Citations référentielles : le miroir de l’Histoire (Cinquième République après de Gaulle) | L’Histoire en citations
Édito de la semaine

 

Cet édito conclut notre série sur les citations référentielles, en dix épisodes classés par périodes historiques. Nous vous invitons à les découvrir !

Les citations « référentielles » (inspirées du système des coordonnées en physique) renvoient à un personnage, un événement, une théorie ou une opinion, voire une autre citation en effet miroir. Bref, à tout ce qui fait date et sens dans notre histoire où le récit national côtoie parfois le roman.

CINQUIÈME RÉPUBLIQUE APRÈS DE GAULLE : LES ANNÉES POMPIDOU

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« Je suis aujourd’hui un Français parmi d’autres. »3114

Georges POMPIDOU (1911-1974), première conférence de presse du président de la République à l’Élysée, 10 juillet 1969

Référence implicite au personnage de Gaulle. Tous les présidents de la République à venir devront se situer par rapport au grand homme de notre Histoire, par ailleurs créateur de la Cinquième.

D’entrée de jeu, Pompidou se démarque, tout en affichant son gaullisme. Face à une centaine de journalistes (au lieu des quelques centaines invités par de Gaulle), il paraît seul avec son Premier ministre et le porte-parole du gouvernement (au lieu du gouvernement au grand complet). Il n’en affirme pas moins « la primauté du chef de l’État, qui lui vient de son mandat national et qu’il est de son devoir de maintenir, à la fois arbitre et premier responsable national ». La presse lui accorde la mention bien, la crise de régime n’aura pas lieu, les institutions tiennent le coup. Leur solidité va même se révéler à toute épreuve, au fil des présidences et des majorités.

« Nous avons un objectif qui doit dominer tous les autres : faire de la France une grande nation industrielle […] le reste sera donné de surcroît. »3118

Georges POMPIDOU (1911-1974). L’Audace économique : propositions pour un capitalisme éclairé (2001), Stéphane Jacquemet

L’« impératif industriel » est l’idée-force, l’idée fixe de Pompidou. Cela passe par la modernisation du pays. Airbus, TGV, entre autres grands projets et réussites incontestées ; mais aussi priorité donnée à l’automobile dans les villes qui doivent s’adapter (tunnels, voies express, destruction des vieux quartiers) ; développement d’une agriculture intensive et de l’industrie agro-alimentaire avec mécanisation poussée, utilisation d’engrais et de pesticides. La planification s’impose plus que jamais et le VIe Plan sera tout entier orienté dans cette direction.

« Selon notre manière de compter, nous nous enrichirions en faisant des Tuileries un parking payant et de Notre-Dame un immeuble de bureaux. »2948

Bertrand de JOUVENEL (1903-1987), Arcadie : Essais sur le mieux-vivre (1968)

Référence parlante et volontairement choquante. L’urbanisme des « années béton » a certes donné plus de confort à des classes jusqu’alors très défavorisées, mais commis quelques crimes de lèse-civilisation au centre ou aux abords des villes. Les barres de béton, les tours, les « cités radieuses » devenues des villes dortoirs et des banlieues repoussoirs, tout cela dessine un paysage remis en question avec plus ou moins de moyens et de résultats.

« Comme la société du Moyen Âge s’équilibrait sur Dieu ET sur le diable, ainsi la nôtre s’équilibre sur la consommation ET sur sa dénonciation. »2947

Jean BAUDRILLARD (1929-2007), Le Système des objets (1972)

Autre référence historique. Après la IVe République – celle du redémarrage industriel d’après-guerre –, la Ve est celle de la « société de consommation ». L’augmentation du niveau de vie s’accompagne de retombées fâcheuses. Progrès ou aliénation ? Progrès et aliénation. « Ne sommes-nous pas la proie d’un encombrement mortel ? Nous avons besoin d’un nombre croissant d’objets pour faire figure d’homme » (Michel Deguy). Que dire, au XXIe s.

« C’est un petit pas pour l’homme, mais un grand bond pour l’humanité. »3115

Neil ARMSTRONG (1930-2012), premiers mots en direct de la Lune, 21 juillet 1969

L’astronaute américain pose une plaque en forme de message : « Ici, des hommes de la planète Terre ont mis pour la première fois le pied sur la Lune en juillet 1969 après J.-C., nous sommes venus pacifiquement au nom de toute l’Humanité. » L’humanité oublie d’être blasée, assistant en temps réel à ce rêve aussi vieux qu’elle, devenu réalité.

La conquête spatiale, prodige de technologie, est d’abord un enjeu politique dans la « guerre froide » entre les États-Unis d’Amérique (incarnation du capitalisme) et l’Union soviétique (chantre du communisme). L’URSS a tiré la première en lançant Spoutnik 1 en 1957, l’Amérique s’est rattrapée l’année suivante avec Explorer 1. En 1961, le premier homme dans l’espace est russe, Youri Gagarine. Mais avec Apollo 11 qui décolle de Cap Kennedy en Floride, c’est un Américain qui marche enfin sur le sol lunaire.

Les explorations lunaires sont abandonnées au cours des années 1970, mais la conquête de l’espace continue et la France y a sa place. Ariane 1, premier modèle d’une famille de lanceurs, place l’Europe en tête du marché mondial au XXIe siècle : incontestable réussite en termes d’emplois, de progrès économique et de recherche scientifique.

« Il y a peu de moments dans l’existence d’un peuple où il puisse autrement qu’en rêve se dire : Quelle est la société dans laquelle je veux vivre ? J’ai le sentiment que nous abordons un de ces moments. Nous pouvons donc entreprendre de construire une nouvelle société. »3116

Jacques CHABAN-DELMAS (1915-2000), Discours à l’Assemblée nationale, 16 septembre 1969

Aucun discours parlementaire de Premier ministre n’eut plus de retentissement sous la Cinquième ! La dénonciation du « conservatisme » et des « blocages » de la société française annonce un programme ambitieux de réformes – maître mot des prochains présidents, mais pas de Pompidou aux priorités plus concrètes que sociétales !

« Nous ne parvenons pas à accomplir des réformes autrement qu’en faisant semblant de faire des révolutions. »2953

Jacques CHABAN-DELMAS (1915-2000), Assemblée nationale, 16 septembre 1969. Mémoires pour demain (1997)

Citation référentielle historique et prémonitoire. Le Premier ministre songe ici à Mai 68, constatant de façon plus générale que « la société française n’est pas encore parvenue à évoluer autrement que par crises majeures ». C’est un mal français maintes fois diagnostiqué. Contre les « conservatismes » et les « blocages », il propose sa « nouvelle société ». Mais une partie de la jeunesse n’a pas fini sa révolte de Mai 68 et des « Années de rêve ». Le début des années 1970 va être agité de mouvements violents : on parlera des « Années de poudre ». Au XXIe siècle, le consensus social reste une utopie.

« Il est nécessaire que les casseurs soient les payeurs. »3123

Jacques CHABAN-DELMAS (1915-2000), défendant la loi du 4 juin 1970, entretien télévisé avec Pierre Desgraupes le 7 avril

Le Premier ministre annonce la loi anticasseur discutée à l’Assemblée, adoptée deux mois après. Elle institue le délit de participation à une manifestation interdite et crée une responsabilité collective. « Les casseurs seront les payeurs », slogan bientôt repris par les écologistes - « Les pollueurs seront les payeurs. » Mais dans le contexte social présent, la loi anticasseur déclenche une levée de boucliers à gauche.

« Il y a plus inconnu que le Soldat inconnu : sa femme ! »3125

Banderole déroulée par le MLF sur la dalle du Soldat inconnu, place de l’Étoile, 26 août 1970

Autre banderole brandie : « Un homme sur deux est une femme. » Elles sont une dizaine à manifester dans Paris déserté. Elles déposent une gerbe à la femme inconnue du célèbre Soldat inconnu… et sont arrêtées.

Le lendemain, la presse déclare la naissance du MLF, Mouvement de libération des femmes. C’est sa première sortie médiatique – modeste. Le même jour à New York, 50 000 femmes célèbrent leur conquête du droit de vote il y a cinquante ans.  Au-delà d’un certain folklore, entre « provoc » et happening, les années 1970-1980 verront aboutir l’essentiel des revendications des femmes et la vie quotidienne en sera changée.

« Le général de Gaulle est mort. La France est veuve. »3127

Georges POMPIDOU (1911-1974), Déclaration du président de la République, Allocution radiotélévisée, 10 novembre 1970

La veille, avant dîner, le général faisait une patience (jeu de cartes) dans sa résidence de la Boisserie à Colombey-les-Deux-Églises. Pris d’un malaise, il meurt 20 minutes après d’une rupture d’anévrisme, à 79 ans. Le petit village de la Haute-Marne va devenir un lieu de pèlerinage national.

Fini de survivre, maintenant vivre.
Nous abolirons la tristesse. RALBOL.3130

Slogans des lycéens, janvier-février-mars 1971. Génération, tome II, Les Années de poudre (1988), Hervé Hamon, Patrick Rotman

Ils font leur Mai 68 en cet hiver 1971. Manifs, sittings, fermeture de l’ENS (École normale supérieure). Épisode le plus marquant : l’affaire Gilles Guiot, élève à Chaptal, arrêté le 10 février, accusé d’avoir agressé un policier. Sa détention est vécue par ses camarades comme une déclaration de guerre par la génération des adultes au pouvoir.

