Musée français des statues en péril (de la Première Guerre mondiale à la Cinquième République) | L’Histoire en citations
Édito de la semaine

Le « déboulonnage des statues » a beaucoup fait parler en 2020. Phénomène spectaculaire autant que symbolique, il est mondial et remonte à la nuit des temps.

Mais il s’emballe avec les commémorations et autres cérémonies mémorielles. Le passé ne passe pas et chaque « minorité » le manifeste plus ou moins violemment : les noirs, les juifs, les femmes, les homosexuels, les animalistes… L’homme blanc et chrétien peut aussi être concerné et choqué à divers titres.

Avec la diffusion instantanée des informations et des images, le phénomène touche finalement tous les publics et interpelle fatalement l’historien.

Faut-il réécrire l’Histoire ? Oui et non.

Chaque historien le fait à sa manière, dès qu’il s’exprime. Les politologues, sociologues, philosophes, journalistes et autres intellectuels instrumentalisent volontiers l’histoire, les citoyens s’en mêlent, l’opinion publique s’informe et s’enflamme à l’occasion. L’anachronisme n’a plus de limite. Complotisme, « commémorite » et « décommémoration » font rage. C’est la chienlit, comme dirait de Gaulle. Alors que penser, que dire, que faire ?

Une seule certitude : il ne faut jamais censurer l’histoire !

C’est la règle et la raison d’être de l’Histoire en citations : donner la parole à tous les auteurs et acteurs du récit national. Plus d’un millier de personnages s’expriment, se contredisent, s’affrontent ou s’unissent, commentent ou agissent et font ainsi avancer l’histoire. Le peuple (en chansons, pamphlets et slogans) participe à ce jeu au fil des manifestations, des émeutes, des révolutions.

Cet édito original propose une démonstration par l’absurde – en terme savant, c’est la rhétorique du renversement des valeurs. De la Gaule à nos jours, 50 personnages sont exposés à la critique, de Vercingétorix à l’abbé Pierre, en passant par Napoléon et Hugo, stars de notre Histoire. Chacun est reconnu pour ce qu’il a fait de bien – utile, nouveau, exceptionnel. MAIS chacun est à son tour jugé, condamné, « déboulonné » pour tel ou tel fait historiquement prouvé et condamnable, selon nos critères actuels.

La Révolution sert de référence. Tous ses Noms les plus représentatifs - Mirabeau, Danton, Marat, Robespierre, Saint-Just, La Fayette – furent capables du pire : appeler au meurtre, tuer, trahir. La Révolution elle-même devrait être supprimée de notre Histoire ! Que resterait-il de la France ?

Autre leçon à tirer : en tout être humain existe une part d’ombre, sinon un monstre. Cela semble plus évident pour les artistes : Sade, Beaumarchais, Baudelaire, Hugo, Claudel, Picasso, Malraux entre autres exemples.

Dernière remarque : un grand absent dans la liste des 50 Noms, de Gaulle. Il aurait pu y figurer : en juin 2020, son buste fut vandalisé à Hautmont (Nord) avec l’inscription « Esclavagiste », la presse s’en fit l’écho, le président de la Région s’en émut. Ce n’est même pas un déboulonnage signifiant : juste un fait divers insignifiant.

(Les citations numérotées renvoient à notre Histoire en citations, les autres sont pareillement sourcées et contextualisées)

Musée français des statues en péril, retrouvez nos quatre éditos :

 

PREMIÈRE GUERRE MONDIALE

BANANIA

Marque née en 1914 et profitant de la guerre pour mettre en valeur un populaire Tirailleur sénégalais, MAIS le slogan trop colonialiste du « Y’a bon » sera supprimé en 1977.

« Y’a bon, Banania ! »

Symbole de la colonisation associée à une immense fierté patriotique, le soldat noir hante le patrimoine culturel de la France et ressurgit parfois, le temps d’une polémique.

Près de 500 000 tirailleurs (dont 272 000 du Maghreb) vinrent se battre pour un territoire qu’ils ne connaissaient pas et restent les grands oubliés des commémorations nationales. 30 000 soldats d’Afrique subsaharienne sont morts et le tirailleur sénégalais est toujours là, image d’Épinal tout sourire, tenant dans sa main une cuillère de Banania, boisson énergisante qui doit son succès à la Grande Guerre.

En 1914, le créateur de la marque, Pierre-François Lardet, a l’idée d’associer patriotisme martial et exotisme colonial. Il va s’appuyer sur la popularité des tirailleurs sénégalais. Ces « grands enfants » qui parlent « petit nègre » sont des héros sympathiques au peuple français. L’un d’eux, blessé et rapatrié du front, se retrouve embauché à l’usine de Courbevoie où il se serait exclamé « Y’a bon Banania ! » après avoir goûté la boisson chocolatée. Histoire vraie ou bonne blague, peu importe. Le slogan est génial. « Cela correspond à l’esprit colonialiste français de l’époque, déclare le directeur du musée du chocolat, Fabrice Stijnen. On peut lui faire dire ce que l’on veut… »

MAIS avec le temps, ce slogan prend une connotation raciste et cette image du tirailleur dérange, au point de devenir « hautement polémique ».

« Je déchirerai les rires banania sur tous les murs de France. »

Léopold Sédar SENGHOR (1906-2001), poème préliminaire d’Hosties noires (1948)

Le « Président-Poète », ministre français, premier Président de la République du Sénégal (1960-1980) et premier africain à siéger à l’Académie française, clame son hommage aux victimes du sacrifice volontaire devenu holocauste.

Malgré tout, en 1960, quand de nombreux pays d’Afrique accèdent à l’indépendance, l’entreprise Banania toujours prospère reçoit l’oscar de la publicité.

En 1977, « Y’a bon, Banania », slogan controversé, sera finalement abandonné. La marque plaît toujours, avec une image un peu rectifiée pour être plus honnête. Aujourd’hui, Banania s’affiche comme « le partenaire du petit déjeuner équilibré », conforme au manger-correct et à la civilisation écolo.

Joseph JOFFRE

Dûment titré, médaillé, galonné, célébré et chanté comme Foch et Clemenceau au jour de la Victoire, MAIS vivement contesté pour sa stratégie pas toujours gagnante et tragiquement coûteuse en hommes.

« Je tordrai les Boches avant deux mois. »2586

Généralissime JOFFRE (1852-1931), août 1914. G.Q.G., secteur 1 : trois ans au Grand quartier général (1920), Jean de Pierrefeu

Généralissime (chef suprême des armées en guerre et commandant à tous les généraux), tel est son titre au commencement du conflit. Cela lui donne une évidente responsabilité pour la suite des événements.

La croyance en une guerre courte prévaut en France comme en Allemagne – qui a déclaré la guerre le 3 août. Et tout commence par une guerre de mouvement. Ces mots, souvent cités, font aussi partie de la propagande.

Joffre a élaboré le plan français (plan XVII) : se fiant aux forces morales et aux baïonnettes, il prévoit la défense de l’Est. Mais la bataille des frontières va se dérouler selon le plan allemand (plan Schlieffen) : gros effectifs et artillerie lourde pour la tactique, et pour la stratégie, invasion de la Belgique. Selon le chancelier allemand Bethmann-Hollweg, le traité international garantissant la neutralité de ce pays n’est qu’un « chiffon de papier ». D’où l’attaque de la France par le nord et le contournement des défenses françaises.

