés, il excite ses soldats au massacre de la Saint-Barthélemy, appelé « la boucherie de Paris ».

Selon le journal d’un bourgeois de Strasbourg, présent le 24 août : « Il n’y avait point de ruelle dans Paris, quelque petite qu’elle fût, où l’on n’en ait assassiné quelques-uns… Le sang coulait dans les rues comme s’il avait beaucoup plu. » L’historien Michelet évoque cette « féroce jouissance à tuer ».

Le livre de comptes de l’Hôtel de Ville de Paris inscrit 1 100 sépultures, l’historien contemporain Jacques Auguste de Thou écrit : 30 000 morts. Entre les deux, 4 000 morts est un bilan vraisemblable.

« Les Parisiens se mettent au pillage avec une extraordinaire avidité : bien des gens ne s’étaient jamais imaginé qu’ils pourraient posséder un jour les chevaux et l’argenterie qu’ils ont ce soir dans les mains. »528

Antonio Maria SALVIATI (1537-1602), nonce apostolique, lettre au pape Grégoire XIII. Correspondance du nonce en France, Antonio Maria Salviati : 1572-1578 (1975)

Salviati est Florentin et cousin de Catherine de Médicis. Il a intrigué pour se faire envoyer à la cour de France. Arriver en cette année 1572 fait de lui un témoin privilégié d’une page d’histoire qui concerne par ailleurs le pape, même si le Saint-Siège n’est pour rien dans le massacre ! La correspondance de Salviati est un modèle d’ordre et de régularité. Une source précieuse pour les historiens, avec une partialité somme toute logique en faveur des catholiques. Mais la tuerie va s’étendre à tout le royaume.

« Il valait mieux que cela tombât sur eux que sur nous. »529

CATHERINE DE MÉDICIS (1519-1589), Lettre à l’ambassadeur de Toscane à propos du massacre de la Saint-Barthélemy. Lettres de Catherine de Médicis (1891), Collection de documents inédits sur l’histoire de France, Imprimerie nationale

La reine mère est sans doute responsable des massacres, malgré la prochaine déclaration de Charles IX qui se pose en roi et décideur, au Parlement de Paris. Mais au point de haine où catholiques et protestants sont arrivés, le choc semblait inévitable et la balance pouvait pencher de l’un ou l’autre côté. On peut penser aussi que cette forte femme a été dépassée par la force des événements ! Cette violence lui rappelle aussi l’épreuve vécue à dix ans dans Florence en guerre.

Effet non prévu, la Saint-Barthélemy va renforcer le parti protestant qui s’organise pendant cette quatrième guerre de Religion.

« La messe ou la mort. »530

CHARLES IX (1550-1574), à Condé, le 24 août 1572. Précis de l’histoire de France jusqu’à la Révolution française (1833), Jules Michelet

Henri Ier de Bourbon-Condé (fils de Louis, assassiné à Jarnac) a fait alliance avec son cousin Henri de Navarre, devenant l’un des chefs protestants les plus actifs. Il est mené devant le roi qui jure « par la mort Dieu » : il n’hésitera pas à faire tomber sa tête, s’il ne se convertit pas. « Je te donne trois jours pour changer d’avis […] Trois jours, après quoi il faudra choisir : la messe ou la mort. »

Henri Ier va abjurer, comme le futur Henri IV et pour la même raison. La vie vaut bien une messe. Mais ce genre de conversion sous la contrainte vaut peu et ne dure pas.

« La messe ou la mort » va devenir un mot d’ordre, la formule d’un exorcisme collectif, dans Paris où chaque Parisien se croit dépositaire de la justice divine, devant chaque huguenot fatalement coupable d’hérésie et traître au roi.

« La haine et le fanatisme ne trouveront pas d’obstacle auprès de moi. Dieu seul est ma défense ! »531

Michel de L’HOSPITAL (vers 1504-1573). Œuvres complètes de Michel de L’Hospital, chancelier de France (1824)

Après l’échec de sa politique de conciliation, l’ancien chancelier vit retiré dans ses terres à Vignay (en Île-de-France). Il a ouvert les portes de son château à une foule survoltée. Assiégé par des catholiques fanatiques, il refuse de se défendre par la force et manque d’être une des victimes de la Saint-Barthélemy qui dégénère en nouvelle guerre civile.

« Tout ce qui est advenu dans Paris a été fait non seulement par mon propre consentement, mais par mon commandement et de mon propre mouvement. »532

CHARLES IX (1550-1574), Déclaration au Parlement de Paris convoqué le 26 août. La Reine libertine : la reine Margot (2009), Michel de Decker

Au lendemain de la Saint-Barthélemy, le roi s’exprime publiquement. Mais nul n’ignore l’influence très réelle de Catherine de Médicis sur son fils.

