Duc d'Enghien : « Qu'il est affreux de mourir ainsi de la main des Français ! »

XIXe siècle. La liste des condamnés à mort fait encore partie de l’Histoire en citations. Ils se suivent sans se ressembler, de l’Empire à la Troisième République, ébranlée par les attentats anarchistes.

À feuilleter pour tout savoir.

« Qu’il est affreux de mourir ainsi de la main des Français ! »1745

Duc d’ENGHIEN (1772-1804), quelques instants avant son exécution, 21 mars 1804. Son mot de la fin

Les Grands Procès de l’histoire (1924), M^e Henri-Robert.

Bonaparte a la preuve que le prince de 32 ans, dernier rejeton de la lignée des Condé, n’est pour rien dans le complot Cadoudal, même s’il est le chef d’un réseau qui projette de l’assassiner. Il l’a laissé condamner après un simulacre de jugement, puis fusiller la nuit même dans les fossés de Vincennes. « C’est pire qu’un crime, c’est une faute » aux yeux de la postérité. Napoléon en juge autrement : « La saignée entre dans les combinaisons de la médecine politique. »

« Vive le roi ! »1796

Georges CADOUDAL (1771-1804), mot de la fin et dernier cri du condamné à la guillotine, place de Grève, 25 juin 1804

« Il y a parmi les conjurés un homme que je regrette. C’est Georges. Celui-là est bien trempé ; entre mes mains, un pareil homme aurait fait de grandes choses. » Parole de Napoléon. Héros de la guerre de Vendée, rallié au comte d’Artois (futur Charles X), Cadoudal fut le chef des deux principaux complots contre Bonaparte sous le Consulat : l’attentat de la rue Saint-Nicaise en 1800 et dernière conspiration déjouée au début de l’année 1804. « Je lui ai fait dire que s’il voulait s’attacher à moi, non seulement il aurait sa grâce, mais que je lui aurais donné un régiment. Georges a tout refusé : c’est une barre de fer. Qu’y puis-je ? Il subira son sort, car c’est un homme trop dangereux dans un parti. »

« Soldats, droit au cœur ! »1965

Maréchal NEY (1769-1815), commandant lui-même son peloton d’exécution, 7 décembre 1815. Son mot de la fin

Berryer, son avocat, n’a pas pu sauver le « Brave des Braves », coupable de s’être rallié à l’empereur sous les Cent-Jours, alors qu’il s’était engagé à ramener « l’usurpateur dans une cage de fer ». Il est à présent victime désignée de la Terreur blanche, cette réaction ultra qui effraie le roi lui-même.

« Le corps social est rongé par une vermine dont il faut coûte que coûte se débarrasser. »2273

Général ESPINASSE (1815-1859), après l’attentat d’Orsini contre Napoléon III, le 14 janvier 1858

Second Empire. Tel est le programme du nouveau ministre de l’Intérieur. C’est le premier attentat par explosif chimique, l’émotion est d’autant plus vive : Orsini, révolutionnaire italien, a raté son but, mais il y a 142 blessés, 8 morts. À cette occasion, on feint de croire à l’existence d’un vaste complot contre l’État, ourdi naturellement par « les rouges ». Orsini, défendu par Jules Favre, est condamné à mort et exécuté.

« La société est pourrie. Dans les ateliers, les mines et les champs, il y a des êtres humains qui travaillent et souffrent sans pouvoir espérer d’acquérir la millième partie du fruit de leur travail. »2503

RAVACHOL (1859-1892), à son procès, 26 avril 1892

Ravachol est un criminel en série (tuant pour l’argent), devenu un mythe par la vertu de la dynamite et des relations nouées avec les militants anarchistes. Les 11, 18 et 29 mars, il a fait sauter des appartements de magistrats et une caserne. Condamné à mort (pour des crimes antérieurs), il est exécuté le 11 juillet.

« Désormais, ces messieurs sauront qu’ils ont toujours une épée de Damoclès suspendue au-dessus de leur tête, ils voteront peut-être des lois plus justes. »2510

Auguste VAILLANT (1861-1894), Déclaration à la police qui l’interroge, après l’attentat qu’il a perpétré, le 9 décembre 1893

Au procès, il affirme avoir lancé cette bombe pour venger son idole Ravachol, et non pour tuer. Vaillant, 33 ans, est exécuté le 5 février 1894. Cela n’empêche pas, une semaine plus tard, l’explosion d’une autre bombe.

« Vos mains sont couvertes de sang. — Comme l’est votre robe rouge ! »2511

Émile HENRY (1872-1894), répondant au président du tribunal, 27 avril 1894

Fils de bourgeois, il épouse la cause anarchiste par idéal révolutionnaire et veut frapper partout, parce que la bourgeoisie est partout. Il a 19 ans quand sa bombe portée pour examen au commissariat de police des Bons-Enfants explose : 5 morts, le 8 novembre 1892. Émile Henry sera guillotiné le 21 mai 1894, criant « Courage, camarades ! Vive l’anarchie ! »

« Avec un geste cynique / Il prépare son poignard,
Puis il frappe sans retard / Le chef de la République. »2512

Léo LELIÈVRE (1872-1956), Le Crime de Lyon, chanson

Chanson écrite et interprétée par le chansonnier qui relate l’assassinat de Sadi Carnot. Le 24 juin, visitant l’Exposition de Lyon, le président de la République est poignardé par Caserio, un illuminé, jeune anarchiste italien. Les derniers anarchistes célèbres seront ceux de la bande à Bonnot : 20 accusés, 4 condamnés à mort, exécutés en 1912.