Paysans, ouvriers, tous unis, nous garderons le Larzac.3146

Slogan de la manifestation du Larzac, 24 et 25 août 1973

Affaire et mouvement frère de Lip, d’où manifestation commune et slogan qui unit « Paysans, ouvriers… »

Le plus grand causse du sud du Massif Central abrite un camp militaire de 3 000 hectares. Le ministre de la Défense, Michel Debré, a décidé de l’agrandir jusqu’à 13 700 hectares : protestations des agriculteurs menacés d’expropriation et des défenseurs de l’environnement. Certains voient dans ce rassemblement un gentil feu de camp d’amateurs de roquefort authentique. Pour d’autres, cette rencontre entre les ouvriers-producteurs de Lip et les paysans-travailleurs du Larzac marque l’ébauche d’une nouvelle culture politique et la naissance de l’altermondialisme à la française.

José Bové prend goût à l’écologie avec cette forme de révolte médiatique et Sartre solidaire, deux ans avant sa mort, exprime son soutien : « Je vous salue paysans du Larzac et je salue votre lutte pour la justice, la liberté et pour la paix, la plus belle lutte de notre vingtième siècle » (lettre du 28 octobre 1978). L’histoire finit bien : François Mitterrand, élu président le 10 mai 1981, renoncera au projet d’extension du camp militaire du Larzac.

LE SEPTENNAT DE GISCARD D’ESTAING

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« La France souhaite être gouvernée au centre. »3088

Valéry GISCARD D’ESTAING (1926-2020), Discours de Charenton, 8 octobre 1972

Idée simple, mais paradoxe apparent dans un pays fortement bipolarisé, gauche contre droite. Giscard d’Estaing, seul président centriste, déclinera ce thème tout au long du septennat : La France souhaite, veut, doit être, sera… gouvernée au centre. Emmanuel Macron fera le même pari gagnant en 2017 et 2022.

« De ce jour date une ère nouvelle de la politique française, celle du rajeunissement et celle du changement de la France. »3154

Valéry GISCARD D’ESTAING (1926-2020), Premier discours présidentiel, 27 mai 1974

Nouveau style : le président en personne présente le gouvernement à la télévision. Une page d’histoire semble tournée : il n’y a que 5 UDR sur 16 ministres – et aucun « baron » du gaullisme – dans le premier gouvernement formé par Jacques Chirac, choisi pour neutraliser les gaullistes et pour sa jeunesse (42 ans). Le changement est visible aussi dans le style du pouvoir et la décrispation de l’homme volontiers appelé VGE.

« La France doit devenir un immense chantier de réformes. »3156

Valéry GISCARD D’ESTAING (1926-2020), Conseil des ministres, 25 septembre 1974

D’innombrables projets sont lancés dans les premiers mois, certains aboutiront : abaissement à 18 ans de l’âge de la majorité (électorale et civile), statut de la ville de Paris (qui retrouve un maire élu et unique), éclatement de l’ORTF, simplification des procédures de divorce. Et l’IVG qui va déchaîner des passions.

« Je vous revois, Madame, faisant front contre l’adversité avec ce courage et cette résolution qui sont votre marque propre. Les attaques sont violentes. À certains moments, le découragement s’empare de vous. Mais vous vous reprenez toujours. Vous êtes une espèce d’Antigone qui aurait triomphé de Créon. »3159

Jean d’Ormesson (1925-2017), Discours pour l’entrée de Simone Veil à l’Académie française, 18 mars 2010

Il rappelle le combat pour l’IVG en l’accueillant dans cette assemblée presque exclusivement masculine, lui qui s’est battu pour Marguerite Yourcenar, première académicienne. Il a évoqué la guerre, l’horreur des camps de concentration et d’extermination. Puis l’épreuve de la ministre, à la tribune de l’Assemblée : « Une minorité de l’opinion s’est déchaînée – et se déchaîne encore – contre vous. L’extrême droite antisémite restait violente et active. Mais d’autres accusations vous touchaient peut-être plus cruellement. Le mot de génocide était parfois prononcé… Ce sont pour vous de grands moments d’émotion et d’épuisement. Beaucoup d’entre nous, aujourd’hui et ici, se souviennent encore de ce spectacle où la grandeur se mêlait à la sauvagerie. Votre projet finit par être adopté à l’Assemblée nationale par une majorité plus large que prévu : 284 voix contre 189. »

« La France vit au-dessus de ses moyens. »3171

Raymond Barre (1924-2007), TF1, allocution du 22 septembre 1976

Depuis le choc pétrolier de 1973, « le coq gaulois faisait l’autruche » (Olivier Chevrillon), négligeant les mesures qui s’imposent, la sauvegarde du pouvoir d’achat entraînant l’économie dans une spirale suicidaire : gonflement des salaires nominaux, laminage des profits (donc des capacités de reconversion), déficit du commerce extérieur, effondrement certain, à terme, du niveau de vie.

Après la brutale démission de Chirac, le nouveau Premier ministre, très professeur, expose le 5 octobre à l’Assemblée le nouveau « plan Barre » d’assainissement économique et financier : « La lutte contre l’inflation est un préalable à toute ambition nationale. Aucun pays ne peut durablement s’accommoder de l’inflation sans risquer de succomber à de graves désordres économiques et sociaux et de perdre sa liberté d’action. » Les réalités sont enfin prises à bras-le-corps, alors que le taux d’inflation menaçait d’atteindre 12-13 % dans l’année – il sera limité à 9,6 %. Mais les mesures d’austérité annoncées provoquent l’hostilité des syndicats et de l’opposition.

« Le gouvernement ne détermine pas sa politique à la longueur des cortèges. »3173

Raymond BARRE (1924-2007), Assemblée nationale, 7 octobre 1976

Grèves et manifestations saluent le plan Barre. Robert Ballanger, député communiste, vient de dire à l’Assemblée : « Il est 17 heures : le dernier manifestant du cortège qui se déroule depuis ce matin entre la Nation et la place de la République vient d’arriver place de la République. » Le Premier ministre leur oppose ce que la presse appellera souvent son « assurance tranquille » et sa « fermeté intransigeante ».

« Avec son pétrole, l’Iran peut mettre l’Occident à genoux ! Le fera-t-il un jour ?
— Si Dieu le veut. »3188

Ayatollah KHOMEINY (1900-1989), réponse à Bertrand Poirot-Delpech, datée d’« un dimanche de 1976 ». La Légende du siècle (1981), Bertrand Poirot-Delpech

La menace divine est claire. Après le premier choc pétrolier de l’automne 1973, le second survient en janvier 1979. L’Iran islamique, en plein chaos après le départ du Chah, cesse durant deux mois toute exportation d’or noir. Panique sur les marchés. En un an, le baril passera de 13 $ à 24 $. Il montera jusqu’à 34 $ avec la guerre Irak-Iran. En 2022, la guerre en Ukraine rappelle notre dépendance économique à cette source d’énergie.

Cette crise pétrolière a révélé au monde occidental la rupture durable de la phase de forte croissance, les « Vingt glorieuses » (1954-1974). On parle aussi des Trente glorieuses (à partir de l’après-guerre). En France, cette crise s’accompagne d’une forte inflation jusqu’en 1986, la croissance ne repartant qu’en 1988.

« Le premier des droits de l’homme, c’est le devoir pour certains d’aider les autres à vivre. »3189

Jean-Paul SARTRE (1905-1980), au président Giscard d’Estaing, 26 juin 1979

Dans la sainte trinité révolutionnaire, la Fraternité reste la valeur référentielle trop souvent oubliée. La tragédie des « boat people » est l’un des drames de l’émigration. Un groupe d’intellectuels est reçu à l’Élysée, venu dire la détresse des réfugiés vietnamiens. Depuis deux mois, à l’initiative de Bernard Kouchner et de Médecins du Monde, le bateau Île de Lumière recueille et soigne les damnés de la mer fuyant le régime communiste du Vietnam réunifié. Le président promet que la France fournira autant de visas qu’Île de Lumière abrite de réfugiés.

La phrase de Sartre s’applique également aux laissés pour compte de la croissance et du progrès, innombrables victimes de toutes les crises : populations du tiers-monde ou quart monde dans les pays les plus développés, y compris la France.

« Vous avez tendance à reprendre le refrain d’il y a sept ans, « l’homme du passé ». C’est quand même ennuyeux que dans l’intervalle, vous soyez devenu l’homme du passif. »3204

François MITTERRAND (1916-1996), débat télévisé de l’entre-deux-tours, 5 mai 1981

Candidat à la présidence pour la troisième fois, il déstabilise l’adversaire avec cet argument, aussi évidemment que Giscard l’avait déstabilisé sept ans avant, déniant le « monopole du cœur » au représentant de la gauche. La politique est un spectacle (ici, en direct devant 30 millions de téléspectateurs !) et deviendra d’ailleurs théâtre à la Madeleine, Jacques Weber et Jean-François Balmer rejouant au mot près les duels historiques de 1974 et 1981.

« Aucun roi de France n’aurait été réélu au bout de sept ans. »3095

Valéry GISCARD D’ESTAING (1926-2020), à ses fidèles, confidence citée dans Le Nouvel Observateur (1984)

Citation référentielle inattendue. Inconsolable de ce septennat non renouvelé, il se confiera e à la télévision : « On ne guérit pas les plaies en les léchant avec une langue de bois » (« Face à la 3 », 7 novembre 1984). Toujours jeune, encore actif, le retraité de 55 ans dirige le parti (centriste) de l’UDF, est élu député, se consacre à son Auvergne natale, restant militant de la cause européenne – seul point commun qui le rapproche de son successeur.

