Vergniaud | L’Histoire en citations
Citation du jour

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« Il a été permis de craindre que la Révolution, comme Saturne, dévorât successivement tous ses enfants. »

Pierre Victurnien VERGNIAUD (1753-1793). Histoire des Girondins (1847), Alphonse de Lamartine

Le destin de Vergniaud illustre parfaitement ses paroles : avocat (comme nombre de révolutionnaires), député sous la Législative, prenant parti contre les émigrés, contre les prêtres réfractaires, Vergniaud est ensuite considéré comme trop modéré, face à Robespierre et aux Montagnards. Il fait partie des Girondins guillotinés, fin octobre 1793. D’autres charrettes d’« enfants » de la Révolution suivront : les Enragés (hébertistes) trop enragés, les Indulgents (dantonistes) trop indulgents, les robespierristes enfin, trop terroristes.

« Quand la justice a parlé, l’humanité doit avoir son tour. »

Pierre Victurnien VERGNIAUD (1753-1793), Discours du 17 janvier 1793. Les Grands Orateurs de la Révolution, Mirabeau, Vergniaud, Danton, Robespierre (1914), François-Alphonse Aulard

Girondin (du département de la Gironde), avocat au Parlement de Bordeaux, maintenant à la tête des Girondins de Paris, Vergniaud, président de séance, cherche à sauver Louis XVI. Les Girondins craignent d’en faire un martyr, d’autres redoutent que la Révolution se radicalise à l’extrême.

Première question posée le 15 janvier : Louis Capet est-il « coupable de conspiration contre la liberté de la nation et d’attentats contre la sûreté générale de l’État ? » Oui, pour 707 députés sur 718 présents – les chiffres varient un peu, selon les sources, bizarrerie statistique confirmée par le site de l’Assemblée nationale. C’est quand même la quasi-unanimité pour une culpabilité évidente. La « justice a parlé ».

Deuxième question, même jour : le jugement de la Convention sera-t-il soumis à la ratification populaire ? Les Girondins sont globalement pour cet appel au peuple, persuadés que la clémence l’emportera : l’« humanité » aurait son tour. Mais cela risque de diviser la France, de faire croire à une démission de la Convention. Les Montagnards sont massivement contre, et le Non l’emporte : 424 voix contre 283, une dizaine d’abstentions et une trentaine d’absents.

Troisième question, posée dans la séance du 16 au 17 janvier : la peine encourue.

« On vous propose de décréter l’établissement d’une inquisition mille fois plus redoutable que celle de Venise ! Nous mourrons tous plutôt que d’y consentir. »

Pierre Victurnien VERGNIAUD (1753-1793), Séance du 10 mars 1793. Histoire parlementaire de la Révolution française, ou Journal des Assemblées nationales (1834-1838), P.J.B. Buchez, P.C. Roux

Girondin, modéré, il tente de s’opposer aux premières mesures de salut public demandées par Robespierre et ses amis. Il s’élève ici contre le projet de Tribunal révolutionnaire : juridiction d’exception chargée de supprimer tous les ennemis du régime et annonçant la prochaine dictature, sous le signe des Montagnards.

« On a cherché à consommer la Révolution par la terreur ; j’aurais voulu la consommer par l’amour. »

Pierre Victurnien VERGNIAUD (1753-1793), Convention, 10 avril 1793. Archives parlementaires de 1787 à 1860 (1902), Assemblée nationale

La Terreur n’est pas encore mise par décret à l’ordre du jour, mais les Girondins la voient venir : le Tribunal révolutionnaire, juridiction d’exception, a été constitué le 28 mars pour juger les traîtres et les gens supposés tels, et le Comité de salut public, créé le 6 avril pour surveiller l’exécutif. Voici les deux outils forgés pour la dictature jacobine.

Dénonçant « cette inquisition mille fois plus redoutable que celle de Venise », Vergniaud lui oppose son rêve de fraternité. Dans le même élan, ce grand orateur répond au chef de la Montagne.