« Chargez de la justification de cette action ceux qui vous ont donné le conseil de la commettre. »533

Bertrand de salignac de La MOTHE-FÉNELON (1510-1599), à Charles IX. Choix de Chroniques et Mémoires sur l’histoire de France (1836), Jean Alexandre C. Buchon

Envoyé en ambassade auprès d’Élisabeth Ire d’Angleterre, il fait cette réponse au roi, le priant de donner à la reine (protestante) une justification de la Saint-Barthélemy, peu de jours après le massacre.

La tuerie continue en province jusqu’en octobre 1572 : 10 000 réformés en sont victimes (en plus des 3 000 protestants à Paris). Les deux camps se déchirent dans cette quatrième guerre de Religion (1572-1573). Le siège et la résistance des places fortes dans le Midi (et dans l’Ouest) donnent lieu à de terribles tueries d’hérétiques, les règlements de compte personnels doublant les affrontements religieux. Il y eut bien des Saint-Barthélemy en ce temps.

« L’État s’est crevassé et ébranlé depuis la journée de la Saint-Barthélemy, depuis que la foi du prince envers le sujet et du sujet envers le prince, qui est le seul ciment qui entretient les États en union, s’est si outrageusement démentie. »534

Philippe DUPLESSIS-MORNAY (1549-1623), Mémoires et correspondance de Duplessis-Mornay pour servir à l’histoire de la réformation et des guerres civiles et religieuses en France, sous les règnes de Charles IX, de Henri III, de Henri IV et de Louis XIII, depuis l’an 1571 jusqu’en 1623

Parole de chef calviniste, mais juste analyse de la situation. Le massacre étendu à toute la France creuse un fossé entre le pouvoir royal et les protestants, provoquant une crise de la foi monarchique : à la mort de Charles IX, Henri III héritera d’une situation délicate et Catherine de Médicis sera finalement impuissante à dédramatiser le règne de ses fils.

Duplessis-Mornay rejoint Henri de Navarre (futur Henri IV) et le théologien entre en politique, devenant son ambassadeur et principal conseiller, l’un des hommes les plus importants du parti protestant à la fin du XVIe siècle. Le parti s’organise, devient quasiment « un État dans l’État » et menace l’unité nationale : il nomme un « gouverneur général et protecteur des Églises réformées » (qui sera bientôt Henri de Navarre), lève des impôts sur les territoires qu’il contrôle, entretient des armées, s’offre même deux capitales (Nîmes et Montauban) et un grand port (La Rochelle).

« Périsse le souvenir de ce jour ! »535

Michel de L’HOSPITAL (vers 1504-1573), évoquant la Saint-Barthélemy. Œuvres complètes de Michel de L’Hospital, chancelier de France (1824)

Cité dans ses Œuvres complètes, comme un « cri de honte et de douleur que tous les vrais Français répétèrent ».

Le souvenir de la Saint-Barthélemy vivra à jamais dans l’histoire de France, mais ce drame eut au moins un effet positif : un tiers parti va naître, celui des Malcontents, des Politiques, esprits modérés, catholiques aussi bien que protestants, soucieux avant tout de sauver le pays, préparant à terme l’avènement d’Henri IV et la paix. Michel de L’Hospital sera naturellement de ces hommes, avec l’humaniste Jean Bodin, le capitaine protestant François de La Noue, Duplessis-Mornay, théologien réformé qui échappe de peu au massacre, le philosophe Montaigne, ami du roi de Navarre et maire de Bordeaux, qui tente activement de rapprocher les deux camps, et même le très catholique Ronsard, qui se désolidarise des crimes commis au nom de la religion.

« Vous devez louer Dieu, si prenez cette ville, de vous avoir fait la grâce d’être le restaurateur et conservateur du royaume et qu’à l’âge de vingt et un ans vous avez plus fait qu’homme, pour grand capitaine qu’il ait été, ait jamais fait. »536

CATHERINE DE MÉDICIS (1519-1589), à son fils Henri duc d’Anjou, lettre du 15 avril 1573. Histoire de la France et des Français (1972), André Castelot, Alain Decaux

Le futur Henri III, brillant vainqueur de Jarnac et de Moncontour contre les protestants, n’aura pas la même chance devant La Rochelle dont il fait le siège avec les troupes royales, en mars 1573. Six mois ne feront pas céder le grand port tenu par les protestants et la paix de La Rochelle (1er juillet 1573) leur donne quelques satisfactions.