LES 14 « ANNÉES MITTERRAND »

Revivez toute l’Histoire en citations dans nos Chroniques, livres électroniques qui racontent l’histoire de France de la Gaule à nos jours, en 3 500 citations numérotées, sourcées, replacées dans leur contexte, et signées par près de 1 200 auteurs.

« Quand la France rencontre une grande idée, elles font ensemble le tour du monde. »3099

François MITTERRAND (1916-1996), Ici et maintenant (1980)

Document pour l’histoire, un an avant la présidentielle, ce livre dépeint l’État-Giscard et la France malade, dans un monde esclave du couple dollar-pétrole. Reste à se battre « ici et maintenant » pour vivre autrement et maîtriser le progrès. Devenu leader de la gauche, il peaufine son image et sa « grande idée » : rester dans l’histoire comme l’homme du « socialisme à la française » voulu exemplaire pour le monde. Espoir déçu, mais le personnage reste fascinant – dernier président « à l’ancienne » et conscient de l’être.

« Laissez la tyrannie régner sur un mètre carré, elle gagnera bientôt la surface de la Terre. »3100

François MITTERRAND (1916-1996), L’Abeille et l’Architecte (1978)

Le titre de cet essai se réfère à la phrase de Marx : « Ce qui distingue le plus mauvais architecte de l’abeille la plus experte, c’est qu’il a construit la cellule dans sa tête avant de la construire dans sa ruche. » Ainsi construit-il la présidence à venir.

Droits de l’homme et libertés fondamentales : thème sensible au cœur comme à la raison du futur président. Le combat contre la peine de mort et son abolition feront date au début du premier septennat ; au début du second, il donnera un éclat particulier aux fêtes du bicentenaire de la Révolution. Du trinôme révolutionnaire, il retient la valeur numéro un : « Ma liberté ne vaut que si j’assume celle des autres. La liberté de nos adversaires n’est-elle pas aussi la nôtre ? » Au-delà de cette pensée quasi voltairienne, il reste le phénomène fascinant et dangereux du pouvoir qu’il ne va cesser d’interroger, tout en s’interrogeant. Mitterrand reste le plus intellectuel de nos présidents.

« Régime oblige : le pouvoir absolu a des raisons que la République ne connaît pas. »3101

François MITTERRAND (1916-1996), Le Coup d’État permanent (1964)

Par ce pamphlet, son meilleur livre selon lui, il prenait date avec l’Histoire, imaginant son propre destin à travers une opposition irréductible au gaullisme. Ce qu’il attaque ici, c’est la pratique de la Cinquième par le pouvoir gaulliste : intervention du président dans les affaires de justice, centralisme excessif, bureaucratie, affairisme, décisions liberticides à l’égard de la presse, création de cours de justice ad hoc, lois d’exception, instauration d’un régime policier, mépris du Parlement, ministres traités comme des exécutants et Premier ministre soumis. Le pamphlet est volontairement polémique et partisan – loi du genre.

Cela dit, la « raison d’État » s’impose à tous les États – mais il faut la définir, la limiter à des domaines précis, des circonstances particulières. Tous les pouvoirs ont un jour la tentation d’abuser du pouvoir. Mitterrand président deviendra le roi d’une petite cour, un monarque absolu… et pourquoi pas Dieu en personne, vu par les humoristes…

« Les institutions n’étaient pas faites à mon intention. Mais elles sont bien faites pour moi. »3210

François MITTERRAND (1916-1996), Le Monde, 2 juillet 1981

Antigaulliste absolu, il a toujours exprimé tout le mal qu’il pensait de la Constitution. Pourtant, à peine élu, il donne raison au père de la Cinquième République au moins en cela, déclarant dans le même élan : « J’exercerai dans leur plénitude les pouvoirs que me confère la Constitution. » Il dira et agira de même dans de ce nouveau cas de figure politique : la cohabitation avec un gouvernement de droite (dès 1986).

« Le 10 mai, François Mitterrand avait rendez-vous avec l’histoire. La gauche avait, de nouveau, rendez-vous avec la République. La France et la gauche marchent désormais d’un même pas. »3213

Pierre MAUROY (1928-2013), Discours de politique générale, 8 juillet 1981

Création d’une citation référentielle un peu trop voulue pour être parfaitement crédible, avec des accents quasiment gaulliens (voire hugoliens) pour célébrer le retour de la gauche au pouvoir – après le Front populaire de 1936, c’est un événement et un immense espoir.

Chef de gouvernement depuis le 22 mai, acteur de terrain (et d’un bastion SFIO), le maire de Lille est très populaire. Jean Boissonnat définit ainsi le « style Mauroy » (La Croix, 29 novembre 1981) : « Dans cette fonction du « verbe », proprement politique, Mauroy est l’homme de la situation. De sa personne se dégagent chaleur et sympathie. Lui, au moins, ne nous fait pas le coup du « mépris ». Aucun de nous ne se sent inférieur à lui. De même que Raymond Barre n’a qu’un emploi sur la scène politique, celui du prof bougon qui connaît son affaire, Pierre Mauroy n’en a qu’un seul, lui aussi, celui de l’orateur de kermesse, populiste et généreux. »

« La peine de mort est contraire à ce que l’humanité depuis deux mille ans a pensé de plus haut et rêvé de plus noble. Elle est contraire à la fois à l’esprit du christianisme et à l’esprit de la Révolution. »3217

Robert BADINTER (né en 1928), garde des Sceaux, citant mot pour mot Jean JAURÈS (1859-1914), et plaidant pour l’abolition, Assemblée nationale, 17 septembre 1981

Si la peine de mort n’est pratiquement plus appliquée en France, le symbole demeure très fort. Allant à l’encontre de l’opinion publique, l’abolition est la 17e des « 110 propositions pour la France » du candidat Mitterrand et Badinter l’avocat des grandes causes : « Je regarde la marche de la France. La France est grande, non seulement par sa puissance, mais au-delà de sa puissance, par l’éclat des idées, des causes, de la générosité qui l’ont emporté aux moments privilégiés de son histoire […] La France a été parmi les premiers pays du monde à abolir l’esclavage, ce crime qui déshonore encore l’humanité. Il se trouve que la France aura été, en dépit de tant d’efforts courageux, l’un des derniers pays, presque le dernier en Europe occidentale dont elle a été si souvent le foyer et le pôle, à abolir la peine de mort. Pourquoi ce retard ? »

L’Assemblée vote massivement l’abolition le 18 septembre et le président Chirac lui donnera valeur constitutionnelle en 2007.

« Il ne faut pas non plus se contenter de dire de façon évasive, comme Robespierre à la Convention, le 8 thermidor 1794 : des têtes vont tomber ; il faut dire lesquelles et le dire rapidement, c’est ce que nous attendons du gouvernement. »3221

Paul QUILÈS (1942-2021), Congrès du PS à Valence, 23-25 octobre 1981

Le député de Paris a précisé juste avant : « Je pense à certains directeurs, à certains préfets, à certains dirigeants d’entreprise, à certains fonctionnaires. » Le Congrès applaudit. Quilès donne le ton après la victoire de mai-juin. « Il faut que le gouvernement frappe vite et fort » déclare le président de l’Assemblée nationale, Louis Mermaz.

Faisons la part de la griserie des congrès, de l’outrance verbale face à la foule qu’il faut séduire et dompter. Mais ces excès de langage font grand tort à la réputation de « l’État-PS ». La droite et une partie de la presse donnent à Paul Quilès le surnom de « Robespaul ». Fâcheusement marqué par ce genre de déclarations, l’orateur devenu candidat à Paris aux municipales de mars 1983 prendra pour slogan « Quilès la tendresse ».

« Tout est culture. »2960

Jack LANG (né en 1939), ministre de la Culture, Assemblée nationale, 17 novembre 1981. Demain comme hier (2009)

Présentant son premier budget, il défend une notion à la fois sociale et socialiste, opposée à la culture réputée élitiste et bourgeoise. « Culturelle, l’abolition de la peine de mort que vous avez décidée ! Culturelle, la réduction du temps de travail ! Culturel, le respect des pays du tiers-monde !

Culturelle, la reconnaissance des droits des travailleurs ! Culturelle, l’affirmation des droits de la femme ! » À chacun sa définition de la culture, l’une des plus célèbres restant celle de l’écrivain et critique Émile Henriot, collaborateur au Temps (à partir de 1919), puis au Monde : « La culture, c’est ce qui demeure dans l’homme lorsqu’il a tout oublié. »

Reste une réalité indiscutable : le budget de la Culture, fortement augmenté, va doubler jusqu’à frôler le mythique  1% du budget général de l’État, cependant que Jack Lang reste durablement en poste.

« Au cours de son histoire, la France s’est souvent trompée en matière universitaire car les hommes font les lois, mais ils ne savent pas nécessairement les lois qu’ils font. »3238

Raymond BARRE (1924-2007), citant Jules Ferry (1832-1893), Assemblée nationale, 24 mai 1983

Citation référentielle et parole d’universitaire, dans le long débat engagé depuis déjà deux ans sur la réforme de l’enseignement supérieur, dite « loi Savary » du nom du ministre de l’Éducation nationale. Savary a pour mission d’unifier l’enseignement secondaire et d’en finir avec la distinction entre école privée (dite libre) et école publique. Un an plus tard, il va déclencher la guerre scolaire et provoquer la chute du gouvernement Mauroy. En France, les lois sur l’enseignement sont du genre « explosives ».