« Robespierre nous accuse d’être devenus tout à coup des “modérés”, des “feuillants”. Nous, modérés ! Je ne l’étais pas le 10 août, Robespierre, quand tu étais caché dans ta cave ! Des modérés ! Non, je ne le suis pas dans ce sens que je veuille éteindre l’énergie nationale. »

Pierre Victurnien VERGNIAUD (1753-1793), Convention, 10 avril 1793. Histoire complète de Bordeaux (1856), Patrice-John O’Reilly

Le dialogue tragique commence, devant l’Assemblée qui sait que le sort de la Révolution se joue ici et maintenant, Girondins contre Montagnards. Le plus éloquent des députés de la Gironde conclut : « Si, sous prétexte de révolution, il faut pour être patriote se déclarer le protecteur du meurtre et du brigandage, je suis modéré ! »

Mais il y a plus radical encore que Robespierre et la Montagne.

« Donnez un verre de sang à ce cannibale : il a soif ! »

Pierre Victurnien VERGNIAUD (1753-1793), à Marat vitupérant à la tribune de la Convention, 13 avril 1793. Procès fameux extraits de l’Essai sur l’histoire générale des tribunaux des peuples tant anciens que modernes (1796), Nicolas Toussaint Le Moyne Des Essarts

Depuis l’insurrection du 10 août 1792 et les massacres de septembre qu’il encouragea, Marat ne cesse d’attiser la haine, que ce soit dans son journal ou à l’Assemblée. Élu député, siégeant au sommet de la Montagne, président du club des Jacobins depuis le 5 avril 1793, il devient chaque jour plus redoutable, accusant, calomniant, injuriant, éructant. Nul ne semble pouvoir l’interrompre – notons à quel point le sang, mot et symbole, est présent dans cette histoire.

« Hommes de la Gironde, levez-vous ! […] Si vous développez une grande énergie, vous forcerez à la paix des hommes qui provoquent la guerre civile. »

Pierre Victurnien VERGNIAUD (1753-1793), appel au secours du 4 mai 1793. Histoire de Bordeaux (1839), Pierre Bernadau

Marat est revenu plus fort qu’avant à l’Assemblée. Dans cette atmosphère sanglante, Vergniaud pressent le pire et demande soutien à son département, écrivant au club des Amis de la Constitution de Bordeaux et usant de l’anaphore (répétition) : « Paris, le 4 mai 1793, sous le couteau. Frères et Amis, vous avez été instruits de l’horrible persécution exercée contre nous et vous  nous avez abandonnés ! Hommes de la Gironde, levez-vous ! La Convention n’a été faible que parce qu’elle a été abandonnée, soutenez-la contre tous les furieux qui la menacent […] Hommes de la Gironde, il n’y a pas un moment à perdre ! Si vous développez une grande énergie, vous forcerez à la paix des hommes qui provoquent à la guerre civile […] La proscription et l’assassinat circulent autour de nous et l’on s’apprête pour aller à la barre nationale demander nos têtes. Quel est donc notre crime, citoyens ? C’est d’avoir fait entendre la voix de l’humanité au milieu des horreurs […] c’est d’avoir voulu vous garantir de la tyrannie de Marat […] Nous ne craignons pas la mort, mais il est cruel, alors qu’on se sacrifie, de ne pas emporter au tombeau la certitude qu’on laisse au moins quelques regrets à ceux pour lesquels on s’immole. »

Ses Frères et Amis de Bordeaux vont envoyer des pétitionnaires à Paris, pour faire comprendre à l’Assemblée que la région ne supportera pas longtemps que ses députés soient persécutés, que si la Convention ne condamne pas les démagogues, elle lèvera une armée pour la combattre. Ces menaces vagues ne servent à rien : le temps de voir arriver ces secours, les députés Girondins seront déjà à la merci des émeutiers parisiens.

« Eh ! qui suis-je pour me plaindre, quand des milliers de Français meurent aux frontières pour la défense de la patrie ? On tuera mon corps, on ne tuera pas ma mémoire. »

Pierre Victurnien VERGNIAUD (1753-1793), guillotiné le 31 octobre 1793. Son mot de la fin. Histoire socialiste, 1789-1900, volume IV, La Convention (1908), Jean Jaurès

L’homme si élégant, séducteur au physique romantique, avocat brillant sous l’Ancien Régime, devenu l’un des orateurs les plus doués de la Législative et de la Convention, a perdu toute flamme, usé par cinq mois de prison, résigné au pire. Il aurait sans doute pu fuir comme quelques autres, mais il renonce : « Fuir, c’est s’avouer coupable. » Il fait donc partie du groupe des 21 Girondins exécutés.

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