Renaissance et guerres de Religion - Prologue (fin)
Les commentaires sont allégés, les coupes signalées (…) Retrouvez l’intégralité dans nos Chroniques de l’Histoire en citations.
Économie et société
« Quant au salaire du mercenaire, qu’il soit le plus petit possible. »403
(1539-1619), Le Théâtre d’agriculture
(…) Paupérisation des pauvres : de 1480 à 1580, les salaires n’ayant pas augmenté malgré la hausse des prix, le pouvoir d’achat du manouvrier diminue des deux tiers. Denis Richet parle d’un « Waterloo du travailleur », dans ce siècle d’expansion. Le phénomène s’aggrave avec les guerres de Religion, qui signifient dévastations et fiscalité alourdie (…)
« La monnaie est une loi à bien parler […] Et tout ainsi que la loi est une chose sainte et qui ne doit être violée, aussi la monnaie est une chose sainte qui ne doit être altérée, depuis qu’on lui a donné son vrai titre et juste valeur. »404
Jean BODIN (1530-1596), La Réponse de Maître Jean Bodin au paradoxe de M. de Malestroit, touchant l’enchérissement de toutes choses, et le moyen d’y remédier (1566)
Économiste, juriste, conseiller politique, historien, astrologue, démonologue (spécialiste de l’étude des démons), il s’insurge contre l’altération des monnaies métalliques (seules en cours), procédé par lequel les rois diminuent la quantité de métal précieux inclus dans une pièce, à l’occasion de refontes, tout en maintenant sa valeur légale.
« Nos lois sont comme toiles d’araignes […] les petits moucherons et petits papillons y sont pris […] les gros taons les rompent […] et passent à travers. »405
François RABELAIS (vers 1494-1553), Le Cinquième livre (posthume)
Jusqu’à la Révolution, idée récurrente de cette inégalité devant la loi des Français pas encore citoyens. La France, de par la volonté de ses rois, devient pourtant « pays des lois » : nouveaux Parlements (…) ; frontière entre juridictions civiles et ecclésiastiques (…) Les procès de Grands du royaume (…) montrent que les « gros taons » peuvent être pris (…)
« Le peuple par la longueur de la paix est tant multiplié. »406
Claude de SEYSSEL (vers 1450-1520). Histoire de la France : dynasties et révolutions, de 1348 à 1852 (1971), Georges Duby
Malgré les guerres, le nombre joue en faveur de la France, jusqu’à la fin de la période napoléonienne (…) 15 à 18 millions d’habitants – 12 millions pour l’Italie, 8 pour l’Espagne, 5 pour l’Angleterre et l’Écosse, moins de 15 pour l’Allemagne (…) Cette richesse en hommes, en plus du sentiment national très fort, va permettre au pays de triompher des épreuves.
« Pour un marchand que l’on trouvait au temps dudit roi Louis onzième, riche et gros personnage à Paris, à Rouen, à Lyon et autres bonnes villes du royaume et généralement par toute la France, on en trouve en ce présent règne plus de cinquante. »407
Claude de SEYSSEL (vers 1450-1520), La Grande Monarchie de France (1519)
Le commerce par terre et par mer, intérieur et international, prospère sous la Renaissance (…) Une nouvelle classe s’enrichit et devient politiquement influente, achète des terres, des offices royaux, des bénéfices ecclésiastiques, met la main sur les institutions municipales : c’est la bourgeoisie d’affaires.
« La maison est à l’envers lorsque la poule chante aussi haut que le coq. »408
Noël du FAIL (vers 1520-1591), Contes et Discours d’Eutrapel (…)
Dicton du XVIe siècle qui inspire Molière dans Les Femmes savantes : « La poule ne doit point chanter devant le coq. » (…) Mais les femmes tiennent une place importante : mères ou sœurs de rois (…) qui deviennent régentes ; maîtresses ou sœurs royales (…) qui jouent volontiers les reines et les mécènes.
La guerre religieuse
« On commence par brûler les livres, on finit par les personnes. »409
ÉRASME (1469-1536), en 1521. Les Origines de la Réforme (1914), Pierre Imbart de La Tour
La très catholique Sorbonne de Paris dénonce au Parlement les progrès de la doctrine de Luther (protestant, réformateur de l’Église) et obtient un arrêt en vertu de quoi les livres la répandant seront brûlés. Érasme, théologien hollandais, ne se trompe pas : dès 1523, Jean Vallière, moine augustin de Falaise (Normandie), est brûlé vif à Paris comme luthérien (…)
« Cujus regio, ejus religio. » « Tel prince, telle religion. »410
Adage du temps. Introduction à l’histoire du droit et des institutions (2004), Guillaume Bernard
Ou encore : « Dis-moi qui te régit, je te dirai quelle est ta religion. » La religion du prince décide de la foi professée dans l’État. D’où le problème des « dissidents » : « papistes » en pays protestants, « huguenots » en pays catholiques, qui sont selon les périodes pourchassés ou tolérés – jusqu’à la Révolution (…)
« Une guerre étrangère est un mal bien plus doux que la civile. »411
Michel de MONTAIGNE (1533-1592), Les Essais (1580, première édition)
Il prône la « pitié », autrement dit la tolérance, une vertu alors fort mal partagée ! Le conflit latent depuis 1521 dégénère en guerre civile après le massacre de Wassy (1562) « première Saint-Barthélemy ». La France, qui a vécu rien moins que onze guerres d’Italie de 1492 à 1559, va subir, cette fois sur son territoire, huit guerres de Religion de 1562 à 1598 !
« Je veux de siècle en siècle au monde publier
D’une plume de fer sur un papier d’acier,
Que ses propres enfants l’ont prise et dévêtue,
Et jusques à la mort vilainement battue. »412Pierre de RONSARD (1524-1585), Continuation du discours des misères de ce temps (1562)
Le poète des célèbres Discours se jette dans la mêlée pour parler de la France en peine, en proie aux horreurs de la guerre civile (…) Fidèle à la foi catholique, il s’en prend aux protestants tenus pour responsables des troubles. Après le beau XVIe siècle de la Renaissance et du rêve italien, la France des guerres de Religion sombre dans le cauchemar (…)
Vous avez aimé ces citations commentées ?
Vous allez adorer notre Histoire en citations, de la Gaule à nos jours, en numérique ou en papier.