« Comme l’écrivait Jean Monnet, le choix est simple : modernisation ou décadence. »3239

Pierre MAUROY (1928-2013), Premier ministre, déclaration à l’Assemblée nationale et au Sénat. Notes et études documentaires, nos 4871 à 4873 (1988), Documentation française

La mystique du Plan n’est plus ce qu’elle était après-guerre. Pourtant, un retour aux sources est tenté en 1983 avec le IXe Plan et Jean Monnet, père de la planification à la française, est souvent cité. Mais l’économie française échappe de plus en plus à la rigidité d’une planification. D’où l’échec.

« Les pacifistes sont à l’Ouest, et les missiles sont à l’Est. »3241

François MITTERRAND (1916-1996), 20 janvier 1983 au Bundestag à Bonn (RFA)

Conscient du déséquilibre des forces en Europe et de la supériorité de l’URSS, le président français tient à rappeler cette vérité devenue citation référentielle.

Depuis les années 1970, les Soviétiques installent dans les pays satellites d’Europe centrale des missiles nucléaires à moyenne portée (les SS-20), pointés sur les centres stratégiques de l’Europe occidentale. Pour répliquer à cette menace, les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN proposent d’installer en Allemagne fédérale des missiles d’une puissance égale (les Pershing), orientés vers l’URSS et l’Europe communiste. Les mouvements pacifistes et gauchistes se mobilisent contre le projet américain avec le slogan : « Plutôt rouges [communistes] que morts ! » Les jeunes Allemands sont les plus nombreux à manifester contre le parapluie américain et pour le désarmement.

Devant les députés allemands, Mitterrand se montre ferme et son intervention est un soutien inespéré à l’OTAN. Il aidera au retournement de l’opinion publique occidentale. Dans les manifestations à venir : « Faites l’amour et pas la guerre » est contré par le slogan : « Il vaut mieux un Pershing dans son jardin qu’un Russe dans son lit ». Les Soviétiques vont finalement reculer et démanteler leurs SS-20. La guerre froide est bien finie.

« La victoire du Front national est une percée politique comme il n’y en a jamais eu. Tout commence aujourd’hui. Le destin de l’Europe et même du monde est en train de changer. »3244

Jean-Marie LE PEN (né en 1928), au lendemain de la victoire de son parti aux élections européennes du 17 juin 1984

Avec 10,95 % des suffrages exprimés, il se trouve presque à égalité avec le PC et Le Pen devient président du groupe des droites européennes au Parlement européen. Cette résurgence (chronique) de l’extrême droite sur l’échiquier politique en France conduira Le Pen au second tour des présidentielles, après élimination du candidat socialiste Lionel Jospin en 2002 - un séisme politique que l’on peut qualifier d’accidentel. L’arrivée de sa fille Marine est considérée comme un événement plus inquiétant pour les adversaires du Front et plus prometteur pour l’extrême droite. Aux présidentielles de 2012, 2017, 2022, le « troisième homme », c’est elle. Et en 2027 ?

« L’extrême droite, ce sont de fausses réponses à de vraies questions. »3249

Laurent FABIUS (né en 1946), émission « L’Heure de vérité », Antenne 2, 5 septembre 1984

En 1984, Le Pen a fait une entrée fracassante au Parlement européen en faisant campagne contre l’immigration et Fabius réagit pour dire que oui, on peut parler d’immigration (sujet trop longtemps tabou en France), mais que la xénophobie n’est pas la solution. Cette phrase, souvent reprise avec quelques variantes, s’applique à d’autres « vraies questions » et l’ascension du leader de l’extrême droite gêne plus la droite que la gauche.

« Notre nouvelle frontière, c’est l’emploi. »2945

Jacques CHIRAC (1932-2019), Discours à l’Assemblée nationale, 9 avril 1986

Premier discours du nouveau Premier ministre - et de la première cohabitation entre un président de gauche et un gouvernement de droite. Après l’inflation à deux chiffres, le chômage est la seconde plaie de l’économie française. Nul jusque vers 1950, le nombre de chômeurs a passé la barre des 500 000 à la fin des années 1960, du million au milieu des années 1970, des 2 millions en 1982, pour atteindre 2,5 millions en septembre 1986 : courbe insensible aux changements de majorité et rebelle aux mesures prises par chaque gouvernement dans sa lutte pour l’emploi. La France frôlera la barre des 3 millions de chômeurs en 2012, la crise mondiale n’étant pas seule en cause.

« La cohabitation, c’est le jardin des supplices pour le futur Premier ministre, le jardin des malices pour le président, le jardin des délices pour les nostalgiques de la Quatrième République. »3261

François d’AUBERT (né en 1943), député UDF de la nouvelle majorité. Dictionnaire des citations de l’histoire de France (1990), Michèle Ressi

Les heurs et malheurs de Chirac Premier ministre de cohabitation commencent le 20 mars 1986. Édouard Balladur,  député proche de Chirac qu’il poussa à cohabiter avant d’éprouver lui-même les supplices d’une autre cohabitation, écrivait dès 1983 : « Les responsables politiques auront le choix entre deux attitudes : ou bien rechercher l’affrontement, la majorité nouvelle tentant de paralyser le président, le président refusant de tenir compte dans la composition du gouvernement de l’existence d’une majorité nouvelle ; ou bien tenter la cohabitation, ce qui suppose que chacun accepte d’être quelque peu empêché dans la liberté de ses mouvements et de ses choix. »

« Contrairement à ce qui se passe dans les westerns, c’est le premier qui dégaine qui est mort. »3267

Édouard BALLADUR (né en 1929), parlant de la cohabitation Mitterrand-Chirac en 1986. Le Nouvel Observateur, 7 janvier 1999, à propos d’une cohabitation inverse, Chirac (président) et Jospin (Premier ministre)

Contrairement à ce qui se passe dans les westerns, attaquer serait une stratégie suicidaire. Le Premier ministre qui gouverne est logiquement le plus exposé aux critiques et aux sondages. Mais les Français sont très satisfaits de la cohabitation, rêvant même (par sondages) d’un gouvernement idéal dirigé par Michel Rocard et composé pour moitié de leaders PS et de RPR-UDF. C’est de la pure politique fiction.

Pour l’heure et dans la réalité, les deux cohabitants au sommet, Mitterrand et Chirac, doivent éviter de s’affronter ouvertement. Vu les tempéraments, les situations et les âges respectifs, le « supplice » vaut surtout pour Chirac.

« Nous allons terroriser les terroristes. »3262

Charles PASQUA (1927-2015), ministre de l’Intérieur du gouvernement Chirac, mars 1986. Citations historiques expliquées : des origines à nos jours (2011), Jean-Paul Roig

Climat de terreur à Paris : les attentats mortels se multiplient et Pasqua répète cette formule qui plaît à l’opinion publique comme à la presse. Au JT d’Antenne 2, le 12 avril, il en donnera une version light ou soft : « L’insécurité doit changer de camp et entre nous et les terroristes, la guerre est engagée. » Le 7 août, l’Assemblée vote les lois Pasqua, très répressives. Mais à la rentrée, la vague terroriste recommence. L’attentat le plus meurtrier, rue de Rennes, devant le magasin Tati, fait 7 morts, 51 blessés.

Entre le terrorisme anarchiste des années 1892-1894 en France, le terrorisme politique du FLN et de l’OAS en Algérie comme en métropole et le terrorisme islamiste qui culminera, le 11 septembre 2001, aux États-Unis, la violence prend toutes les formes : attentats, assassinats, enlèvements. Il y a des pays plus ou moins exposés, mais aucun n’est épargné. Il y a des époques plus ou moins violentes, mais au-delà des chiffres, la médiatisation augmente naturellement le « climat d’insécurité » et le ressenti.

« Mieux vaut perdre des élections que perdre son âme. »3270

Michel NOIR (né en 1944), Le Monde, 18 mai 1987

Face à la montée du Front national, Chirac Premier ministre a un gros problème et deux conseillers de poids. Édouard Balladur, viscéralement prudent, prône le silence : « Chaque fois que l’on parle de Le Pen, on lui donne de l’importance. » Charles Pasqua, grande gueule et pragmatique, est convaincu que la droite a vocation à s’ouvrir jusqu’au FN. Et voilà que le ministre du Commerce extérieur, Michel Noir, fait sensation avec cette affirmation stratégique partout reprise et promue au rang de citation politique ! Un conseil de cabinet est convoqué pour sermonner l’impertinent et les ministres sont priés d’éviter toute polémique, s’ils veulent rester en fonction.

« Où est le Zola qui décrira la curée à laquelle se livre sous nos yeux le RPR ? »3271

Pierre JOXE (né en 1934), Journées parlementaires du PS, septembre 1987. Les Sept Mitterrand (1988), Catherine Nay

Ancien ministre de l’Intérieur, président du groupe socialiste à l’Assemblée et l’un des plus proches fidèles de Mitterrand, il fait référence au roman de Zola, La Curée (1872) et s’indigne des privatisations menées par Balladur, ministre de l’Économie, des Finances et de la Privatisation. C’est la suite du feuilleton des nationalisations : la droite revient sur les mesures prises par la gauche en 1982 et même sur celles de 1945-1946.

Faisant écho au président de la République, Joxe reproche au gouvernement de brader le patrimoine national et de réserver aux « copains et coquins » une part des actions vendues par l’État – le « noyau dur ». La technicité des débats dépasse l’entendement économique du Français moyen, mais les commentateurs se passionnent.