« Une troupe qui ne peut plus avancer devra coûte que coûte garder le terrain conquis et se faire tuer sur place plutôt que de reculer. »2589

Généralissime JOFFRE (1852-1931), Proclamation du 6 septembre 1914. Du lycée aux tranchées : guerre franco-allemande, 1914-1916 (1916), Jules Chancel

Ordre du jour resté célèbre. Cette inflexibilité qui se passe de commentaire est suivie de cette simple phrase sur la discipline militaire : « Dans les circonstances actuelles, aucune défaillance ne peut être tolérée. »

Mais après les échecs cuisants de son armée en août-septembre, le généralissime ne comprend pas pourquoi les combattants ne chargent pas comme on l’a toujours fait et en vient à douter de la « furie française ». Autrement dit, il retourne la responsabilité sur les hommes de troupe, ignorant lui-même les conséquences et les capacités nouvelles qu’offrent les dernières évolutions technologiques sur les champs de bataille.

Après le recul terrible du mois d’août et l’envahissement du nord-est de la France, la (première) bataille de la Marne se déroule du 6 au 9 septembre. Joffre et Gallieni (nommé gouverneur de Paris) vont retourner la situation. Le mérite en revient aussi à Foch, connu pour son culte de l’offensive. Au moment le plus critique, le généralissime l’a mis à la tête de la IXe armée. Avec l’aide des fameux taxis de la Marne (1 100 chauffeurs réquisitionnés pour conduire sur le front 5 000 hommes d’infanterie), la victoire sauve de justesse la capitale de l’assaut allemand et redonne tout son prestige à Joffre.

Lors d’un déjeuner au Grand Quartier Général, à un convive lui demandant ses intentions, alors que la guerre de mouvement semblait abandonnée :
« Je les grignote. »2591

Généralissime JOFFRE (1852-1931), réponse laconique, citée dans Le Journal du 29 octobre 1914. Histoire générale et anecdotique de la guerre de 1914 (1920), Jean-Bernard

Joffre faisait souvent cette réponse, parlant des ennemis et pour justifier ses offensives.

La guerre de tranchées va commencer, guerre d’usure sur des fronts de centaines de kilomètres, réseaux ininterrompus de tranchées et d’abris. Le « grignotage », nouvelle forme de guerre à laquelle ni les hommes ni le matériel ne sont préparés, c’est l’opération de percée sans cesse à recommencer, une tranchée conquise menant à une autre, reconstituée cent mètres plus loin. Aucune manœuvre de débordement réciproque n’est plus possible et le front se solidifie de proche en proche, vers le nord, jusqu’à la mer.

Cette stratégie du « grignotage » aboutira au tragique enlisement de nos troupes à Verdun dont Joffre, en tant que généralissime, fut comptable. C’est la plus longue et meurtrière bataille de toute l’histoire. Bilan des combats sur six mois : au moins 170 000 Français morts à Verdun, 216 000 blessés, et autant sur la Somme.

« Nous avons des munitions en abondance et de nombreuses réserves. Mais vous avez surtout un indomptable courage et votre foi dans les destinées de la République. Le pays a les yeux sur vous. Vous serez de ceux dont on dira : « ils ont barré aux Allemands la route de Verdun »

Généralissime JOFFRE (1852-1931), 11 mars 1916

Certes ! Mais…

MAIS Joffre est sérieusement critiqué, d’abord pour le coût humain : l’armée française est véritablement « saignée à blanc », comme l’annonçait le commandant en chef de l’armée allemande, le général von Falkenhayn. Tout ça pour rien : les positions n’ont pratiquement pas changé ! Bilan presque aussi terrible chez l’ennemi, mais l’Allemagne saura tirer leçon (en 1940) des fautes tactiques et stratégiques – notamment l’absence de forces motorisées.

Joffre est aussi en conflit avec Londres. Étant donné leur poids dans l’armée alliée, les Britanniques lui rappellent qu’ils pourraient prendre la tête du commandement interallié. Il est également discuté pour son manque de coopération avec le pouvoir civil. On menace de lui retirer une part de ses responsabilités - il préfère démissionner, remplacé par le général Nivelle. Pour éviter tout scandale politique, le vainqueur de la Marne est promu maréchal de France le 25 décembre 1916. Mais 90 députés voteront contre cet honneur.

Jusqu’à la fin des hostilités, son rôle se limite à des missions essentiellement de prestige à l’étranger. En avril 1917, le maréchal est envoyé aux États-Unis pour conseiller le nouvel allié américain : tournée triomphale de ville en ville. Mais pour lui, le temps du combat est passé. Pas pour Foch, son subordonné qui reviendra bientôt.

Joffre aura pourtant sa place aux côtés de Foch et de Pétain au défilé de la Victoire, le 14 juillet 1919. Mort à 78 ans, il a droit à de superbes funérailles nationales. Mais le « sauveur de la Marne » est aussi « le massacreur de 14 » et demeure un personnage controversé.

Ferdinand FOCH

Même génération et même CV que Joffre, titré, médaillé, galonné, célébré et chanté avec Clemenceau au jour de la Victoire, promu in fine généralissime, maréchal et finalement gagnant, MAIS contesté pour sa stratégie de la guerre à outrance et les pertes humaines insupportables (Pétain sera traité à la prochaine guerre).

« Mon centre cède, ma droite recule, situation excellente, j’attaque. »2590

Général FOCH (1851-1929), Message au GQG (Grand Quartier Général), pendant la première bataille de la Marne, du 6 au 9 septembre 1914. Le Maréchal Foch (1918), Contamine de Latour

Pour Foch, une bataille se perd moralement, mais se gagne de même : « Une bataille gagnée, c’est une bataille dans laquelle on ne veut pas s’avouer vaincu. » La défaite semblait certaine. Il la refuse. D’où ce télégraphe envoyé à Joffre.

Au moment le plus critique, le généralissime l’a mis à la tête de la IXe armée, précisément pour son culte de l’offensive. Quatre jours de bataille acharnée, auxquels participent les fameux taxis de la Marne : 1 100 chauffeurs réquisitionnés ont conduit sur le front 5 000 hommes de la 7e DI (division d’infanterie). Le Trésor public versera 70 102 francs à la compagnie des taxis G7, appartenant au comte André Walewski (petit-fils de Napoléon Ier) : c’est lui qui a eu l’idée de cette opération, parfaitement menée par Gallieni, gouverneur de Paris.

Cette victoire sauve de justesse la capitale de l’assaut allemand et vaut une nouvelle promotion à Foch, nommé commandant en chef-adjoint de la zone nord le 4 octobre, le général Joffre retrouvant tout son prestige. Mais les Allemands lancent une nouvelle offensive, contenue au prix de très lourdes pertes. La situation se reproduit à la première bataille d’Ypres. Chaque fois, Foch va sortir les troupes françaises de situations très difficiles. Ses contre-attaque mettent en pratique les idées qu’il développait en tant qu’enseignant à l’École militaire.

La bataille de l’Artois (1915) et la bataille de la Somme (1916) totalisent quand même près de 400 000 morts ou blessés. En décembre 1916, Joffre le relève du commandement du groupe d’armées du Nord (GAN), sa doctrine de l’offensive à outrance ayant engendré de trop lourdes pertes à l’armée française. Joffre est lui-même limogé quelques jours plus tard. Les politiques ne croient plus à leurs talents de stratèges.