« France et vous valent mieux que Pologne. »540

HENRI III (1551-1589), Lettre à Catherine de Médicis, 22 juin 1574. Henri III, roi de France et de Pologne (1988), Georges Bordonove

Élu roi de Pologne en 1573 grâce aux intrigues maternelles, il rentre avec joie au pays natal auprès de cette mère dont il est sans conteste le fils préféré. Elle a mis tous ses espoirs en lui, le faisant siéger aux États généraux à sept ans aux côtés de son frère Charles IX qui en était jaloux, et le faisant nommer lieutenant général du royaume à 16 ans, au lieu du prince Louis de Condé qui rompit avec la cour.

« Les autres ne sont rien où nous ne parlons point. »541

HENRI III (1551-1589). Lettres de Henri III de France, recueillies par Pierre Champion. Revue d’histoire de l’Église de France, année 1960

Affirmation de puissance de la Majesté royale. Personnage diversement jugé : brave, intelligent, travailleur, cultivé, il veut faire l’unité de la France autour de lui. On lui doit d’importantes réformes qui lui valent le surnom de « Roi de la basoche ». La grande ordonnance de Blois (mai 1579) reprend et clarifie toutes les lois antérieures sur l’organisation de l’Église, la justice, l’enseignement, la fiscalité, le commerce, le gouvernement des provinces, etc. Le « code Henri III » (1587) se veut recueil « des ordonnances françaises réduites en sommaires à la forme et modèle du droit romain ».

Mais le roi est trop souvent indécis et son homosexualité lui fait accorder un crédit excessif à ses mignons, Épernon et Joyeuse. Les désordres du temps ne favorisent pas non plus l’autorité royale. Il va devoir affronter les quatre dernières guerres de Religion, chaque paix signée relance la suivante. Heureusement, le parti des « Politiques » vient à son secours : un de leur manifeste fait apparaître l’expression de « lois fondamentales du royaume » en 1575. Et si le roi règne, la reine Catherine reste la plus attentive des conseillères.

« Gardez-vous de livrer bataille et souvenez-vous des conseils de Louis XI : la paix signée est toujours plus avantageuse avant la défaite. »543

CATHERINE DE MÉDICIS (1519-1589), à son fils Henri III, 1576. Dictionnaire des citations de l’histoire de France (1990), Michèle Ressi. Repris dans ecoles-collèges.com, site de l’Éducation nationale

La reine mère est bonne conseillère en ce début d’année, mais le contexte politico-religieux est explosif et la cinquième guerre de Religion commence ! La coalition regroupe Condé, Turenne et Henri de Navarre échappé de la cour où il était retenu depuis la Saint-Barthélemy, qui abjure la religion catholique et reprend la tête des armées huguenotes. François d’Alençon, propre frère du roi, se joint à eux, prenant la tête du parti des Malcontents avec quelques princes catholiques.

Le roi, qui a lutté contre les protestants du temps où il était duc d’Anjou, se range aux côtés des Politiques (modérés des deux camps). Même si Catherine n’a plus officiellement le pouvoir, il est certain qu’elle influence son fils.

« Vous pouvez penser comme je suis malheureuse de tant vivre et de voir tout mourir devant moi, encore que je sache bien qu’il faut se conformer à la volonté de Dieu. »552

CATHERINE DE MÉDICIS (1519-1589), Lettre à Bellièvre, 10 juin 1584. Histoire de la France et des Français (1972), André Castelot, Alain Decaux

Mère de dix enfants, la « veuve noire » n’en finit plus de porter leur deuil. François d’Anjou (ex-duc Alençon) meurt le 10 juin 1584, âgé de 30 ans. Éternel frustré de la famille, ambitieux et rebelle, très impopulaire, il a comploté à la tête du parti des Malcontents et ce n’est pas une grande perte pour le roi.

Mais Henri III n’ayant pas fait d’enfant à sa femme pourtant bien-aimée, à sa mort, la couronne de France doit revenir à Henri de Navarre, chef du parti protestant. Nostradamus l’astrologue de la reine l’avait prédit il y a longtemps : « Il aura tout l’héritage. »

La perspective qui se précise d’un Henri IV protestant, roi de France, affole les Français majoritairement catholiques et insupporte aux Guise. La Sainte Ligue en sommeil se réveille.

« Comment sont nées les barricades ? Pour lutter contre les cavaleries royales, le peuple n’ayant jamais de cavalerie. »562

André MALRAUX (1901-1976), L’Espoir (1937)

Le nom de « journée des Barricades » sera donné à plusieurs insurrections parisiennes de l’histoire de France. La première date du 12 mai 1588 et assombrit les derniers mois de Catherine, avec la montée en puissance de la Ligue catholique qui prend possession de la ville de Paris.