« La démocratie s’arrête là où commence la raison d’État. »3272

Charles PASQUA (1927-2015), ministre de l’Intérieur, déclaration à la télévision en 1987. Au fil des pensées (s.d.), Gilles le Cordier Pellerin

Il justifie les « lois Pasqua ». Les militants gaullistes ont applaudi à l’arrestation du groupe terroriste Action directe et au contrôle renforcé sur le séjour des étrangers, mais la gauche dénonce une politique sécuritaire liberticide. La phrase, souvent citée, fait toujours débat. C’est bon signe !

Dans un régime autoritaire, de gauche ou de droite, la question ne se pose même pas : la raison d’État a tous les droits et les individus ont le devoir de se taire. Richelieu inventa le concept pour renforcer la monarchie. Le pouvoir absolu en usa et en abusa, jusqu’à la Révolution qui mit fin à l’Ancien Régime.

En démocratie, le peuple est souverain et les droits de l’homme, reconnus par la loi, sont sacrés, individuels, inaliénables. Plus ou moins avouée, la raison d’État demeure un motif d’intérêt public pour justifier certaines actions. Mais il lui arrive de couvrir une injustice, ménager des intérêts privés, épargner des puissants. Sous la Cinquième, de nombreuses « affaires » ne sont pas jugées. Des contre-pouvoirs existent : l’opinion publique, la presse qui veut la clarté, les intellectuels qui dénoncent les abus du pouvoir. Sous la Troisième, l’affaire Dreyfus en est le pire et le meilleur exemple : un individu accusé à tort et sacrifié à la raison d’État avant que la vérité n’éclate.

« La France est notre patrie, l’Europe est notre avenir. »3279

François MITTERRAND (1916-1996), campagne pour les élections européennes de juin 1989. Mitterrand : une histoire de Français (1998), Jean Lacouture

Prononcés en janvier 1989, ces mots seront souvent repris pour devenir citation référentielle. À l’époque, l’incertitude porte sur le devenir de l’Europe de l’Est, communiste pour quelques mois encore. L’Europe est plus que jamais l’avenir, même si la réalité européenne est toujours en crise. Institutions bloquées, méfiance face à cette forme de globalisation qui entraîne délocalisations, insécurité sociale, suspicions nationales… L’Union européenne reste malgré tout un gage de paix avec la réconciliation devenue amitié franco-allemande et l’euro, monnaie unique pratiquement acceptée de tous. La foi européenne n’est plus ce qu’elle était, mais peu de causes mobilisent durablement les foules. Quant à la guerre en Ukraine (2022), elle soude plus qu’elle ne divise l’UE.

« Notre pays, c’est la planète. »3281

François MITTERRAND (1916-1996) et 24 chefs d’État et de gouvernement, signant la Déclaration de La Haye, 3 avril 1989

Défi plus ambitieux que le pari européen et plus complexe, à la fois vital (à quelle échéance ?) et planétaire. L’écologie a perdu son statut de science pour initiés ou babas cools post-soixante-huitards. L’opinion publique est alertée, l’écologie politique a ses partis (Verts et autres) et tous les partis politiques parlent écologie : réchauffement de la planète, épuisement des ressources naturelles, pollution de l’atmosphère, de la terre et de l’eau, déforestation, disparition de nombreuses espèces végétales et animales… Aussi vrai que « l’homme est le premier animal qui détruit son environnement », tous les hommes sont ou seront finalement concernés.

« Nous ne pouvons pas héberger en France toute la misère du monde. »3286

Michel ROCARD (1930-2016), émission « 7 sur 7 », TF1, 3 décembre 1989

Cette phrase l’a poursuivi injustement. Vérité d’évidence, dite dans un contexte précis : le Premier ministre de Mitterrand dénonce un détournement du droit d’asile, passant de 18 000 demandes en 1980 à 60 000 en 1989. Il expliquera plus tard : la France, toujours terre d’asile pour les réfugiés politiques, ne peut plus être comme jadis une terre d’immigration pour la main-d’œuvre étrangère. La phrase est reprise sous diverses formes, dans d’autres contextes et par d’autres acteurs politiques, cependant que les socialistes accusent l’un des leurs d’abandonner les valeurs de la gauche. Rocard va donc préciser le 4 juillet 1993, dans la même émission de TF1 : « La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde, mais elle doit en prendre fidèlement sa part. »

« Si l’on veut effectivement changer en profondeur la société, il faut savoir, selon la belle expression de François Mitterrand, « donner du temps au temps ». « Savoir au juste la quantité d’avenir qu’on peut introduire dans le présent, c’est là tout le secret d’un grand gouvernement », écrivait voici un siècle Victor Hugo. »3288

Michel ROCARD (1930-2016), Premier ministre, Discours à la Convention nationale des clubs « Forum et convaincre », 27 janvier 1990

Citation multi référentielle : dans un discours dont le fond et la forme tranchent sur les discours politiques trop souvent limités à la « petite phrase », Rocard cite deux autorités morales.

« Rappelez-vous ce mot de Napoléon Ier : « Tout État fait la politique de sa géographie. » »3289

François MITTERRAND (1916-1996), émission « 7 sur 7 », TF1, 25 mars 1990

La géopolitique, terme apparu à la fin du XIXe siècle, est une réalité historique de tout temps. Quant à Mitterrand, connu pour sa culture générale, rien d’étonnant à voir une citation et une référence historiques dans ce discours politique contemporain : « Notre géographie comporte le voisinage de l’Allemagne qui est un voisin très puissant, très multiple, très nombreux. Et puis, il y a les autres voisinages, l’Europe tout simplement, et si l’on veut dominer le problème allemand, il faut désormais dépasser le problème du couple franco-allemand. » Le président rappelle ensuite sa proposition de confédération européenne.

« Je suis responsable, mais pas coupable. »3296

Michel DEBRÉ (1912-1996), Ces princes qui nous gouvernent (1957)

Georgina Dufoix (née en 1943), résumant sa position de ministre des Affaires sociales dans l’affaire du sang contaminé, TF1, 4 novembre 1991.

Plus de 6 000 hémophiles ont été contaminés par le virus du sida, entre 1982 et 1985. Le scandale éclate en avril 1991 : un article dans L’Événement du jeudi incrimine le CNTS (Centre national de transfusion sanguine) qui savait le danger, dès 1984. Le dernier procès des trois anciens ministres impliqués date de 1999. Affaire complexe et tragique. L’opinion publique, sensible aux problèmes de santé, est choquée par ce long feuilleton.

La « petite phrase » résumant le système de défense de la ministre suscita nombre de réactions : incompréhension, indignation, injures et diffamation. Pourtant, il peut y avoir responsabilité sans culpabilité, droit civil et droit pénal ne devant pas être confondus.

« Toutes les explications du monde ne justifieront pas qu’on ait pu livrer aux chiens l’honneur d’un homme et, finalement, sa vie. »3306

François MITTERRAND (1916-1996), Discours aux funérailles de Pierre Bérégovoy, 4 mai 1993

Le président défend la mémoire de son ex-Premier ministre et ami qui s’est tiré une balle dans la tête le 1er mai, après un acharnement médiatique injuste. La presse (Canard enchaîné en tête) reprochait à cet homme honnête, luttant contre la corruption et les corrompus, un prêt sans intérêt, pour une somme relativement modeste (un million de francs). Cet ancien militant, fidèle à ses convictions comme à ses amis, mais attaqué, puis lâché par les siens et notoirement déprimé, se reprochait surtout la défaite de la gauche, aux législatives de mars 1993.

La véhémence de Mitterrand a une autre raison : il est personnellement attaqué sur son passé d’ex-vichyste devenu résistant. La politique est un métier dur, qui peut devenir cruel. Son successeur vivra cette tragédie, le temps venu. Moins d’un an plus tard, le suicide de François de Grosrouvre dans son bureau à l’Élysée affectera son vieil ami Mitterrand et suscitera des rumeurs quasi inévitables.

« Il faut vaincre ses préjugés. Ce que je vous demande là est presque impossible, car il faut vaincre notre histoire. Et pourtant, si on ne la vainc pas, il faut savoir qu’une règle s’imposera. Mesdames et messieurs, le nationalisme, c’est la guerre ! La guerre n’est pas seulement le passé, elle peut être notre avenir ; et c’est vous, mesdames et messieurs les députés, qui êtes désormais les garants de notre paix, de notre sécurité et de notre avenir. »3311

François MITTERRAND (1916-1996), Discours prononcé devant le Parlement européen, 17 janvier 1995

C’est l’un des derniers messages de Mitterrand l’européen. Il a connu la montée des périls dans les années 1930, il a vécu la guerre et met ses dernières forces dans ce plaidoyer pour un monde de paix.

Quels que soient les reproches faits à la construction européenne, qui se renouvellent, s’accumulent et se contredisent en fonction de la conjoncture économique et politique, des convictions plus ou moins partisanes et des incertitudes sur la forme et le devenir de l’Europe, il ne faut jamais oublier d’où vient l’Europe, son histoire tragique et les siècles de guerres fratricides entre ses peuples voisins.

LES ANNÉES CHIRAC

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« Une fracture sociale se creuse. »3313

Jacques CHIRAC (1932-2019), Discours fondateur de sa campagne présidentielle, 17 février 1995

C’est un orateur né, mais il a besoin de conseillers. Au plus bas dans les sondages, le maire de Paris préparait son retour sur la scène nationale. Henri Guaino, gaulliste social, lui souffle l’idée de fracture sociale, empruntée à Marcel Gauchet, historien et philosophe de la lutte des classes, et reprise également par Emmanuel Todd.