Foch est fatigué, malade, il aura bientôt 65 ans, limite d’âge pour exercer un commandement. Le gouvernement est divisé quant à son avenir. Mais Clemenceau arrive au pouvoir et Foch va reprendre du service en mars 1918, « chargé par les gouvernements britannique et français de coordonner l’action des armées alliées sur le front de l’Ouest ».

« Je me suis dit : essayons Foch ! Au moins, nous mourrons le fusil à la main ! J’ai laissé cet homme sensé, plein de raison qu’était Pétain ; j’ai adopté ce fou qu’était Foch. C’est le fou qui nous a tirés de là ! »

Georges CLEMENCEAU (1841-1929), président du Conseil, justifiant son choix pour la bataille de Doullens, fin mars 1918

À la publication posthume du Mémorial de Foch (1929), Clemenceau écrit Grandeurs et misères d’une victoire, son ultime ouvrage, édition également posthume (avril 1930). Il juge ainsi le chef qu’il a choisi : « Il se prend pour Napoléon […] Il y a du César dans le maréchal. Enfin, un César passé par l’École de guerre. » Adepte de l’offensive à outrance, s’inspirant de Clausewitz et de Napoléon Ier, ses idées ont influencé les officiers français en 1914. On lui a reproché par la suite un aveuglement envers les nouvelles armes (l’aviation, les chars…). C’est un problème banal et tragique : les militaires ont souvent une guerre de retard. Ce sera le cas de Pétain en 1940, alors que de Gaulle anticipait dès 1934 (Vers l’Armée de métier).

Mais Foch finit en beauté, reconnu et salué comme un grand militaire.

« Vous avez gagné la plus grande bataille de l’histoire et sauvé la cause la plus sacrée, la liberté du monde. »2615

Maréchal FOCH (1851-1929), Ordre du jour aux armées alliées, 12 novembre 1918. Histoire de France contemporaine depuis la Révolution jusqu’à la paix de 1919, volume IX (1922), Ernest Lavisse, Philippe Sagnac

Nommé généralissime en avril 1918, promu maréchal de France en août, il a planifié et mené l’offensive générale forçant l’Allemagne à demander l’armistice. Son ordre du jour est rédigé le 11 novembre à Senlis, à l’heure où Clemenceau parle à la Chambre des députés, et publié le 12 novembre : « Officiers, sous-officiers, soldats des armées alliées, après avoir résolument arrêté l’ennemi, vous l’avez pendant des mois, avec une foi et une énergie inlassables, attaqué sans répit […] Soyez fiers ! D’une gloire immortelle vous avez paré vos drapeaux. La postérité vous garde sa reconnaissance. »

« Madelon, ah ! verse à boire,
Et surtout, n’y mets pas d’eau,
C’est pour fêter la victoire,
Joffre, Foch et Clemenceau. »2616

Lucien BOYER (1876-1942), paroles, et Charles BOREL-CLERC (1879-1959), musique, La Madelon de la victoire (1918), chanson. Chansons de la revanche et de la Grande Guerre (1985), Madeleine Schmid

Cette chanson à boire éclipse presque l’autre Madelon. Clemenceau (ou plutôt l’administration) confond d’ailleurs les deux et il décore par erreur Lucien Boyer de la Légion d’honneur, le prenant pour l’auteur de Quand Madelon. Créée par Rose Amy et reprise par Chevalier, La Madelon de la victoire va devenir mondialement célèbre : « Après quatre ans d’espérance / Tous les peuples alliés / Avec les poilus de France / Font des moissons de lauriers […] / Madelon, emplis mon verre / Et chante avec les poilus / Nous avons gagné la guerre / Hein, crois-tu qu’on les a eus ! »

Foch aura droit à des obsèques nationales, le 26 mars 1929. Insigne honneur, il repose depuis 1937 sous le dôme des Invalides à Paris, parmi les grands maréchaux de France qui ont servi la nation.

SECONDE GUERRE MONDIALE

Winston CHURCHILL

« Le meilleur des Premiers ministres » dans l’Angleterre en guerre aux côtés de la France, MAIS le « vieux Lion » tient toujours des propos d’un racisme méprisant contre les Indiens, les Arabes, les Chinois… et les dirigeants juifs suspectés de bolchévisme.

« Je n’ai rien à offrir que du sang, de la sueur et des larmes. »2739

Winston CHURCHILL (1874-1965), Chambre des Communes, 13 mai 1940. Du sang, de la sueur et des larmes (posthume), Discours de Winston Churchill

Premier discours du nouveau Premier ministre anglais : le 10 mai, âgé de 65 ans, il a pris la tête d’un vrai gouvernement de coalition (conservateurs, libéraux et travaillistes) et témoigne d’une volonté de fer qui, heureusement pour la France et la suite de l’histoire, ne faiblira jamais.

De Gaulle juge vite et bien l’homme qui sera son allié numéro un : « Winston Churchill m’apparut, d’un bout à l’autre du drame, comme le grand champion d’une grande entreprise et le grand artiste d’une grande Histoire » (Mémoires de guerre, L’Appel).

MAIS l’emblématique premier ministre britannique a vu sa statue à Londres taguée d’un « was a racist ». Le « Vieux Lion » toujours populaire est mis en cause depuis des années pour certains propos et positions racistes qui dérangent.

« Je suis fortement en faveur de l’utilisation de gaz toxiques contre les tribus non civilisées. »

Winston CHURCHILL (1874-1965), phrase tirée d’un mémorandum resté longtemps secret

Mais à notre époque, le « secret » n’est plus ce qu’il était… et l’histoire se nourrit de ces archives.

Churchill argumente en qualifiant le gaz d› « arme plus miséricordieuse que les explosifs de forte puissance », car elle cause moins de pertes. Et de conclure : « En quoi serait-il injuste qu’un artilleur britannique tire un obus qui fera éternuer ledit indigène ? Vraiment, c’est trop bête. »

Churchill était par ailleurs persuadé que des Juifs ont favorisé l’essor du bolchévisme en Russie, le pire fléau de l’Occident. « Il n’est pas nécessaire d’exagérer le rôle joué dans la création du bolchevisme et dans la réalisation effective de la révolution russe, par ces juifs internationaux et pour la plupart athées ; leur rôle est certainement très important et il l’emporte probablement sur tous les autres. À l’exception notable de Lénine, la majorité des personnalités de premier plan sont juives. De plus, la principale inspiration et force motrice vient des dirigeants juifs. » Il tempère quand même en notant que la grande majorité des Juifs rejetaient le bolchévisme.

En 1943, quand les Indiens réclament leur indépendance en échange d’un effort de guerre au profit des Britanniques, il répond : « Je hais les Indiens. C’est un peuple bestial, avec une religion bestiale. »

Les Chinois ne sont pas mieux traités : « Je pense que nous devrons prendre les Chinois en main. Je crois qu’à mesure que les nations civilisées deviennent plus puissantes, elles deviendront plus impitoyables, et le moment viendra où le monde ne supportera plus l’existence de grandes nations barbares qui peuvent à tout moment s’armer et menacer les nations civilisées. Je crois en la partition ultime de la Chine, je veux dire ultime. J’espère que nous n’aurons pas à le faire de nos jours. La lignée des Aryens est appelée à triompher. »

Bien des années après, le président américain Roosevelt jugera sévèrement son principal allié dans la guerre mondiale : il avait « quarante ans de retard sur la Chine », il parlait des Chinois en disant « les Chinks », « les Chinamen ». Roosevelt jugeait cette attitude très dangereuse, prévoyant que la Chine accéderait au rang de grande puissance militaire.