Henri de Guise a bravé la défense du roi et s’est rendu dans la capitale, appelé par les Seize (comité formé par les ligueurs, composé de 16 membres représentant les 16 quartiers de la ville). Très populaire, on le surnomme « le Roi de Paris ». Henri III veut riposter avec ses troupes, mais la population se soulève, barrant les rues avec des barriques de terre. Le roi doit s’enfuir et se réfugie à Chartres. Paris reste au duc de Guise et aux ligueurs.

Mais Catherine, âgée de 68 ans, n’a pas eu peur d’affronter la rébellion parisienne, parcourant les rues à pied en se frayant un chemin parmi les obstacles. Prisonnière dans la ville, elle veut se faire l’intermédiaire du duc de Guise pour le réconcilier avec le roi, ce qu’elle croit avoir réussi lorsqu’ils se retrouvent à Chartres. Mais la diplomatie fut-elle florentine et féminine ne peut pas tout. Cependant, d’autres résistances héroïques se manifestent.

« C’est grand’pitié quand le valet chasse le maître. »563

Achille de HARLAY (1536-1619), premier président du Parlement de Paris, mai 1588. Discours sur la vie et la mort du président de Harlay (1816), Jacques de la Vallée

Saluons le courage de ce magistrat qui s’adresse à Henri de Guise, après qu’il a contraint Henri III à s’enfuir de Paris. Ajoutant : « Au reste, mon âme est à Dieu, mon cœur est à mon roi et mon corps est entre les mains des méchants ; qu’on en fasse ce qu’on voudra. »

Inébranlablement fidèle au roi et membre influent du parti des Politiques (les modérés), Harlay sera jeté en prison par les Seize qui font toujours régner la terreur dans la capitale. La situation est grave et le roi convoque les États généraux à Blois.

« C’est bien taillé mon fils ; maintenant il faut recoudre. »567

CATHERINE DE MÉDICIS (1519-1589) à Henri III, château de Blois, 23 décembre 1588. Dictionnaire des citations françaises et étrangères (1982), Robert Carlier

Le roi courut annoncer à sa mère l’assassinat de son pire ennemi, le duc de Guise. Cette façon d’éliminer ceux qui font obstacle au pouvoir de ses fils était bien dans ses mœurs et dans celles de l’époque. Sans doute fut-elle sa conseillère sur ce point. Mais âgée de 69 ans et à quelques jours de sa mort (5 janvier 1589), la reine mère se fait-elle beaucoup d’illusions sur l’avenir de son dernier fils ?

« À présent, je suis roi. »568

HENRI III (1551-1589), billet adressé au légat du pape et écrit de sa main, qui commence par ces mots. Histoire de France depuis les origines jusqu’à la Révolution (1911), Ernest Lavisse, Paul Vidal de La Blache

Il annonce à Sixte Quint (grand bâtisseur de Rome) l’assassinat du duc de Guise et de son frère. Le pape répond en excommuniant le roi de France !

Henri III va se battre encore quelques mois avant de subir le même sort. À la nouvelle du drame de Blois, Paris se soulève. Un autre Guise, frère cadet d’Henri, Charles de Lorraine, duc de Mayenne, prend la tête de la Ligue et le pouvoir à Paris. Il s’autoproclame lieutenant général du royaume. Le roi tente de « recoudre ». En vain… Sa mère mourra quelques mois avant, dans des circonstances étranges. Légende ou vérité ?

« Comment vous appelez-vous ?
— Julien de Saint-Germain.
— Je suis morte !! »

Château royal de Blois, 5 janvier 1589. Anecdote très connue, souvent contée, relatée notamment par Étienne Pasquier, Les Recherches de la France (posthume)

C’est toute une histoire. Une quinzaine d’années auparavant (vers 1571), son astrologue Côme Ruggieri (successeur de Nostradamus) lui a prédit : « Saint-Germain verra votre mort. » Elle ne sait pas quand ni comment, mais elle sait elle va mourir.