Encore faut-il mettre l’idée en situation, trouver les mots et le ton. Chirac y parvient, déjouant tous les pronostics de ses adversaires et des observateurs. Ce discours-programme crée un véritable espoir chez les jeunes et dans les classes populaires : « La France fut longtemps considérée comme un modèle de mobilité sociale. Certes, tout n’y était pas parfait. Mais elle connaissait un mouvement continu qui allait dans le bon sens. Or, la sécurité économique et la certitude du lendemain sont désormais des privilèges. La jeunesse française exprime son désarroi. Une fracture sociale se creuse dont l’ensemble de la nation supporte la charge… » 

Citation et notion référentielle « gagnante » qui va être reprise et déclinée sur tous les tons, à commencer par Chirac devenu président, au JT de France 2 (5 septembre 1995) : « Aucune civilisation n’a duré, quand elle acceptait la fracture sociale des exclus. »

« Je suis droit dans mes bottes et je crois en la France. »3336

Alain JUPPÉ (né en 1945), Premier ministre, TF1, 6 juillet 1995

Un mois après son entrée en fonction, le plus fidèle ami de Chirac doit répondre sur le loyer de son appartement parisien, trop bas pour être honnête, et sur la baisse de loyer demandée pour l’appartement de son fils Laurent.

Affaire dérisoire, mais symbolique. Juppé devient vite impopulaire : sa « cote d’avenir » passe de 63 % en juin à 37 % en novembre (baromètre TNS Sofres pour Le Figaro Magazine). Sa défense paraît rigide, illustrée par l’expression qui le poursuivra (empruntée à la cavalerie militaire) : « Je suis droit dans mes bottes. » Autrement dit, je ne plie pas, j’ai ma conscience pour moi. Il perdra son poste suite à dissolution catastrophe de l’Assemblée nationale, la gauche revenant au pouvoir et entraînant une nouvelle cohabitation avec un Premier ministre socialiste. Quelques années plus tard, Juppé aura d’autres ennuis qui lui feront dire : « Un Premier ministre, on le lèche, on le lâche, on le lynche ! »

« Il faut dégraisser le mammouth. »3344

Claude ALLÈGRE (né en 1937), ministre de l’Éducation nationale, 24 juin 1997

Chercheur reconnu, médaillé et primé par ses confrères, même si ses prises de position écologiques sur le climat seront jugées politiquement incorrectes, il prévoit une réforme des lycées, pour « l’égalité dans la diversité » des filières. Il veut changer les horaires, développer des « activités culturelles et citoyennes ». Projets mal reçus, mais c’est surtout son langage qui choque le milieu enseignant. L’image fait mouche et le mammouth devient l’emblème de la contestation. On réfute ses chiffres (sur l’absentéisme des professeurs, sur la durée de leurs congés) et ses jugements tranchés sur diverses matières (les maths dévaluées par les machines à calculer, l’anglais qui ne doit plus être une langue étrangère pour les Français).

Le mammouth qui fait image est quand même la plus grosse erreur de langage. Le ministre revient sur sa petite phrase, précisant qu’elle visait l’administration centrale et non les professeurs. Mais en mars 2000, Lionel Jospin devra sacrifier son ami Allègre et rappeler à l’Éducation nationale le très consensuel et populaire Jack Lang.

« Les droits de l’homme ne valent que parce qu’ils sont universels. »3346

Jacques CHIRAC (1932-2019), Discours pour le 150e anniversaire de l’abolition de l’esclavage, 23 avril 1998

Tandis que le Premier ministre gouverne aux prises avec les réalités quotidiennes, le président de la République prend ses distances vis-à-vis des réformes de la gauche au pouvoir, ne ménageant pas ses critiques sur la politique intérieure, lors de ses interventions télévisées ou de ses déplacements en province.

Pour exister vraiment en cette période de cohabitation, il va prendre de la hauteur et l’occasion est belle. La France est universellement reconnue comme la « patrie des droits de l’homme » nés au siècle des Lumières et inscrits dans le marbre de l’éternité sous la Révolution, avec la Déclaration de 1789. Quant à l’homme noir, il a dû attendre : aboli par un décret de 1794, l’esclavage est rétabli sous le Consulat de Bonaparte et définitivement aboli par la Deuxième République en 1848. En 2001, la loi Taubira reconnaîtra l’esclavage et la traite comme crimes contre l’humanité.

La France black blanc beur.3349

Slogan du 12 juillet 1998. Qu’est-ce que la France ? (2007), Alain Finkielkraut

Victoire et divine diversion ! Ce soir-là, ivre de joie, la France fête sa première Coupe du monde, gagnée par son équipe « black-blanc-beur » avec Zinédine Zidane en tête d’affiche, Zizou de légende comme le sport en crée toujours. Rappelons Michel Platini, au premier sacre européen, en 1984.

Que reste-t-il de ce moment de fraternité, les Champs-Élysées envahis par une foule bigarrée, cette France idéalement métissée ? « Ça n’a duré qu’un été », selon Ludovic Lestrelin, maître de conférences en STAPS (Sciences et techniques des activités physiques et sportives). « Un bel élan unanime a salué la victoire d’un État-nation, d’un modèle d’intégration, pas seulement d’une équipe. Ce sentiment venait d’ailleurs de toutes parts, du mouvement sportif, des politiques », rappelle-t-il. Les grands rendez-vous sportifs, tels les JO et les Coupes du monde, génèrent des mouvements collectifs très forts, mais éphémères. Et de tous les sports, le foot est celui dont la magie opère le plus spectaculairement.

« Comme 1914 a marqué l’entrée dans le XXe siècle, le 11 septembre 2001 marque l’entrée dans le XXIe siècle. »3363

Jean-François DENIAU (1928-2007), ex-ministre des Affaires étrangères et ambassadeur, Les Échos, 22 octobre 2001

Le 11 septembre, quatre avions-suicides s’écrasent sur le World Trade Center à New York, sur le Pentagone à Washington et en Pennsylvanie. Les images transmises en direct devant des centaines de millions de téléspectateurs repassent en boucle pendant des semaines. L’effondrement des Twin Towers, tours jumelles au cœur de la City, rappelle les pires films-catastrophes. Au total, 2 977 victimes et 19 terroristes.

Le soir même, le président Chirac s’exprime sur TF1 : « C’est avec une immense émotion que la France vient d’apprendre ces attentats monstrueux – il n’y a pas d’autre mot – qui viennent de frapper les États-Unis d’Amérique… J’assure naturellement le président George Bush de mon soutien total. La France, vous le savez, a toujours condamné et condamne sans réserve le terrorisme, et considère qu’il faut lutter contre le terrorisme par tous les moyens. » Le lendemain, Vladimir Poutine, président de la fédération de Russie, réagit de même et c’est cela qui est remarquable : « Les États-Unis ont aujourd’hui fait face à une agression sans précédent de la part du terrorisme international. Il s’agit d’un défi effronté à l’humanité entière, du moins à l’humanité civilisée. Et ce qui s’est passé aujourd’hui est une preuve supplémentaire de la pertinence de la proposition russe de mettre en commun les efforts de la communauté internationale dans la lutte contre le terrorisme, ce fléau du XXIe siècle. »

Que les pollueurs soient les payeurs.3355

Slogan écologiste devenu principe juridique, lors des marées noires

Première marée noire en 1967 : le Torrey Canyon, pétrolier du Koweït, 120 000 tonnes de brut qui vont souiller les côtes de Cornouailles et de Bretagne.

12 décembre 1999, en pleine tempête sur le Finistère, l’Erika, pétrolier battant pavillon maltais, coule. 31 000 tonnes de fuel dérivent et vont polluer 400 kilomètres de côtes, tuant plus de 150 000 oiseaux…  Après sept ans d’enquête, le procès commence le 12 février 2007 : quatre mois d’audience, quinze inculpés, quarante-neuf témoins et experts, une cinquantaine d’avocats. Le tribunal correctionnel de Paris rend son jugement le 16 janvier 2008 : 300 pages retracent l’historique et les fautes commises, le groupe Total étant reconnu coupable de pollution maritime et condamné à verser 192 millions d’euros. L’armateur, le gestionnaire et l’organisme de certification du navire sont déclarés coupables de faute caractérisée. Le principe du pollueur payeur est clairement validé et, pour la première fois, le droit reconnaît le préjudice écologique en tant que tel.

Le 25 septembre 2012, la Cour de cassation confirme toutes les condamnations prononcées depuis treize ans et ajoute à la responsabilité pénale une responsabilité civile pour le groupe Total. Selon Corinne Lepage, avocate de dix communes du littoral : « c’est un très grand jour pour tous les défenseurs de l’environnement. »

« L’euro, c’est l’Europe dans la poche du citoyen. »3366

Cette citation anonyme mérite le titre de référentielle : c’est la plus simple définition de la monnaie qui commence à circuler le 1er janvier 2002 – la devise était entrée en vigueur pour les transactions financières le 1er janvier 1999. C’est une petite révolution dans la vie quotidienne, finalement bien acceptée malgré une hausse des prix constatée au changement des étiquettes. Certains Français comptaient encore en « anciens francs », mais les calculettes largement répandues résolvent bien des casse-têtes.

« L’euro, c’est une grande réussite et c’est ce qui irrite » dira Valéry Giscard d’Estaing en 2011 à Strasbourg, très critiqué par les eurosceptiques et les europhobes pour son optimisme d’européen convaincu. Mais cette mutation réussie en 2002 est portée à l’actif du gouvernement socialiste de Lionel Jospin.