Philippe PETAIN

Cas plus simple (ou plus compliqué), personnage à deux vies, héros incontesté de la Première Guerre mondiale, MAIS vaincu honteux de la Seconde.

« Courage ! On les aura ! »2597

Général PÉTAIN (1856-1951), derniers mots de l’Ordre du jour rédigé le 10 avril 1916. Verdun, 1914-1918 (1996), Alain Denizot

Première Guerre mondiale. Ce n’est pas sans mal et sans morts que Pétain va défendre Verdun !

Commandant de la IIe armée, il prend la direction des opérations après la première offensive allemande, réorganise le commandement et le ravitaillement des troupes par la Voie sacrée (qui relie Verdun à Bar-le-Duc). L’équilibre des forces est rétabli et la brèche colmatée. Il redonne confiance aux « poilus » et même s’il n’obtient pas les renforts demandés, il impose que les troupes soient périodiquement remplacées - système du « tourniquet », en vertu de quoi 70 % de l’armée française a « fait » Verdun.

Dix mois de batailles de tranchées, chaque jour 500 000 obus de la Ve armée allemande pour « saigner à blanc l’armée française », 80 % des pertes venant de l’artillerie. Chaque unité perdra plus de la moitié de ses effectifs – 162 000 morts et 216 000 blessés, côté français. La saignée est comparable, chez l’ennemi.

Dans l’« enfer de Verdun » - le mot est juste -, la résistance française devient aux yeux du monde un exemple d’héroïsme et de ténacité, demeurant une page de l’histoire de France et un symbole pour des générations. Cependant que Pétain reste comme le vainqueur de Verdun. Mais pour « avoir » ainsi les Allemands, la guerre d’usure a dépassé les forces physiques, morales, militaires du pays.

« C’est le cœur serré que je vous dis aujourd’hui qu’il faut cesser le combat. »2752

Maréchal PÉTAIN (1856-1951), Allocution à la radio, 17 juin 1940

Deuxième Guerre mondiale. Le chef du gouvernement de la France s’adresse ici aux troupes, du moins à ce qu’il en reste, et fait transmettre à Hitler une demande d’armistice : Pétain est persuadé que l’Angleterre ne va pas s’obstiner dans un vain combat, que la paix est proche et lui permettra de restaurer l’ordre.

« J’ai été avec vous dans les jours glorieux. Chef du gouvernement, je suis et je resterai avec vous dans les jours sombres. Soyez à mes côtés. Le combat reste le même. Il s’agit de la France, de son sol, de ses fils. »2757

Maréchal PÉTAIN (1856-1951), Conclusion de l’appel lancé à la radio, 20 juin 1940

De Gaulle a lancé son (premier) Appel du 18 juin à la BBC de Londres : l’autre voix de la France parle aux Français, pas encore vraiment déchirés entre les deux. La radio officielle est bien plus écoutée. Pétain dénonce les causes de la défaite et son constat n’est pas discutable : « Trop peu d’enfants, trop peu d’armes, trop peu d’alliés. » Tel un père sévère, le vieux maréchal fait aussi la morale : « Depuis la victoire [de 1918], l’esprit de jouissance l’a emporté sur l’esprit de sacrifice. On a revendiqué plus qu’on a servi. On a voulu épargner l’effort. »

L’armistice sera signé le 22 juin à Rethondes, très symboliquement dans le wagon où le maréchal Foch imposa à l’Allemagne vaincue les clauses de l’armistice du 11 novembre 1918. Il prend effet le 25.

« J’entre aujourd’hui dans la voie de la collaboration. »2772

Maréchal PÉTAIN (1856-1951), Annonce faite aux Français, 30 octobre 1940. La Deuxième Guerre mondiale : chronologie commentée (1995), André Kaspi, Ralph Schor

Rencontre historique à Montoire, entre le chef de l’État français et le Führer du Reich allemand, le 24 octobre.

Le vieil homme est-il dupe, ignorant que « la servitude n’engendre jamais qu’une plus grande servitude », comme dira de Gaulle ? Et que devait être cette « collaboration » dans son esprit déjà fatigué ? Simple routine administrative et économique déjà imposée dans les faits depuis l’armistice ? Collaboration plus poussée, politique, diplomatique, un jour même militaire, contre l’Angleterre ? Ou, plus grave, adhésion idéologique à la doctrine nazie dont nul ne peut plus ignorer les fatalités criminelles ? L’histoire ne le dit pas et Pétain non plus.

Deux choses sont sûres. Pétain prend la responsabilité de son attitude : « Cette politique est la mienne […] c’est moi seul que l’histoire jugera. » Et il accentue la division des Français, renforçant les collaborateurs dans la voie de la collaboration (avec le Rassemblement national populaire, créé à Paris le 24 janvier 1941) et les résistants dans celle de la Résistance, encore diffuse, inorganisée, mais diverse, populaire et quotidienne.

MAIS…  Faut-il déboulonner Pétain, statue fantôme ou souvenir historique ?

« On ne tire pas sur une ambulance. »3149

Françoise GIROUD (1916-2003), L’Express, 24 avril 1974

Le trait d’une charité sans pitié visait Chaban-Delmas, candidat aux présidentielles dont la cote ne cessait de baisser dans les sondages, début mai 1974. Mais l’expression vise aussi les « causes perdues » ou déjà entendues.

La France a déjà « oublié Pétain » : pas de statues visibles dans l’espace public, pas de bâtiments ou de sites à son nom, pas de culte officiel. Le président Mitterrand (socialiste) cultiva une certaine ambiguïté propre à son caractère en faisant fleurir chaque année la tombe du « héros de la bataille de Verdun ». Mais Mitterrand est mort depuis longtemps… Seule une extrême-droite (extrêmement minoritaire ?) a encore le culte du Maréchal.

La question se pose quand même aux États-Unis. Déboulonnage et « décommémoration » furent d’actualité, ces dernières années. Surtout visés, les statues sudistes – c’est leur histoire et leur problème.

Aujourd’hui (décembre 2020), Google Maps recense encore six « Pétain Street » et autant de « Pétain Avenue » aux USA. Aux dernières nouvelles, c’est surtout la plaque honorant Pétain qui pose problème. La ville de New York l’accueillit en triomphe le 26 octobre 1931 et c’est à ce titre qu’une plaque lui est dédiée sur Broadway. Jusqu’en 1940, le héros de Verdun fut couvert d’honneurs. La plaque sera retirée, a promis le maire de New York qui doit avoir d’autres problèmes plus urgents, avec la Covid-19.

Signalons, dénonçons Pierre Laval, chef de la Milice du régime de Vichy et architecte de la rafle du Vel d’Hiv : il possède aussi sa plaque sur Broadway. Sacré passé !

Paul CLAUDEL

Dramaturge de génie, diplomate de carrière et catholique de passion, MAIS parcours politique chaotique et attitude bourgeoise plus qu’ambiguë face à sa sœur aînée,  Camille, maîtresse de Rodin, sculptrice de génie sombrant dans la folie.

