De quand date l’antisémitisme ? Présent au Moyen Âge, du temps des croisades, on le retrouve même au siècle des Lumières et sous la Révolution. Mais ne tombons pas dans le piège de l’anachronisme.
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« Dieu le veut ! »168
Cri de guerre et de ralliement des croisés, lancé dès la première croisade
Dictionnaire historique, géographique et biographique des croisades (1852), Édouard d’Ault-Dumesnil.
Urbain II commence à prêcher la première croisade en 1095. Il s’agit d’abord de la « délivrance des Lieux saints » – Jérusalem et le tombeau du Christ – occupés par les musulmans. Le pape encourage cette entreprise militaire, en promettant aux croisés le paradis (indulgence plénière). Deux expéditions se succèdent, de nature bien différente.
La « croisade populaire » part en 1096, conduite par Pierre L’Hermite et Gautier sans Avoir. Foule de pèlerins à peine armés, indisciplinés, bientôt malades et affamés, ils traversent l’Europe en massacrant les juifs et en pillant pour vivre.
La croisade des barons part en 1097, forte de 30 000 hommes et de quatre armées. Une campagne de deux ans les mènera à la prise d’Antioche, d’Édesse et de Jérusalem (1099) : population massacrée par les croisés. Le « temple » (esplanade de l’ancien temple d’Hérode) et les rues de la ville ruisselèrent de sang, selon l’auteur de l’Histoire anonyme de la première croisade. Les chroniqueurs chrétiens donnent le chiffre de 80 000 morts musulmans.
« C’est l’usurier le plus juif : il vend son argent au poids de l’or. »839
Alain René LESAGE (1668-1747), Turcaret ou le Financier (1709)
Auteur dramatique et romancier sans fortune, obligé de vivre de sa plume, il dénonce le règne de l’argent, dans ses comédies de mœurs. Il crée le personnage de Turcaret, ancien laquais enrichi par la spéculation, parvenu insolent et sot, évoluant dans un monde corrompu, servi et trahi par son valet Frontin : « J’admire le train de la vie humaine ! Nous plumons une coquette ; la coquette mange un homme d’affaires ; l’homme d’affaires en pille d’autres : cela fait un ricochet de fourberies le plus plaisant du monde. » L’œuvre connaît un grand succès, alors que les exactions des financiers et l’insolence de leur luxe font injure à la misère du peuple.
« Il faut tout refuser aux Juifs comme nation, il faut tout leur accorder comme individus. »1398
CLERMONT-TONNERRE (1757-1792), Constituante, 23 décembre 1789
Les juifs (et les « nègres ») sont considérés comme des sous-hommes. Faut-il, au nom de l’égalité des droits, leur accorder la citoyenneté française ? Le cas des juifs est longuement débattu, fin décembre 1789.
(Signalons en passant que les « Juifs comme nation » s’écrivent avec une majuscule, au même titre que les Français, les Anglais, etc., alors que les juifs en tant qu’« individus » et croyants s’écrivent avec une minuscule, comme les catholiques, les protestants, etc.).
L’abbé Grégoire - l’« homme le plus honnête de France », dira de lui Stendhal - se fait de nouveau le champion courageux de leur cause, avec Clermont-Tonnerre et quelques autres députés. Deux jours avant de se dissoudre, la Constituante abolit les lois d’exception qui frappaient les juifs.
« Partout ils mettent la cupidité à la place de l’amour de la patrie et leurs ridicules superstitions à la place de la raison : aussi je me demande s’il ne conviendrait pas de s’occuper d’une régénération guillotinière à leur égard. »1567
Marc Antoine BAUDOT (1765-1836). Les Cahiers bourbonnais (1989)
Les juifs ne sont pas épargnés sous la Terreur et la Convention nationale, malgré le décret d’émancipation qui en fit des citoyens semblables aux autres, dans les derniers jours de la Constituante.
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