« J’assume pleinement la responsabilité de cet échec et j’en tire les conclusions, en me retirant de la vie politique. »3373

Lionel JOSPIN (né en 1937), Déclaration du 21 avril 2002

La gauche est hors-jeu et KO, la présidentielle va se jouer à droite toute. Lionel Jospin se présente à la télévision et devant ses troupes, visage défait, voix blanche : « Le résultat du premier tour de l’élection présidentielle vient de tomber comme un coup de tonnerre. Voir l’extrême droite représenter 20 % des voix dans notre pays et son principal candidat affronter celui de la droite au second tour est un signe très inquiétant pour la France et pour notre démocratie. Ce résultat, après cinq années de travail gouvernemental entièrement voué au service de notre pays, est profondément décevant pour moi et ceux qui m’ont accompagné dans cette action. Je reste fier du travail accompli. Au-delà de la démagogie de la droite et de la dispersion de la gauche qui ont rendu possible cette situation, j’assume pleinement la responsabilité de cet échec et j’en tire les conséquences en me retirant de la vie politique après la fin de l’élection présidentielle. »

Ce 21 avril est l’une des dates chocs des années 1990-2010, avec le « non » à venir au référendum sur l’Europe et le ressenti émotionnel des attentats du 11 septembre.

« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. La nature, mutilée, surexploitée, ne parvient plus à se reconstituer et nous refusons de l’admettre. L’humanité souffre. Elle souffre de mal-développement, au nord comme au sud, et nous sommes indifférents. La Terre et l’humanité sont en péril et nous en sommes tous responsables. »3377

Jacques CHIRAC (1932-2019), Sommet mondial de Johannesburg, Afrique du Sud, 2 septembre 2002

Plus de 100 chefs d’État (et quelque 60 000 participants) font le bilan du Sommet de la Terre tenu à Rio de Janeiro en 1992, et du Protocole de Kyoto (Japon) en 1997, les États signataires s’engageant à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, dioxyde de carbone en tête (le fameux CO2). Centré sur le développement durable, le Sommet adopte un plan d’action écologiquement et généreusement ambitieux : lutte contre la paupérisation, contrôle de la globalisation, gestion des ressources naturelles, respect des droits de l’homme, etc. Les « Sommets de la Terre » vont se succéder et se ressembler : déclarations unanimes, actions souvent décevantes.

« L’écologie politique est la seule idée nouvelle depuis 1945. »3358

Yves FRÉMION (né en 1947), Libération, 2 juin 2007

Écrivain, journaliste, critique de BD et député européen vert, son Histoire de la révolution écologiste détaille les fondements de l’écologie politique, ses acteurs et son positionnement sur l’échiquier des partis.

L’écologie scientifique est née en 1866 avec le zoologiste allemand Ernst Haeckel. L’écologie politique émerge en France après Mai 68 : la science aboutit enfin à une conscience, en attendant une organisation et une cohérence. On prêche une révolution de la société autour de thématiques récurrentes : protection de l’environnement et sauvegarde de la nature ; solidarité sociale ; citoyenneté et démocratie ; révision des rapports Nord-Sud. Un combat pour l’environnement est toujours un combat social et citoyen – et inversement.

L’écologie a bouleversé le paysage politique en France et dans la plupart des pays du monde et s’est installée comme un grand courant de pensée qui traverse les partis et les frontières. Mais elle peine à entrer dans le jeu politico-politicien et à se concrétiser en bulletin de vote. Les déboires des Verts français, leurs maladresses et leur désunion tranchent avec la discipline des Verts allemands. Daniel Cohn-Bendit en témoigne souvent, député vert européen jouant de sa double nationalité, de son franc-parler et de sa popularité.

« Et c’est un vieux pays, la France, d’un vieux continent comme le mien, l’Europe, qui vous le dit aujourd’hui, qui a connu les guerres, l’occupation, la barbarie. Un pays qui n’oublie pas et qui sait tout ce qu’il doit aux combattants de la liberté venus d’Amérique et d’ailleurs et qui pourtant n’a jamais cessé de se tenir debout face à l’Histoire et devant les hommes. Fidèle à ses valeurs, il veut agir résolument avec tous les membres de la communauté internationale. Il croit en notre capacité à construire ensemble un monde meilleur. »3378

Dominique de VILLEPIN (né en 1953), Discours au Conseil de Sécurité à l’ONU, 14 février 2003

Paradoxe de cette citation à vocation référentielle : tout le monde se rappelle la situation, beaucoup approuvent ce beau et juste discours, mais personne ne peut se rappeler une phrase aussi alambiquée ! En bref, la France refuse la guerre d’Irak et se désolidarise des États-Unis. Plus précisément, pour intervenir militairement contre Saddam Hussein suspecté de développer des « armes de destruction massive », mais président d’un État souverain, il faut l’accord du Conseil de sécurité et la France mettra son veto.

Le ministre des Affaires étrangères est ovationné par une majorité des pays membres de l’ONU, non représentés au Conseil : ce sont les « applaudissements du monde », selon le commentateur de la NBC (National Broadcasting Corporation). Jacques Chirac, s’opposant ainsi à Georges W. Bush, acquiert une notoriété internationale, forme un « front commun » avec l’Allemagne et la Russie contre l’invasion de l’Irak et satisfait l’opinion publique française.

« La France, tu l’aimes ou tu la quittes. »3395

Nicolas SARKOZY (né en 1955), ministre de l’Intérieur, avril 2006. La Fracture identitaire (2007), Ivan Rioufol

Il s’est défendu d’être l’auteur de cette formule qui fait la fortune des rappeurs et qui a été reprise au vol par Philippe de Villiers. C’est quand même le résumé d’un message tout aussi clair, au cours d’un rassemblement UMP : « On en a plus qu’assez de devoir en permanence s’excuser d’être Français […] S’il y en a que ça gêne d’être en France […] qu’ils ne se gênent pas pour quitter un pays qu’ils n’aiment pas. »

« Travailler plus pour gagner plus, c’est mon programme. »3404

Nicolas SARKOZY (né en 1955), Discours de Rungis, 1er février 2007

La « valeur travail » avait une connotation marxiste, le candidat de la droite lui redonne un autre sens économique, politique et idéologique. Rungis est un lieu symbolique : ce marché international remplace les anciennes halles de Paris, les travailleurs se lèvent tôt et travaillent dur.

Le « travailler plus pour gagner plus » est l’un des points forts de sa campagne, décliné en plusieurs versions. Il se heurtera bientôt à la crise mondiale de 2008 qui affole les statistiques du chômage durant tout son quinquennat. Ce n’est pas une raison pour nier l’intérêt de ces arguments.

« L’élection présidentielle, c’est la rencontre d’un homme et d’un pays, d’un homme et d’un peuple. »3410

François BAYROU (né en 1951), Meeting de Caen, 1er mars 2007

Infatigable auteur de citations à vocation référentielle, il reprend le mythe gaullien. C’est tout à fait juste, mais… en état de paix, ça ne fonctionne pas aussi bien et un homme sans un parti puissant pour le porter et le supporter (au sens sportif du mot) a peu de chance d’aller au bout. Bayrou le sait, depuis sa première tentative présidentielle en 2002. La bipolarisation de la France rend la manœuvre difficile pour ce centriste viscéral. Mais Bayrou bénéficie toujours d’une cote de vraie sympathie. Il le sait, il en joue. Il pense même, au vu des sondages, qu’il peut se qualifier au second tour, ce qui entraînerait automatiquement sa victoire.

LE QUINQUENNAT DE SARKOZY

Revivez toute l’Histoire en citations dans nos Chroniques, livres électroniques qui racontent l’histoire de France de la Gaule à nos jours, en 3 500 citations numérotées, sourcées, replacées dans leur contexte, et signées par près de 1 200 auteurs.

« Nerveux, impétueux, ne doutant de rien et surtout pas de lui-même… »3325

Jacques CHIRAC (1932-2019), Mémoires, tome II, Le Temps présidentiel (2011)

Dans ce testament politique, l’ancien président juge celui en qui il plaçait tant d’espoir, et qui lui succède à la tête de l’État, en 2007. Leur antagonisme est un fait politique de notoriété publique. Thème théâtral, digne de Shakespeare ou Hugo, il inspire journalistes et biographes. « Le monde politique est une jungle » affirme Chirac, et Sarkozy, enfant terrible de la chiraquie, a retenu la leçon du maître.

« La crise morale française porte un nom : c’est la crise du travail. »3328

Nicolas SARKOZY (né en 1955), Le Monde, 23 janvier 2007

Parole de campagne (alors qu’il est ministre de l’Intérieur). Rappelons qu’il fut aussi ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie. Le travail est une valeur essentielle à la vie (et d’abord à la sienne) comme au pays. Il va décliner ce thème sur tous les tons. Cette fois-ci, « haro sur les socialistes ». C’est de bonne guerre. Mais le « travailler plus pour gagner plus » se heurte à la crise mondiale de 2008 qui affole les statistiques du chômage. C’est l’une des raisons de la cote d’impopularité du président, survenue très vite.

Ses prédécesseurs ont vécu cela, il le sait : « Ceux qui ne peuvent supporter d’être haïs ne doivent pas faire de la politique. Il n’y a pas de destin sans haine. » Cette citation figurera sur son site présidentiel en 2012.