« L’ordre est le plaisir de la raison: mais le désordre est le délice de l’imagination. »,

Paul CLAUDEL (1868-1955), Le Soulier de satin (1929)

Torturé, complexe, lyrique, c’est sans doute son chef d’œuvre, en tout cas sa pièce de théâtre la plus célèbre (avec Partage de midi et L’Annonce faite à Marie), sinon la mieux comprise. Claudel a ses admirateurs et ses détracteurs – comme tout grand artiste. Les contradictions font partie de son œuvre, comme sa vie se ressent de ses perpétuels déchirements amoureux, mystiques, politiques qui animent tous ses personnages.

Cette fresque dramatico-historiques se déroule au Siècle d’or espagnol en quatre journées « à l’espagnole ». La version intégrale dure 11 heures. Le plus souvent, on présente un montage de cinq heures – le temps de « cerveau disponible » d’un amateur de bonne volonté. Rappelons le mot attribué au général de Gaulle (ou à Sacha Guitry) après une représentation du Soulier à la Comédie-Française, lieu de la création en 1943 : « Heureusement qu’il n’a pas écrit la paire ! »

Ça reste un souvenir inoubliable, surtout avec les interprétations remarquables du couple Doña Prouhèze et Rodrigue : Prouhèze, dans une prière, offre à la Vierge son soulier de satin, afin que, dit-elle, si elle s’élance vers le mal, elle le fasse du moins d’un pied boiteux. Doña Musique est un merveilleux second rôle, mariée à Don Pélage, lancée à son tour dans des aventures épiques.

MAIS la trajectoire politique de Claudel pendant la guerre est aussi complexe et moins brillante que ses grandes œuvres. Le diplomate qu’il fut pendant près de quarante ans n’a pas le juste regard de son confrère Jean Giraudoux.

« Croquemitaine se dégonflera. »2705

Paul CLAUDEL (1868-1955), Le Figaro, 19 août 1939. Mémoires du monde : cinq siècles d’histoires inédites et secrètes au Quai d’Orsay (2001), Sophie de Sivry, Emmanuel de Waresquiel, Ministère des affaires étrangères. Archives

Claudel fait naturellement allusion à Hitler. Le dramaturge qui fut également diplomate, de 1893 à 1936, se trompe. Hitler envahit la Pologne, le 1er septembre.

« Monsieur le Maréchal, voici cette France entre vos bras, qui n’a que vous et qui ressuscite à voix basse […] France, écoute ce vieil homme, sur toi qui se penche et qui te parle comme un père. Fille de Saint Louis, écoute-le. »2777

Paul CLAUDEL (1868-1955), Paroles au Maréchal, Le Figaro, 10 mai 1941. L’Action française racontée par elle-même (1986), Albert Marly

C’est un étrange poème. Faut-il rappeler que Claudel s’est converti au catholicisme, touché par la grâce, aux vêpres de Noël 1886. « J’étais debout, près du deuxième pilier, à droite, du côté de la sacristie. Les enfants de la maîtrise étaient en train de chanter ce que je sus plus tard être le Magnificat. En un instant mon cœur fut touché et je crus. »

Quant au Maréchal, c’est un fait avéré : la France de 1941 reste en majorité pétainiste, de façon plus ou moins convaincue, contrainte, affichée, résignée, pratique, idéologique, naïve.

« Tout de même, dit la France, je suis sortie ! […] Tout de même, ce que vous me dites depuis quatre ans, mon général, je ne suis pas sourde […] et j’ai compris […] Et vous monsieur le général, qui êtes mon fils, et vous qui êtes mon sang… »2817

Paul CLAUDEL (1868-1955), Ode publiée dans Le Figaro, 23 décembre 1944. Œuvres poétiques (1967), Paul Claudel

Dédiée au général de Gaulle. « Ceux de la onzième heure » sont nombreux, Français rejoignant la Résistance au dernier moment. Le dernier hiver de la guerre est très dur : pour les prisonniers de guerre, les travailleurs du Service du travail obligatoire (STO) et tous les déportés dont la condition s’aggrave encore. En France même, le rationnement est encore plus rigoureux que sous le régime allemand, les bombardements qui ont préparé le débarquement et les combats qui accompagnent la libération du territoire ont détruit les communications, des quartiers, des villes.

Reste la question des relations de Paul avec sa sœur aînée, Camille Claudel. Elle, c’est un peu la honte d’une grande famille bourgeoise et catholique : une artiste qui sculpte des œuvres provocantes et expose en même temps sa folle passion pour Rodin, artiste et homme tout aussi choquant. Isabelle Adjani et Gérard Depardieu ont prêté leur folie magnifique à ces deux personnages quasi-claudéliens dans un film inspiré, signé d’un véritable sculpteur d’images, Bruno Nuytten (1988).

« À Paris, Camille folle. Le papier des murs arraché à longs lambeaux, un seul fauteuil cassé et déchiré, horrible saleté. Elle, énorme et la figure souillée, parlant incessamment d’une voix monotone et métallique. »

Paul CLAUDEL (1868-1955), Journal

Il décrit sa sœur, son aînée jadis aimante, déjà très atteinte dans son atelier où elle s’enferme, solitaire, abandonnée. Son amant Rodin a contribué au mal, mais sa famille n’a pas arrangé la situation et son frère Paul ne lui rendra pas plus d’une douzaine de visites en trente ans d’asile. Elle l’a sculpté jadis, elle va hanter son théâtre, obsession toujours présente même si sa mère et lui-même se sont hâtés de la « placer » à l’écart de la société.

QUATRIÈME ET CINQUIÈME RÉPUBLIQUES

André MALRAUX

Acteur et auteur du siècle, personnage incontournable et passionné, MAIS condamné en 1924 pour trafic d’objets d’art sur le temple d’Angkor et mythomane avéré sa vie durant.

« Les grandes manœuvres sanglantes du monde étaient commencées. »2684

André MALRAUX (1901-1976), L’Espoir (1937)

L’écrivain aventurier s’est engagé aux côtés des républicains qui combattent au cri de «  Viva la muerte », dans cette guerre civile qui va durer trois ans et servir de banc d’essai aux armées fascistes et nazies. Contrairement à tous ses confrères qui ont cru à la paix du monde, Malraux, des Conquérants (1928) à L’Espoir (1937) en passant par La Condition humaine (prix Goncourt 1933), se fait l’écho fidèle et prémonitoire de ce temps d’apocalypse. Lui-même devient un héros révolutionnaire à l’image des héros de ses livres, avec un très grand talent, dans l’aventure comme dans la littérature.

MAIS… Malraux fut un grand mythomane.

Il a rédigé lui-même son dossier militaire, s’attribuant des blessures fictives. Il a prétendu être entré dans la Résistance dès 1940, c’est faux.

Olivier Todd le rappelle (André Malraux : une vie, 2001) : selon Clara Malraux (sa première femme), il était en permanence un escroc génial. Paul Nothomb (son ami et son compagnon dans la guerre d’Espagne) affirme que Malraux n’était jamais dupe de ses propres fabulations.
Dans plusieurs textes, il se plaît à relativiser la valeur de la véracité :

« La mystification est éminemment créatrice. » La Voie royale – un personnage parle du faux en bibliophilie, qu’il pratiqua lui-même.
« Tout aventurier est né d’un mythomane. » La Voix royale - l’auteur parle en son propre nom.
« Ce n’était ni vrai ni faux, c’était vécu. » La Condition humaine – clé du personnage Malraux, selon son biographe Olivier Todd.
« Je fabule, mais le monde commence à ressembler à mes fables. » Le mot (non sourcé) lui est attribué pendant la Seconde Guerre mondiale.