Toujours aussi superstitieuse, Catherine de Médicis va désormais éviter tout ce qui porte le nom de Saint-Germain pour échapper à la funeste prédiction. En 1572, elle fait interrompre la construction du Palais des Tuileries dépendant de la paroisse de Saint-Germain-l’Auxerrois, elle rachète l’Hôtel de Soissons et s’installe précipitamment dans ce qui va devenir l’Hôtel de la Reine, près de Saint-Eustache. Elle évite naturellement le château royal de Saint-Germain-en-Laye…

En 1589, elle se retrouve au château de Blois avec la cour - son ultime voyage pour assister à la réunion des États généraux, après l’assassinat du duc de Guise dont les conséquences l’inquiètent toujours. C’est l’hiver, elle prend froid, tombe malade, sans doute une pleurésie. Elle fait appeler son chapelain pour prier, mais il n’est pas là. Un jeune prêtre qu’elle n’a jamais vu le remplace… et le destin la rattrape. C’est donc ce Julien de Saint-Germain qui lui donnera l’extrême-onction. Cette forte femme n’a pas pu tout contrôler.

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Quant aux citations, leur intérêt n’est plus à prouver : en quelques mots bien choisis, sourcés et contextualisés, le passé reprend vie et fait sens.
Plus ou moins connus, voire célèbres et toujours à redécouvrir, voici 200 noms avec plus d’un quart de femmes et un invité surprise, le peuple anonyme (chansons, slogans…)

Aiglon l’- Anne d’Autriche - Anne de Bretagne - Anne de France - Aragon - Aron - Aubigné d’- Auclert Hubertine - Auriol - Badinter - Baker Joséphine - Barre - Beaumarchais - Beauvoir Simone de - Bellay du - Béranger - Bernhardt Sarah - Berry duchesse de - Bismarck - Blanc (Louis) - Blanche de Castille - Blanqui - Blum - Bonaparte Pauline - Bossuet - Boulanger général - Brasillach - Briand - Bugeaud - Callas Maria - Cambacérès - Camus - Catherine de Médicis - César - Chaban-Delmas - Chamfort - Chanel Coco - Charlemagne - Charles IX - Charles X - Chateaubriand - Châtelet Émilie du - Chirac - Claudel - Claudel Camille - Clemenceau - Clotilde - Clovis - Colbert - Colette (Mme) - Condorcet - Corday Charlotte - Cresson Édith - Curie Marie et Pierre - Danton - Debré - Deffand Mme du - Descartes - Deschanel - Desmoulins - Diderot - Dreyfus - Du Guesclin - Dubois abbé - Dumont (René) - Eugénie de Montijo - Fabius - Ferry - Flaubert - Foch - Fouché - Fouquet - Fouquier-Tinville - France (Anatole) - François Ier - Gambetta - Gaulle de - Gaulle Yvonne de - Giroud Françoise - Giscard d’Estaing - Gouges Olympe de - Grégoire abbé - Grévy - Guillotin - Guizot - Guy Alice - Halimi Gisèle - Henri III - Henri IV - Henriette d’Angleterre - Hugo - Isabeau de Bavière - Jaurès - Jeanne d’Arc - Joffre - Joséphine de Beauharnais - L’Hospital de - La Bruyère - La Fayette - Lamartine - Louis IX - Louis XI - Louis XII - Louis XIII - Louis XIV - Louis XV - Louis XVI - Louis XVII (Dauphin) - Louis XVIII - Louis-Philippe - Louise de Savoie - Lyautey - Mac-Mahon - Macron - Madame Mère - Madame Royale -  Mademoiselle la Grande - Maintenon Mme de - Malraux - Marat - Marchais - Marguerite de Navarre - Marguerite de Valois - Marie de Médicis - Marie Leczinska - Marie Stuart - Marie-Antoinette -  Marie-Louise - Marvingt Marie - Marx - Mauriac - Mauroy - Maurras - Mazarin - Michel Louise - Michelet - Mirabeau - Mitterrand - Molière - Monnet - Montaigne - Montespan marquise de - Montesquieu - Montherlant - Moulin - Napoléon - Napoléon III - Palatine La (princesse) - Pascal - Péguy - Pétain - peuple (le) - Philippe Auguste - Philippe d’Orléans (le Régent) - Philippe le Bel - Picasso - Pinay - Pisan Christine de - Poincaré - Poitiers Diane de - Pompadour marquise de - Pompidou - Proudhon - Rabelais - Récamier Juliette - Richelieu - Rivarol - Robespierre - Rocard - Rochefort - Roland Mme - Ronsard - Rousseau - Saint-Exupéry - Saint-Just - Saint-Simon comte de -  Saint-Simon duc de - Sand George - Sarkozy - Sartre - Schoelcher - Schuman - Sévigné marquise de - Sieyès abbé - Sorel Agnès - Staël Mme de - Sully - Talleyrand - Tallien - Tallien Mme - Thiers - Thorez - Tocqueville - Turgot - Valéry - Veil Simone - Vercingétorix - Vergniaud - Villepin - Voltaire - Weill Simone - Weiss Louise - Zola

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