« Indignez-vous ! »3443

Stéphane HESSEL (1917-2013), titre de son essai (Indigène éditions, 2010)

Parole d’un jeune homme en colère de 92 ans. Ce livre de 32 pages, publié par un petit éditeur de Montpellier, vendu 3 euros sans promotion médiatique, tourne au phénomène d’édition : 950 000 exemplaires en 10 semaines. Traduit en 34 langues, le livre se vendra à 4 millions d’exemplaires.
L’auteur, né en Allemagne d’un père juif, naturalisé français en 1937, résistant face au nazisme et déporté à Buchenwald, participe à la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme en 1948. Diplomate de métier, européen de gauche, proche de Mendès France et Michel Rocard, il reprend les idées du CNR (Conseil national de la Résistance) : engagement politique de la société civile, primauté de l’intérêt général sur l’intérêt financier, solidarité entre les générations. Il les confronte aux sujets d’indignation actuels : existence des sans-papiers, planète maltraitée, écart des richesses dans le monde.

Le mouvement des Indignés, soutenu par les réseaux sociaux et associé au Printemps arabe, va essaimer dans le monde et manifester un peu partout en 2011 (comme en Mai 68) : plus de 70 pays, Espagne en tête.

« Le Printemps arabe, c’est « un immense mur de Berlin qui tombe ». »3448

Tahar BEN JELLOUN (né en 1944), entretien à l’AFP, 24 mai 2011

Écrivain franco-marocain, il rend hommage au premier martyr, le jeune tunisien Mohamed Bouazizi qui s’est immolé, publiant deux essais sur cette révolution en marche : Par le feu et L’étincelle. Révolte dans les pays arabes (Gallimard, 2011).

Le « Printemps arabe » est une série de contestations populaires touchant divers pays à partir du 17 décembre 2010. La révolution, commencée en Tunisie, oblige Ben Ali à quitter le pouvoir, puis Moubarak, en Égypte. D’autres peuples reprennent le slogan « Dégage ! » (« Erhal ! » en arabe). Outre le départ des dictateurs et l’instauration d’une démocratie, les manifestants exigent le partage des richesses, des emplois et la dignité (« karama  »).

L’expression « Printemps arabe » renvoie au « Printemps des peuples » de 1848, quand des révolutions éclatent simultanément dans plusieurs pays d’Europe, Italie, Allemagne, Autriche, au nom d’aspirations libérales, nationales et démocratiques. Quant à la chute du mur de Berlin le 9 novembre 1999, cette insurrection contre la tutelle communiste suit les mouvements d’émancipation ayant secoué les pays du glacis soviétique tout au long de l’année, en Pologne, Hongrie, Tchécoslovaquie, et précède les révoltes en Roumanie et Bulgarie.

Leçon de l’Histoire ? Il existe une vraie contagion révolutionnaire, mais l’installation de la démocratie est un problème plus complexe, en particulier dans les pays musulmans où l’islamisme est incompatible avec la laïcité.

« Génie de la Bastille qui culmine sur cette place, nous voici de retour, le peuple des révolutions et des rébellions en France. Nous sommes le drapeau rouge ! »3474

Jean-Luc lENCHON (né en 1951), Discours du 18 mars 2012 à Paris

À la Bastille, le tribun fait place comble ce dimanche et défie le temps à la pluie. Plus de 120 000 personnes ont défilé, entre Nation et Bastille dans le symbolique Faubourg-St-Antoine, avant d’écouter le candidat du Front de gauche. Porté par la vague rouge des drapeaux et l’enthousiasme de la foule, il dynamise soudain une campagne sans thème majeur, plombée par le non-dit sur la crise et la perte de confiance dans le pouvoir du politique.

Il appelle à prendre le pouvoir et donc à reprendre la Bastille. Ce jour doit marquer le début de « l’insurrection civique » et populariser sa « VIe République sociale, laïque et écologique », avec le slogan : « Le vote Mélenchon, c’est le vote utile. » Autrement dit, il s’imagine en « dernier président de la Ve » et Marie-George Buffet fait chorus au nom du PCF moribond. Mélenchon va renouveler son exploit, à Toulouse et à Marseille, le 14 avril, rassemblant 100 000 fans sur la plage du Prado, avec des accents lyriques à la Hugo. Il redonne ce goût de la fête, ce bonheur d’être ensemble, unis par la même cause. Le dimanche précédant le premier tour, Sarkozy, place de la Concorde, et Hollande, face au Château de Vincennes, rassembleront un nombre de manifestants non chiffré, mais inférieur.

« Les guerres de religion ne sont jamais finies. Elles ne demandent qu’à se rallumer. Chaque fois qu’un pays va mal… »3479

François BAYROU (né en 1951), Discours au Zénith de Paris, 25 mars 2012

Accusé au pire de récupération, au minimum d’instrumentalisation, à moins que ce ne soit une prémonition… « Il est une montée des périls, de l’intolérance, des violences, des trafics de toute nature. Au cœur de la société française, particulièrement dans sa partie la plus fragile, sur les questions de religion, sur les questions d’origine, sur la couleur de la peau, les tensions montent. Les guerres de Religion ne sont jamais finies. Elles ne demandent qu’à se rallumer. Chaque fois qu’un pays va mal, les tensions montent au sein de ce pays et au sein de son peuple. Quand les gens ne vont pas bien, ils se mettent à regarder la différence d’un regard soupçonneux. Il faut plus de courage pour résister à ces passions que pour y succomber. Au XVIe siècle, dans les guerres de religion, il y avait les ligueurs d’un côté, du côté de l’affrontement, et Henri de Navarre de l’autre plaidait pour qu’on vive ensemble. Vous connaissez mon choix, mon choix d’homme, et mon choix de président : je suis et je serai du côté d’Henri IV, de celui qui force la réconciliation, la tolérance, la compréhension réciproque. » Ainsi, l’extrême centre répond à l’extrême droite. Et l’on ne parle plus de Mohamed Merah, terroriste à la une de l’actualité (Toulouse).

LE QUINQUENNAT DE HOLLANDE

Revivez toute l’Histoire en citations dans nos Chroniques, livres électroniques qui racontent l’histoire de France de la Gaule à nos jours, en 3 500 citations numérotées, sourcées, replacées dans leur contexte, et signées par près de 1 200 auteurs.

« Sommes-nous capables d’écrire ensemble une nouvelle page de notre histoire ? Je le crois. Je le souhaite. Je le veux. Rien ne se construit dans la dissimulation, dans l’oubli et encore moins dans le déni »3500

François HOLLANDE (né en 1954), 20 décembre 2012, à la tribune du Parlement algérien, cinquante ans après l’indépendance de l’Algérie

Élu au terme d’un duel avec Sarkozy l’hyperprésident auquel il s’oppose en maniant habilement l’anaphore (répétition), avec 14 « Moi président de la République » où il se pose en président normal.

Hollande fait son métier de président dans l’ancienne colonie devenu indépendante sous de Gaulle, dans cet exercice incontestablement délicat et obligatoirement consensuel. Pas question de repentance pour éviter la polémique à son retour en France. Mais il y a reconnaissance des crimes coloniaux : « Pendant 132 ans, l’Algérie a été soumise à un système profondément injuste et brutal. Ce système a un nom : c’est la colonisation. Et je reconnais ici les souffrances que la colonisation a infligées au peuple algérien. » C’est un discours sur l’histoire, un discours pour l’histoire, dans le but de solder le passé compliqué de la France et de l’Algérie, avec un appel au devoir de vérité, qui pêche par un certain anachronisme, inévitable sur ce thème de la colonisation.

L’attente des parlementaires algériens n’est pas totalement comblée, l’accueil populaire pas délirant, mais le minimum a été fait, et bien fait, constate la presse. Même constat, sur un point concret, ô combien important : le président français a promis de « mieux accueillir » les Algériens demandant des visas pour se rendre en France, tout en rappelant la nécessité d’équilibrer les flux migratoires.

Après six mois de présidence, Hollande se montre malgré tout plus à l’aise à l’international que dans les débats franco-français d’ordre politique, économique, social ou sociétal. Qui l’eût cru ? La suite de son quinquennat est à juger par les historiens.

MACRON ÉLU ET RÉÉLU POUR UN SECOND QUINQUENNAT

« Je défendrai la France, ses intérêts vitaux, son image. J’en prends l’engagement devant vous. Je défendrai l’Europe, c’est notre civilisation qui est en jeu, notre manière d’être libre. J’œuvrerai à retisser les liens entre l’Europe et les citoyens. J’adresse aux nations du monde le salut de la France fraternelle. »

Emmanuel MACRON (né en 1977), 7 mai 2017, premier discours présidentiel, 7 mai 2017

Le plus jeune président de la Cinquième, élu à 39 ans sur le « en même temps » et créant son propre mouvement avec ses initiales (EM, En Marche, devenu la REM, République En Marche), il sera réélu pour un second septennat avec son parti Renaissance, toujours gagnant contre Marine Le Pen qui transforma elle-même le FN (Front national) paternel en RN (Rassemblement national), avec la volonté de dédiaboliser l’extrême-droite.

Acceptant et reniant tour à tour le qualificatif de populiste, refusant l’étiquette de centriste (malgré une évidente parenté avec Giscard d’Estaing) cherchant à être ou paraître en même temps de gauche et de droite, il s’ingénie à brouiller les repères, jongle avec les concepts, séduit par son intelligence autant qu’il exaspère. Il faudra bien deux quinquennats pour juger l’homme, le politicien et sa place dans l’Histoire.

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