Reste un fait parfaitement avéré, le trafic d’objets d’art – trois statues khmères prises dans un temple.

À 22 ans, marié à Clara, ayant besoin d’argent, déjà très amateur d’art, Malraux obtient une mission archéologique du ministère des Colonies en septembre 1923, prétendant suivre des cours à l’École des langues orientales. Il fait aussi miroiter la promesse d’un don financier important, s’engage à laisser la direction des fouilles à l’École française d’Extrême-Orient (EFEO), renonce à tout droit de propriété sur les œuvres découvertes et se contentera d’en faire des moulages pour le musée Guimet.

Parti de Marseille pour Hanoï, il s’établit près du complexe archéologique d’Angkor, le 13 octobre 1923. Mi-décembre, après repérage, Malraux et ses compagnons découpent à la scie près d’une tonne de statuettes et de bas-reliefs arrachés au temple de Banteay Srei, le plus extraordinaire des quelque 400 temples de la zone. Ils emballent le butin et l’emportent, pour vendre à un collectionneur.

Le conservateur du Musée du Cambodge donne l’alerte :  arrêtés à leur arrivée à Phnom-Penh le 23 décembre, assignés à résidence à l’hôtel Manolis, ils ne peuvent plus payer la note au bout de quatre mois. Le 21 juillet 1924, Malraux est condamné à trois ans de prison ferme.

Clara, censée n’avoir fait que suivre son mari, n’est pas inculpée. Elle repart pour Paris et mobilise les intellectuels de l’époque : Marcel Arland, Charles Du Bos, Louis Aragon, André Breton, François Mauriac, André Gide, Jean Paulhan et Max Jacob signent une pétition réclamant un statut privilégié pour « ceux qui contribuent à augmenter le patrimoine intellectuel de notre pays. » Étonnante formule ! En appel le 28 octobre 1924, la peine de Malraux est réduite à un an et huit mois de prison avec sursis, sans interdiction de séjour.

Épilogue inattendu de cette affaire, le temple de Banteay Srei promis tôt ou tard à la destruction bénéficie de la médiatisation du procès : il sera classé et restauré par l’EFO sous la responsabilité du « conservateur d’Angkor », Henri Marchal, conseiller technique à la conservation des monuments historiques du Laos. 

Simone de BEAUVOIR

Icône du féminisme, MAIS à la belle époque du terrorisme intellectuel de gauche, « Notre-Dame de Sartre » est politiquement condamnable.

« Le présent enveloppe le passé et dans le passé toute l’Histoire a été faite par des mâles. »2854

Simone de BEAUVOIR (1908-1986), Le Deuxième Sexe (1949)

Livre événement dans l’histoire du féminisme, mouvement qui ne s’est pas arrêté au vote attribué aux femmes, après la Libération. Une femme est ministre (éphémère) pour la première fois en 1947 : Germaine Poinso-Chapuis (à la Santé publique, dans le gouvernement Schuman). Mais c’est la Cinquième République qui, dans les années 1970, verra aboutir l’essentiel des luttes au féminin, d’où une égalité de droit, sinon de fait.

« La vérité est une, seule l’erreur est multiple. Ce n’est pas un hasard si la droite professe le pluralisme. »2834

Simone de BEAUVOIR (1908-1986). Les Temps modernes, nos 109 à 115 (1955), Jean-Paul Sartre

Ces mots datent de 1955, belle époque du terrorisme intellectuel. Le sectarisme de la gauche communiste sévit naturellement contre la droite, mais se déchaîne aussi en guerre des gauches. Il faudra attendre les années 1980 – démobilisation, désillusion, dépolitisation – pour voir le déclin de tous les « ismes ».

Simone de Beauvoir donne aujourd’hui son nom à quelques collèges, bibliothèques et médiathèques, et au 37e pont de Paris sur la Seine – en réalité, une passerelle consacrée aux piétons et aux vélos, entre les ponts de Bercy et de Tolbiac. Une place Sartre-Beauvoir existe à Paris, dans le 6è arrondissement.

Enfin, en 2020, son buste est inauguré officiellement à Rouen. Signe particulier, c’est l’œuvre des lycéens de deux établissements proches, celui des Bruyères pour la partie création artistique et Colbert pour la partie fonderie. « À l’origine, c’est une association de femmes, les Marcheuses du quartier Grammont où se trouve la médiathèque Simone-de-Beauvoir, qui voulait redonner de la visibilité aux femmes dans la ville. Cette œuvre, c’est une façon de le faire tout en proposant aux élèves d’avoir une approche quasi-professionnelle d’un projet artistique sur le long terme », résume Sébastien Kirch, professeur d’arts plastiques en charge de cette opération financée par la municipalité rouennaise.

Jean-Paul SARTRE

Maître à penser d’une ou deux générations, marxiste inconditionnel, MAIS son déni de réalité politique est trop évident.

« L’existentialisme est un humanisme. »2859

Jean-Paul SARTRE (1905-1980), Salle des Centraux, 29 octobre 1945. L’Existentialisme est un humanisme (1948), Jean-Paul Sartre

Thème de sa conférence, et titre de l’essai qui résume sa philosophie.

Moraliste confronté aux problèmes de l’après-guerre, attaqué par les communistes et par certains catholiques, il fait scandale, il fait salle comble. Toute une génération va vivre à l’heure des engagements sartriens plus ou moins bien compris, à l’ombre du clocher de la « cathédrale de Sartre », dans ce Saint-Germain-des-Prés d’après-guerre, qui est aussi celui des caves, du jazz, de Boris Vian et de Juliette Gréco – une façon de revivre et d’être libre.

« [Le prolétariat] ne songe pas à réclamer la liberté politique, dont il jouit après tout et qui n’est qu’une mystification ; de la liberté de penser, il n’a que faire pour l’instant ; ce qu’il demande est fort différent de ces libertés abstraites : il souhaite l’amélioration matérielle de son sort, et plus profondément, plus obscurément aussi, la fin de l’exploitation de l’homme par l’homme. »2873

Jean-Paul SARTRE (1905-1980), Situations II (1948)

Il écrit aussi : « Totalement conditionné par sa classe, son salaire, la nature de son travail, conditionné jusqu’à ses sentiments, jusqu’à ses pensées, c’est lui [l’ouvrier] qui décide du sens de sa condition et de celle de ses camarades, c’est lui qui, librement, donne au prolétariat un avenir d’humiliation sans trêve ou de conquête et de victoire, selon qu’il se choisit résigné ou révolutionnaire. »

MAIS… son inconditionnalité idéologique tourne au déni de réalité.

« [Le marxisme], c’est le climat de nos idées, le milieu où elles s’alimentent, c’est le mouvement vrai de ce que Hegel appelait l’Esprit objectif […] Il est à lui seul la culture. »2905

Jean-Paul SARTRE (1905-1980). Les Temps modernes, nos 121 à 125 (1956), Jean-Paul Sartre

Peu de temps avant le XXe Congrès du PC de l’Union soviétique, tenu en février 1956, Sartre assure : « Porté par l’Histoire, le PC manifeste une extraordinaire intelligence objective, il est rare qu’il se trompe. » La suite va bientôt démentir ces propos.

« Il ne faut pas désespérer Billancourt. »2907

Jean-Paul SARTRE (1905-1980), « d’après » Nekrassov, créé au Théâtre Antoine, 1955

Mot apocryphe ou, plus exactement, tour de passe-passe. Nekrassov est un malentendu : pièce à message, jugée communiste par les anticommunistes et anticommuniste par les communistes, c’est un échec théâtral. Le mot est aussi un bel exemple de « récupération », ce que Sartre déteste et nomme « le baiser de la mort ». Mais c’est une manipulation, donc la preuve de l’importance du texte. Il a écrit deux répliques : « Il ne faut pas désespérer les pauvres » et « Désespérons Billancourt ». La contraction des deux donne cette fameuse phrase. Qu’il n’aurait jamais dite, même si le mot lui a été prêté, en Mai 1968.

Il le pense peut-être, le 4 novembre 1956, quand 2 500 chars soviétiques interviennent en Hongrie pour écraser la tentative de libéralisation du régime. Le 9, dans une interview à L’Express, il dénonce « la faillite complète du socialisme en tant que marchandise importée d’URSS » et se tourne vers d’autres communismes, voulant préserver l’élan révolutionnaire de la classe ouvrière en France. « Il ne faut pas désespérer Billancourt. »

Pablo PICASSO

Génie du siècle à l’œuvre multiforme, MAIS monstre misogyne et obsédé sexuel.

« Je ne cherche pas, je trouve. »3142

Pablo PICASSO (1881-1973). Le Sens ou La Mort : essai sur Le Miroir des limbes d’André Malraux (2010), Claude Pillet

Le 8 avril 1973 meurt à Mougins le plus grand peintre du siècle, âgé de 91 ans et travaillant jusqu’au bout – il fut aussi dessinateur, graveur, sculpteur, céramiste. Un mythe toujours vivant. En 1907, ses Demoiselles d’Avignon, rupture avec l’art figuratif et attentat contre la vraisemblance, provoquèrent stupeur et scandale. Malraux voit dans l’ensemble de son œuvre « la plus grande entreprise de destruction et de création de formes de notre temps. »

Les années 1970 et 1980 marquent l’explosion du marché de l’art, avec une inflation record des prix de vente : Yo Picasso (Moi Picasso, autoportrait) voit son prix décupler de 1981 à 1989 (310 millions de francs). En 2010, Nu au plateau de sculpteur (portrait de sa maîtresse et muse Marie-Thérèse Walter en 1932) bat le record de l’œuvre d’art la plus chère jamais vendue aux enchères : adjugée pour 106,4 millions de dollars chez Christie’s à New York.

MAIS… Picasso à la fin de sa vie a scandalisé les Américains, certes pudibonds à l’époque :

« Un vieillard sénile dans le couloir de la mort, habité par une lubricité dégradante ! »

Philippe SOLLERS (né en 1936), Figaro-Magazine, juillet 2011

L’essayiste et philosophe se plaît à citer cette phrase dans un article consacré au thème qui lui est cher, la luxure, indispensable à l’art digne de ce nom.

Praticien de la rhétorique du renversement des valeurs cher à Nietzche, servant à déstabiliser les idoles (comme à déboulonner les statues), il revient à ce sujet de choix, dans Portraits de femmes (2013).

« Picasso ? Un monstre misogyne, entièrement tourné vers lui-même. Un sadique, un pervers, un mégalomane absolu. Un obsédé sexuel comme le montrent ses deniers barbouillages. Dora Maar pleure toujours, se met à peindre et devient mystique, pendant que Françoise Gilot peint de grands draps rouges ésotériques. Quant à Marie-Thérèse Walter et Jacqueline Picasso, elles se suicident après la mort de leur amour persécuteur. Tristes tropiques. »

Rappelons la liste de ses muses : Fernande, Eva, Olga, Marie-Thérèse, Dora Maar, Françoise, Geneviève, Jacqueline. Elles lui doivent aussi d’être entrées dans l’histoire de l’art.

Marguerite DURAS

Intouchable icône des lettres, MAIS son article dans Libé sur l’affaire Grégory dépasse les bornes du droit d’expression.

« L’écrit ça arrive comme le vent, c’est nu, c’est de l’encre, c’est l’écrit, et ça passe, comme rien d’autre ne passe dans la vie, rien de plus, sauf elle, la vie. »

Marguerite DURAS (1914-1996), Écrire (1995)

Relation très particulière à l’écriture, au style, mais aussi au sexe, à l’amour, à l’alcool, à la mère, au Vietnam de son enfance, au Parti communiste français, au Pouvoir politique et à la gauche, au pouvoir de l’image et du son, à la cinéphilie, à la célébrité, aux faits divers médiatiques, à la vie et à la mort… Rien n’est simple chez cette femme qui passionne les Durassiens ou qui ennuie les profanes, mais qui existe toujours, avec une originalité naturelle et obsessionnelle n’appartenant qu’à elle.

Autant que faire se peut, à la fin de sa vie chaotique, elle explique son propos dans la 4è de couverture de son essai : « Il faut toujours une séparation d’avec les autres gens autour de la personne qui écrit les livres. C’est une solitude essentielle. C’est la solitude de l’auteur, celle de l’écrit. Pour débuter la chose, on se demande ce que c’était ce silence autour de soi. Et pratiquement à chaque pas que l’on fait dans une maison et à toutes les heures de la journée, dans toutes les lumières, qu’elles soient du dehors ou des lampes allumées dans le jour. Cette solitude réelle du corps devient celle, inviolable, de l’écrit. »

Prix Goncourt 1984 pour l’Amant, romancière traduite en quelque 35 langues, mais cinéaste plus confidentielle, elle prête sa plume au théâtre, au journalisme, à l’auto-adaptation de telle ou telle de ses œuvres.

MAIS… la création inspirée n’a pas forcément tous les droits et la liberté d’expression doit respecter la vie d’autrui. L’« Affaire du petit Grégory » , fait divers célèbre et toujours « en question » trente-six ans après le drame, a sans doute trop et mal inspiré l’auteur s’improvisant journaliste, passionnément à la folie. En tout cas, l’affaire dans l’affaire pose un vrai problème.

« Sublime, forcément sublime. »3254

Marguerite DURAS (1914-1996), tribune dans Libération, 17 juillet 1985

Serge July, patron de Libé, a envoyé Marguerite Duras sur le lieu du drame qui bouleverse la France, depuis le 16 octobre 1984. À Lépanges-sur-Vologne, on a retrouvé dans la Vologne le corps du petit Grégory, 4 ans, noyé, pieds et poings liés. Duras demande à rencontrer la mère, qui refuse. Christine Villemin subit un harcèlement médiatique qui se nourrit du mystère et des rebondissements de l’affaire.

Duras, auteur obsessionnellement fascinée par les faits divers, adopte une méthode « d’imprégnation du réel ». Sans preuves, au mépris de la présomption d’innocence, elle se fait médium pour accéder à la vérité : « Dès que je vois la maison, je crie que le crime a existé. Je le crois. Au-delà de toute raison […] On l’a tué dans la douceur ou dans un amour devenu fou. » Et le « sublime, forcément sublime » devient « coupable, forcément coupable. »

Fort embarrassé, July rédige un avertissement sur « la transgression de l’écriture », rappelant la liberté inhérente à l’écriture de l’artiste. Mais vu la notoriété de l’artiste et la médiatisation de l’affaire, une polémique s’ensuit.

Selon Laure Adler, sa biographe, « Marguerite Duras se défendra toujours de ce « sublime, forcément sublime » ; elle dira l’avoir barré avant de remettre son texte au journal et reprochera à Serge July de l’avoir rétabli sans l’avoir consultée. Mais, pour le reste, elle confirmera ce qu’elle a alors, sous le coup de l’émotion, écrit, relu sous forme manuscrite, puis corrigé sur les épreuves d’imprimerie. »

En 2006, Denis Robert, qui suivait en 1985 l’affaire Grégory pour Libération, donne une version contraire : le texte est en réalité une « version allégée » d’une première tribune, refusée par la rédaction du journal, et dans laquelle Duras « développait l’idée qu’une mère qui donne la vie a le droit de la retirer ».

Abbé PIERRE

Une icône très populaire au service des sans-logis, un passé de résistant au service des juifs, MAIS « négationniste » en fin de vie, un dérapage incontrôlé qui stupéfie.

« Mes amis, au secours ! Une femme vient de mourir de froid sur le trottoir du boulevard de Sébastopol. Elle serrait dans ses mains le papier par lequel on l’avait expulsée de son logement. Chaque nuit dans Paris, ils sont plus de deux mille à geler dans la nuit, sans toit, sans pain. »2887

Abbé PIERRE (1912-2007), Premiers mots de l’appel lancé à la radio dans l’hiver 1954. Emmaüs et l’abbé Pierre (2008), Axelle Brodiez-Dolino

1er février. Ce soir-là, dans un grand élan de colère, l’abbé Pierre fonce à Radio Luxembourg et s’empare du micro. Ce prêtre catholique fut résistant pendant la guerre et député MRP jusqu’en 1951, avant de renouer avec sa vocation première de prêtre aumônier, dans le cadre du Mouvement Emmaüs, organisation caritative laïque, créée en 1949.

L’abbé Pierre demande que le soir même, dans tous les quartiers de Paris, s’ouvrent des centres de dépannage, qu’on y apporte couvertures, paille, pour accueillir tous ceux qui souffrent quels qu’ils soient, et qu’ils puissent y dormir, y manger, reprendre espoir, savoir qu’on les aime et qu’on ne les laissera pas mourir. C’est la misère des laissés-pour-compte de la croissance économique. Trente ans plus tard, Coluche lancera ses « Restos du cœur ». Le quart-monde existe toujours et chaque époque crée ses nouveaux pauvres, en dépit des minima sociaux et des secours publics.

MAIS… l’image iconique et médiatique est soudain brouillée. Comment l’abbé Pierre peut-il cautionner publiquement la thèse négationniste de Roger Garaudy, condamné le 27 février 1998 pour contestation de crimes contre l’humanité et diffamation raciale ?
« Loin de se borner à une critique du sionisme […] Roger Garaudy s’est livré à une contestation virulente et systématique des crimes contre l’humanité commis contre la communauté juive ».
Attendu du tribunal au procès Garaudy en 1998.

Rejetant l’argument selon lequel son livre serait « antisioniste » et non « antisémite », les magistrats expliquent que l’auteur, « bien qu’il s’en défende, présente sous forme d’une critique politique d’Israël ce qui n’est qu’une mise en cause de l’ensemble des Juifs ». Jugement confirmé en appel le 16 décembre 1998, Garaudy étant en outre condamné pour provocation à la haine raciale.

Résistant incontestable, ayant risqué sa vie pour sauver des juifs avant de rejoindre le maquis du Vercors, l’abbé Pierre ne peut être soupçonné d’antisémitisme. Mais ni le grand âge ni l’amitié ne suffisent à expliquer son engagement aux côtés de Garaudy. L’abbé Pierre, dans son échange avec cet ami, poursuit quarante années de débat - en 1992, il préfaça un de ses livres.

Résumons le dossier en deux pièces.

1/ Qui est Roger Garaudy ?

Philosophe et écrivain, né en 1913 à Marseille, figure très en vue du Parti communiste dont il est finalement exclu, il se rapprocher des milieux écologistes conservateurs, puis de l’extrême-droite. Il s’est aussi engagé « en religion », converti successivement au protestantisme, au catholicisme, puis à l’islam. Parcours intellectuel plus chaotique que la moyenne, à cette époque où l’engagement des intellectuels (de gauche) est de règle.

Il se fait également remarquer par un négationnisme très polémique, sur le goulag quand il est communiste, puis la Shoah à partir de 1996, d’où sa condamnation. De nombreux ouvrages reflètent et ponctuent ce parcours, mais il subit un vrai  lynchage médiatique pour son dernier livre Les mythes fondateurs de la politique israélienne (publié confidentiellement en 1995, réédité à compte d’auteur en 1996).

L’accusé et son avocat Jacques Vergès sont trop heureux d’annoncer le soutien du très populaire abbé Pierre. Sa lettre choque l’opinion publique, le scandale est aussitôt médiatisé. Voir Libération du 22 avril 1996. « Pas ça et pas lui ! » On peut chercher des excuses : l’âge et l’amitié entre Roger Garaudy, 82 ans, et Henry Grouès dit l’abbé Pierre, 83 ans, leur relation née dans les années 50 quand le premier, au bureau politique du PCF, devient l’interlocuteur du second, député MRP. Mais la lettre ne passe pas !

2/ Lettre de soutien de l’abbé Pierre à son ami Garaudy, 15 avril 1996.

Citons les premiers et les derniers mots.

« Très cher Roger (…) Retiens de ces lignes la force et la fidélité de mon affectueuse estime et de mon respect pour l’énorme travail de ton nouveau livre. Le confondre avec ce qui fut appelé « révisionnisme » est une imposture et véritable calomnie d’inconscients. Ton frère, Abbé Pierre. »

Entre ces deux formules, le texte se déploie sans ambiguïté, la forme étant aussi troublante que le fond :

« Il faut tout faire, et je m’y emploie, pour que bientôt des historiens vrais, de la même passion du vrai qui est la tienne, s’attachent à débattre avec toi (de ton nouveau livre). Les insultes contre toi que j’ai pu connaître (jusque dans un quotidien que j’estime le plus pour son habituelle objectivité), qui t’ont accablé de toutes parts sont déshonorantes pour ceux qui, comme à la légère, t’en accablent (…) Tu es un de ces hommes qui ne cessera jamais, jusqu’au face à face avec l’Infini Amour, d’être tourmenté d’une dévorante faim d’Absolu. Je plains ceux qui sont si superficiels, ou pressés de trop d’autres « faits divers », qu’ils n’aient pas su respecter et aimer tes recherches, et la façon dont (en toute ta vie) tu as voulu cueillir et rassembler tout Absolu, perçu fût-ce très parcellaire, en toutes les spiritualités entre lesquelles si sincèrement se partagent (et parfois égarées se combattent) les humains de toute la terre et de tous les siècles (…)

L’Histoire jugera, mais d’ores et déjà, seuls le nom, l’action et la Fondation de l’abbé Pierre nous restent en mémoire.

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